La rédaction de cet article est vraiment confuse.
Nous souhaitons, je le répète, que l'enregistrement des interpellations soit généralisé mais les circonstances d'une interpellation ne peuvent pas être rapprochées du cadre procédural de la garde à vue. On mélange les torchons et les serviettes ! Ce débat n'a rien à voir avec la loi sur la présomption d'innocence de 2000 modifiée en 2007.
Il existe aujourd'hui de nombreuses circonstances dans lesquelles un enregistrement audiovisuel est effectué, par exemple dans les transports en commun – les incidents de la gare du Nord ont ainsi été filmés. Cela permet de prouver qui a fait quoi. À ce moment-là, on extrait de ces enregistrements des photos parce qu'il est plus facile pour les magistrats de consulter des photos dans un dossier que de visionner tout un CD-ROM vidéo. Ces documents sont versés à la procédure, comme pièces cotées attestant le déroulement des faits, par exemple que tel individu qui portait un sweet-shirt jaune était présent ou que les policiers ont procédé de telle ou telle manière.
C'est le droit commun de la preuve. Aujourd'hui, les enregistrements audiovisuels ne posent aucun problème de preuve. D'ailleurs, quand Christian Estrosi voulait à toute force montrer, lors des auditions, que l'article 4 ferait de l'enregistrement audiovisuel une preuve, les policiers lui rétorquaient unanimement que c'était déjà une preuve aujourd'hui.
Après l'adoption de cet article 4, ce ne sera plus pareil. En effet, l'avocat n'aura plus accès à l'enregistrement puisque vous avez repoussé l'amendement n° 29 que nous venons de vous proposer. Vous dérogez à l'article 114 du code de procédure pénale. Désormais, l'enregistrement audiovisuel que vous versez au dossier ne sera plus mis à la disposition des avocats.
Pourtant, l'enregistrement n'est pas forcément un élément à charge pour les policiers, il peut être aussi un élément à décharge qui montre que telle interpellation faisant l'objet d'une plainte s'est déroulée normalement. Si on détruit tout de suite la bobine, on ne peut pas l'utiliser comme un élément de preuve qui permettrait de montrer la bonne foi de la police nationale, de prouver qu'elle a été confrontée à une rébellion, à des agissements violents.
Franchement, tel qu'il est écrit, cet article n'est ni fait ni à faire. La seule volonté du groupe socialiste, au travers de ses amendements, c'est de le rendre utile, alors que vous êtes en train de mettre en place un dispositif juridique tarabiscoté interdisant aux avocats de la défense de consulter l'enregistrement, ce qui pose un problème majeur.