Je n'ai pas les chiffres au niveau national, mais Air France est l'une des compagnies au monde où il y a le plus de femmes. Aux États-Unis par exemple, les pilotes viennent de l'armée et, de ce fait, comptent moins de femmes dans leurs rangs.
À Air France, sur environ 4 200 pilotes, nous sommes 284 femmes – soit 6,8 % de l'effectif total – parmi lesquelles on compte 58 commandants de bord – soit 4,2 % de l'effectif – et 226 copilotes – soit 9,4 % de l'effectif. La proportion des femmes dans l'effectif global n'explose pas. Quand les embauches se faisaient à peu près à flux constant, elle augmentait de 0,3 % par an. Cela dit, dans les nouvelles promotions, notamment chez les stagiaires, on compte couramment 15 % de femmes.
Il est regrettable qu'au collège et au lycée, on n'insiste pas suffisamment sur le fait que le métier de pilote est accessible aux femmes comme aux hommes. Dans mon lycée, alors que je savais que je voulais faire ce métier depuis l'âge de quatorze ans, personne n'était à même de me conseiller. Or, il existe plusieurs voies d'accès : la filière des cadets d'Air France ; l'École nationale de l'aviation civile (ENAC), où je suis entrée en 1999 au sortir des classes préparatoires ; l'armée de l'air, qui maintenant convertit ses licences militaires en licences civiles permettant de piloter des avions de ligne ; enfin, le privé, que je ne conseillerai à personne.
Dans le cockpit, le commandant de bord et le copilote ont deux statuts différents mais font le même métier. À Air France en tout cas, tous deux pilotent l'avion de la même façon.
En arrivant à l'aéroport, nous préparons notre vol à partir de documents qui nous permettent de connaître le temps prévu, la quantité de carburant à emporter ainsi que les particularités des passagers – élément important, surtout sur un long courrier. Ensuite, nous rencontrons les hôtesses et les stewards lors d'un briefing commun, qui est l'occasion de nous présenter. En effet, les équipages sont renouvelés à chaque vol afin d'éviter une routine qui serait préjudiciable à la sécurité ce qui, en contrepartie, exige l'application de référentiels communs.
Nous nous rendons ensuite à l'avion. Le copilote en fait le tour pour tout vérifier : même si le mécanicien est déjà passé, une erreur ou un oubli sont toujours possibles. D'ailleurs, c'est le commandant de bord qui, comme responsable de la mission par délégation, l'est aussi de ce « tour avion ».
Puis nous continuons à préparer le vol dans le cockpit après avoir déjà déterminé qui allait effectuer quelles étapes. Sur moyen courrier, s'il y a quatre étapes dans la journée, le commandant de bord et le copilote se les partagent à égalité : chacun fera donc deux décollages et deux atterrissages. Sur long courrier, la situation est un peu différente : le règlement exige qu'à tout moment chacun ait effectué trois atterrissages et trois décollages au cours des trois mois précédents – c'est ce qu'on appelle « l'expérience récente » – et si le copilote par exemple est un peu « juste », le commandant de bord lui laissera effectuer une étape supplémentaire.
Celui qui fait le vol comme « pilote en fonction » rentre dans l'ordinateur de bord tous les paramètres de la route, et tout est vérifié en commun avant le départ. Ensuite, après le décollage, nous vérifions, toujours en commun, que l'avion se comporte bien, qu'il y aura suffisamment de carburant, que les conditions météorologiques restent – ou deviennent – suffisamment clémentes pour pouvoir se poser, étant entendu que le « beau temps » aéronautique est une notion tout relative : les performances des avions actuels leur permettent de se poser dans des conditions difficiles, ce qu'ils font d'ailleurs très bien tout seuls quand il y a du brouillard !