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Intervention de René Dosière

Réunion du 19 décembre 2011 à 17h00
Remboursement des dépenses de campagne de l'élection présidentielle — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRené Dosière :

La sécurité personnelle du Président de la République est assurée par le service de protection des hautes personnalités, c'est-à-dire par les quatre-vingts policiers recrutés et payés par l'Élysée. Le chef de l'État doit avoir une sécurité rapprochée qu'il détermine lui-même. Personne ne met cela en cause.

En revanche, voici ce qui est mis en cause. Au cours de ses déplacements, les mesures prises pour qu'il soit encadré par des policiers, des gendarmes, des gardes mobiles, des CRS, des policiers municipaux ou des sapeurs pompiers, sont extraordinaires. Ceux qui ont eu l'occasion de servir sous les présidents précédents, Chirac ou Mitterrand, n'ont jamais connu de telles mesures et ils sont stupéfaits de voir l'importance des forces de police mobilisées. Elles sont d'ailleurs si nombreuses que tous ceux qui pourraient avoir à protester contre la visite du Président sont repoussés à des distances telles que le Président ne risque pas de les entendre ! Les préfets sont ainsi amenés à renforcer ces mesures, ce qui assure également leur sécurité.

Le ministre de l'intérieur s'obstine à ne pas répondre aux questions précises qui lui sont posées. Or, j'appelle votre attention sur ce point, monsieur le ministre, le rôle d'un parlementaire est de contrôler l'usage de l'argent public : c'est un principe constitutionnel depuis 1789, depuis qu'il existe une Assemblée nationale en France. C'est même là le fondement de notre mission, conformément à l'article 15 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

Pourtant, lorsque nous interrogeons le ministre de l'intérieur sur la quantité de forces de police mobilisées à l'occasion de tel déplacement du Président – et nous l'interrogeons après coup, car il ne s'agit pas de révéler ce nombre à des manifestants éventuels, mais de nous permettre de juger si l'usage des forces est proportionné –, il ne nous répond pas ou, plus exactement, il nous fait une réponse digne d'être adressée à un élève policier de première année. Mais Jean-Jacques Urvoas et moi-même ne sommes pas des élèves d'une école de police, nous sommes des parlementaires, et notre mission est de contrôler l'usage de la force publique. Je souhaite, monsieur le ministre, que vous puissiez rappeler au ministre de l'intérieur qu'il a un devoir de réponse et qu'il ne saurait se soustraire au contrôle du Parlement. Nous le poursuivrons de nos questions aussi longtemps qu'il ne donnera pas de réponses.

Fort heureusement, comme le ministre de l'intérieur ne contrôle pas encore la totalité de la presse locale, nous avons, par le biais des journalistes qui enquêtent sur le terrain, un certain nombre d'indications. Ainsi, nous pouvons dire que l'on mobilise en moyenne 1 000 personnes – policiers, gendarmes ou force mobile – pour assurer la sécurité lors d'un déplacement du Président de la République.

Cela représente un coût de 500 000 euros, totalement prohibitif. Si le Président de la République, à l'instar de ses prédécesseurs, mobilisait des forces de police en nombre plus normal, car il est tout à fait légitime de prendre des mesures de précaution, le coût de ces forces de sécurité serait ramené à 150 000 euros. Aujourd'hui, à l'occasion de chaque déplacement du Président de la République, on constate donc un surcoût en matière de sécurité par rapport à ses prédécesseurs de l'ordre de 350 000 euros.

Et pendant ce temps, tous ces policiers mobilisés ne font pas ce pour quoi ils sont formés, lutter contre la délinquance. C'est d'ailleurs peut-être la raison pour laquelle le ministre de l'intérieur s'obstine à ne pas donner les chiffres : il ne veut pas faire apparaître le nombre de policiers détournés de leur mission principale.

En réponse à la remarque de la Commission nationale des comptes de campagne, j'indique que, pour chiffrer le coût des déplacements, il faut s'appuyer sur le chiffre calculé par la Cour des comptes. Sur l'ensemble des déplacements de l'année 2009, ce chiffre s'établit à 93 404 euros en moyenne, auxquels il convient d'ajouter les dépenses qui restent à la charge des collectivités locales, de l'ordre de 10 000 à 20 000 euros par déplacement. Le coût des déplacements, hors forces de sécurité, s'élève ainsi à quelque 113 000 euros. Vingt déplacements coûtent donc 2,260 millions d'euros, dépense qui mériterait de figurer dans le compte de campagne.

On nous objecte que ce n'est pas nouveau. J'ose espérer, monsieur le ministre, que vous ne nous donnerez pas à nouveau cette réponse, car elle ne témoigne pas d'une grande imagination. Au demeurant, ce n'est pas parce que certaines pratiques étaient en vigueur autrefois qu'il faut continuer à les appliquer.

D'ailleurs les choses ont changé. En 1995, le Président de la République n'était pas candidat, c'est le Premier ministre qui l'était et il avait contre lui un opposant socialiste mais surtout un opposant de son propre camp. Les rapports entre M. Balladur et M. Chirac étaient particulièrement tendus, ce que l'on voit d'ailleurs ressurgir quelques années plus tard. Il existait donc une sorte de surveillance mutuelle.

En 2002, le Président était candidat mais le Premier ministre l'était également. Eux aussi se surveillaient mutuellement.

En l'occurrence, le Président est seul à être candidat.

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