Monsieur le rapporteur, je vous renouvelle mes remerciements pour le travail accompli par la commission.
Vous appelez de vos voeux un programme français et européen de vols habités. Déjà, avec le laboratoire Colombus et l'ATV, l'Europe spatiale a fait un premier pas vers l'exploration humaine de l'espace. Par la suite, je compte proposer à nos partenaires européens de lancer une réflexion avec les autres puissances spatiales mondiales pour un programme commun de vols habités. Il s'agit en effet, comme l'a dit le Président de la République, d'une aventure mondiale. J'en parlerai lors de la réunion informelle des ministres européens chargés de l'espace qui se tiendra à Kourou à la fin du mois de juillet.
Monsieur Folliot, vous avez rappelé que la réflexion sur la politique spatiale française ne peut être dissociée d'une réflexion menée au niveau européen. Je partage tout à fait votre analyse et c'est tout l'objet de la présidence française de l'Union européenne dans le domaine spatial : faire émerger une vision partagée pour l'espace au niveau communautaire. Vous plaidez aussi pour un véritable droit européen des activités spatiales. Je rappelle que, si le traité de Lisbonne prévoit une compétence partagée dans ce domaine, il exclut en revanche toute possibilité de construction d'un droit communautaire. Soyez assuré que je ferai mon possible pour faire évoluer cette situation et, en attendant, favoriser l'harmonisation des droits des États membres. Pour ce qui concerne la propriété intellectuelle, je vous confirme que la France soutiendra l'initiative de brevet communautaire.
Monsieur Léonard, vous appelez de vos voeux une loi de programmation spatiale. Cette programmation existe déjà partiellement avec le contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens du CNES, par lequel l'État s'est déjà engagé sur le moyen terme sur les moyens qu'il consacre à l'espace, et avec la loi de programmation militaire. Vous pouvez compter sur moi pour appuyer vos demandes auprès d'Hervé Morin pour que l'espace ait une place privilégiée dans la loi de programmation militaire. Le Président de la République l'a d'ailleurs annoncé à Kourou : « La nécessité de renforcer de façon substantielle les forces spatiales militaires ne fait aucun doute. »
Dans le domaine de l'exploration spatiale, les objectifs de la France restent clairement orientés vers Mars, qui est un objet scientifique particulièrement intéressant pour mieux appréhender l'apparition de la vie. Le Gouvernement privilégie l'exploration robotique, dont le rapport qualité-prix est meilleur que celui de l'exploration humaine, sans toutefois fermer la porte aux vols habités. Le Président de la République a d'ailleurs déclaré à Kourou : « Je crois que nous ne pouvons pas contester la volonté de repousser notre présence dans l'univers jusqu'aux frontières que tracent notre maîtrise technologique et le courage des pionniers ». Il nous a invités à travailler avec nos partenaires européens et internationaux à un programme spatial mondial et je m'y emploierai dans le cadre de la présidence française de l'Union européenne.
Lors de la réunion de l'ESA au niveau ministériel de novembre, le Gouvernement confirmera clairement notre engagement au niveau européen et dans le sens de l'espace au service des hommes.
Madame Berthelot, vous demandez à être rassurée sur le mode d'autorisation pour des opérations particulièrement délicates, comme les lancements ou les changements d'orbite. Effectivement, il convient de contrôler ces opérations sensibles avec une grande attention. D'ailleurs, dans le texte qui vous est proposé aujourd'hui, même dans le cadre d'une licence, l'autorité de contrôle peut donner à tout moment les instructions nécessaires à la sécurité des opérations, que ce soit au cours d'un lancement ou de la maîtrise d'un objet en orbite.
Vous vous inquiétez aussi d'une modification de rédaction. En effet, le texte ne prévoit plus que le CNES soit responsable de plein droit du contrôle de conformité, mais qu'il assure cette responsabilité par délégation de l'autorité administrative. Je tiens à vous rassurer : cette nouvelle disposition ne reflète aucune défiance vis-à-vis du CNES, bien au contraire. La confiance du Gouvernement envers le Centre et tous ses agents est totale. Simplement, une délégation automatique ne nous semblait pas opportune, car, n'étant pas une autorité administrative indépendante, c'est sous l'autorité du ministre chargé de l'espace qu'il exercera cette responsabilité. Je tiens à apaiser vos craintes de voir le CNES démantelé et cantonné à ses activités de recherche : avec ce projet de loi, il est encore plus au centre de la politique spatiale.
Vous vous inquiétez aussi de l'intention du Président de la République de mettre le centre spatial guyanais au service de l'Union européenne. Cette annonce relève d'une vision générale : pour faire de l'Union européenne une véritable puissance spatiale, il faut disposer d'un port spatial. Cela procède de la même logique que celle qui a conduit à sa mise à disposition de l'ESA. Elle n'implique pas un désengagement de l'État, bien au contraire. Le centre spatial reste sur le territoire français et la France aura le contrôle de ses activités.
Par ailleurs, je suis favorable à votre proposition d'inclure les atteintes à l'environnement et à la santé publique dans les dommages visés à l'article 1er.
Vous demandez que les préoccupations des opérateurs soient prises en compte lors de la rédaction des décrets d'application : ils seront très largement consultés.
S'agissant de l'ONERA, qui est placé sous la responsabilité du ministère de la défense, les équipes d'Hervé Morin m'ont confirmé que cet organisme a signé un contrat d'objectifs et de moyens, qui a été respecté chaque année.
Comme M. Lasbordes, je tiens à rappeler que la France est la troisième puissance spatiale dans le monde et la première en Europe et qu'elle consacre à l'espace deux fois plus de moyens que l'Allemagne, qui est la deuxième.
Vous souhaitez que l'environnement et le développement durable figurent au premier rang des priorités pour les programmes spatiaux. Je partage cette idée et je la porterai aussi bien à la réunion de l'ESA au niveau ministériel qu'au Conseil compétitivité, qui traitera en particulier du programme GMES – observation de la Terre pour l'environnement et la sécurité.
Monsieur Candelier, vous avez raison de souligner que l'espace n'est pas un domaine simplement technique. Il y a des enjeux stratégiques qui nécessitent la mise en place d'un cadre juridique clair. Je me réjouis donc que vous reconnaissiez la nécessité de ce projet de loi. S'agissant de la nécessaire harmonisation européenne, j'ai déjà eu l'occasion de dire qu'elle me semble nécessaire, mais que le droit communautaire n'en fait pas une compétence partagée. Rien ne nous empêche toutefois de favoriser cette harmonisation dans le cadre de nos relations bilatérales avec chacun de nos partenaires européens.
Vous vous inquiétez du transfert, au cours de ces dernières années, de certaines activités spatiales au secteur privé. Vous devriez, au contraire, vous en féliciter, car c'est la preuve que le secteur spatial public a su créer un dispositif performant qui a engendré de nombreuses activités économiques et donc de nombreux emplois.
Vous considérez qu'avec une croissance de 1,5 % par an de sa subvention, les moyens octroyés au CNES sont insuffisants au vu de notre ambition spatiale. D'une part, notre budget spatial est le premier en Europe, d'autre part, le président du CNES, Yannick d'Escatha, a accompli un remarquable travail, que je tiens à saluer, qui a permis de dépenser mieux tout en augmentant les capacités de recherche et de programmes.
Vous soulignez la dualité entre l'activité spatiale européenne menée par l'ESA et la politique spatiale de l'Union européenne. Il ne faut pas les opposer mais, au contraire, les rapprocher. C'est tout l'objet des travaux menés au niveau européen ces dernières années : l'Union européenne lance et finance des programmes et l'ESA se charge de mettre en oeuvre. Il en est ainsi pour le nouveau programme Galileo. La France, à l'occasion de sa présidence de l'Union, renforcera cette relation fructueuse, nécessaire à l'avènement d'une politique spatiale européenne.
Madame Taubira, nous ne sommes pas en retard. Ce texte tient compte de nos engagements internationaux, mais ceux-ci ne relèvent pas du droit communautaire et ne demandent donc pas une transposition au sens formel du terme. Il vise, dans un souci de clarification, à intégrer dans le droit interne des obligations auxquelles la France est déjà soumise en application des traités qu'elle a signés. Si ce projet de loi est aujourd'hui si nécessaire, c'est parce que, comme vous l'avez justement souligné, de nouveaux opérateurs privés investissent désormais le champ du spatial. Compte tenu de la nature des risques, il convenait de traiter cette activité ouverte à de nouveaux acteurs économiques de manière un peu différente et de l'encadrer par des normes juridiques.
Utiliser l'espace au service de la paix est une opportunité que nous devons saisir, vous avez tout à fait raison. L'observation de la Terre pour aider les scientifiques, pour donner à chaque habitant de la planète l'eau dont il a besoin, est une vision que je partage totalement. C'est en ce sens que nous définirons les priorités de la politique spatiale française, mais aussi européenne, une politique au service de l'homme et de la Terre.
S'agissant de la taxe professionnelle du centre spatial, il n'est pas impossible qu'Arianespace transfère des biens à l'ESA pour se les faire mettre à disposition. Je m'engage à demander des compléments d'information sur ce point et à vous tenir au courant. Je me ferai également l'écho auprès des entreprises du centre de votre demande de création d'un observatoire de l'environnement et de la société autour du centre spatial guyanais. Enfin, l'information des populations sur l'impact des activités spatiales sur l'environnement doit être totale, j'en suis tout à fait d'accord. Le lien entre science et société doit être renforcé et nos chercheurs doivent faire leur possible pour rendre leur science compréhensible par tous les citoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)