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Intervention de Christian Vanneste

Réunion du 13 décembre 2011 à 15h00
Protection de l'identité — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristian Vanneste :

Il est d'ailleurs piquant de constater que ceux qui se refusent à combattre fermement la récidive et prétendent lutter contre toutes les discriminations font une telle différence absolue et définitive entre les honnêtes gens et ceux qui le sont moins. Vous l'aviez d'ailleurs souligné au Sénat, monsieur le ministre.

Deuxième révélation : ce texte est également révélateur de l'incessante progression des liens qui compriment l'expression déjà indirecte de la volonté populaire. Lorsque celle-ci s'exprime à travers la représentation légitime, elle se voit de toute part contrainte par des instances non démocratiques, qui entendent cependant lui dicter la loi.

C'est vrai pour la CNIL, auréolée de son onction européenne, qui a fait de sa phobie du croisement des fichiers ou du registre de la population, pourtant pratiqués dans les très démocratiques pays scandinaves, un dogme souvent propagé parmi nous par ces parlementaires missionnaires dont on aurait préféré qu'ils défendent davantage le point de vue de l'Assemblée au sein de la CNIL plutôt que celui de la CNIL au sein de l'Assemblée.

C'est vrai du Conseil d'État, qui peut nous donner ses avis, nous rappeler telle ou telle habitude juridique, mais sans nous ôter de l'esprit que le Parlement et l'Assemblée nationale devraient se reconnaître le pouvoir de briser les noeuds gordiens, tous les noeuds gordiens, hormis ceux de notre Constitution.

Je ne vais pas citer bien sûr la Ligue des droits de l'Homme, la ligue autoproclamée des droits de l'Homme, qui ne me paraît pas du tout une référence sur un texte présenté à l'Assemblée.

Ce texte revient donc, passé à l'essoreuse idéologique du Sénat. Il lui reste, comme à un cheval à qui l'on aurait mis des oeillères, la protection des documents d'identité pour seule finalité, limitée à de justes et nécessaires proportions. Les usurpateurs, et encore moins les criminels de tout poil, ne sont pas l'objet du texte et peuvent donc dormir tranquilles. Contrairement à ce qu'affirmait le rapporteur du texte au Sénat, la dissuasion ne suffit pas, car la répression est la meilleure des dissuasions.

C'est la raison pour laquelle il était nécessaire d'amender ce texte pour lui donner toute sa vigueur citoyenne, celle qui faisait dire à Montesquieu que la liberté chez un citoyen vient du sentiment qu'il a de sa sûreté. La plus grande sûreté de l'homme, c'est de savoir les délinquants hors d'état de lui nuire, ce n'est pas d'être protégé virtuellement contre de potentielles atteintes aux libertés abstraites que la traçabilité des opérations découragera de toute manière.

Certains prétendent alors qu'il pourrait y avoir une utilisation politique différente liée à un changement de régime. Je l'ai lu dans les débats du Sénat. Dans ce cas, il y aurait aussi malheureusement un changement de la loi. Il est inutile d'affaiblir la défense de la République en évoquant les menaces imaginaires que ferait peser sur les libertés un régime qui ne serait plus républicain.

Il faut donc rétablir le lien fort, qui permet d'identifier l'usurpateur sans passer par une enquête complexe et coûteuse qui distrairait les effectifs policiers, et qui, pour cette raison, ne se ferait pas. Aucun pays n'a d'ailleurs choisi le lien faible, cela a été dit et redit. Seul le Sénat l'a fait, pour des raisons idéologiques et politiciennes, non pour protéger les honnêtes gens de risques imaginaires, mais pour s'opposer au Gouvernement dans un domaine où l'unanimité devrait régner, celui de la lutte contre la délinquance.

De même, il est nécessaire de revenir sur l'absurde opposition du Sénat à l'utilisation du fichier en matière de recherche criminelle, comme si la protection des criminels contre les potentielles et virtuelles atteintes aux libertés publiques pouvait être un objectif républicain. L'encadrement de l'utilisation du fichier dans les limites de son objet, d'abord, dans celle des procédures ensuite, flagrances, enquêtes préliminaires, commissions rogatoires, avec l'autorisation du juge d'instruction, enfin, devrait rassurer les avocats verbeux des libertés abstraites, dont l'inconscient semble toujours si chargé de fantasmes liés aux régimes policiers.

Les avancées ou les reculs techniques sur la reconnaissance faciale ou sur le nombre des empreintes présentent-ils un avantage ou un inconvénient ? L'identification des victimes est privilégiée par rapport à celle des coupables dans le texte définitif. Pourtant, fallait-il faire une distinction entre les victimes collectives et les victimes individuelles ? J'aimerais que, sur ces points, des réponses précises soient apportées, autrement que par des génuflexions devant la sainte CNIL ou le sacro-saint Conseil d'État.

Il s'agit pour nous de rétablir un texte, et ce dans un but profondément humaniste : celui de restaurer une personne dans sa plus éminente dignité, qui consiste à être qui elle est et qui elle veut être, avec sa part de nature – les empreintes – et sa part de liberté, avec son irremplaçable individualité, avec ses droits, c'est-à-dire avec les libertés réelles et concrètes que lui garantit la société démocratique au sein de laquelle elle vit : penser, s'exprimer, aller et venir, travailler, être propriétaire, fonder une famille, voter, en somme être un homme, une femme, citoyen respecté comme tel dans le cadre des valeurs de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Voilà ce à quoi, je crois, aboutit le texte que nous allons adopter dans quelques instants. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

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