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Intervention de Claude Guéant

Réunion du 13 décembre 2011 à 15h00
Protection de l'identité — Discussion en deuxième lecture d'une proposition de loi

Claude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration :

Je suis fermement opposé au lien faible, à ces prétendues « garanties matérielles », car elles ne sont absolument pas solides. Le lien faible est un leurre. Il n'a encore été mis en oeuvre dans aucun pays. Il ne s'agit que d'un concept. L'entreprise à l'origine du lien faible s'est d'ailleurs clairement dédouanée auprès de l'Agence nationale des titres sécurisés en lui écrivant que « le lien faible est un concept qui n'a fait l'objet d'aucune réalisation opérationnelle à ce jour. Le passage du concept à un produit opérationnel nécessitera du temps et des investissements importants que nous n'avons pas précisément évalués à l'heure actuelle ».

Retenir le lien faible, c'est ainsi, à mon sens, non pas sécuriser nos titres d'identité, mais prendre un double risque, technique et financier. Il ne serait pas sérieux d'engager un projet aussi important pour nos concitoyens avec aussi peu de garanties.

En outre, comme je l'ai également souligné dans les débats précédents, cela reviendrait à instituer par la loi un avantage compétitif important, voire un monopole, au profit de la société détentrice du brevet. Ce serait bien évidemment en contradiction avec le droit européen de la concurrence.

Au-delà du manque de solidité du lien faible, c'est parce que j'estime, comme les auteurs de cette proposition de loi et votre rapporteur, que la protection des libertés fondamentales mérite d'être gravée dans la loi, et non subordonnée à un dispositif technique dégradé, que je défends aujourd'hui devant vous le développement de garanties légales. Cette confiance dans la force de la loi trouvera, j'en suis certain, un écho tout particulier auprès des parlementaires que vous êtes, investis du pouvoir législatif.

Ces garanties légales, proposées par un amendement du Gouvernement pour tenir compte de la décision du Conseil d'État du 26 octobre, mais aussi de l'avis de la CNIL, vont ainsi permettre de strictement limiter l'accès à la base TES et au traitement d'identification. Elles s'ajoutent aux garanties déjà présentes en application des obligations indiquées par la CNIL : traçabilité des accès, segmentation et sécurisation des données.

Le Gouvernement vous propose donc d'inscrire dans la loi la liste exhaustive des cas où l'identification à partir des empreintes digitales est autorisée. Cela permet ainsi de fixer par la loi une utilisation strictement dédiée de la base, de laquelle il sera impossible de sortir : premier cas, logiquement, au moment de la délivrance ou du renouvellement du titre afin d'en garantir la bonne fabrication et la remise à la bonne personne ; deuxième cas, sous contrôle du procureur de la République, dans le cadre des infractions pour usurpation d'identité, ce qui correspond à l'objectif initial de la loi ; troisième et dernier cas, toujours sous le contrôle du procureur, pour permettre l'identification de victimes d'accidents collectifs ou de catastrophes naturelles. C'est un amendement de votre rapporteur, Philippe Goujon, auquel le Gouvernement souscrit pleinement.

Comme vous le constatez, ces garanties juridiques sont importantes. Elles entrent pleinement dans une réelle prise en compte des enjeux de ce texte concernant les libertés publiques. La restriction aux infractions liées à l'usurpation d'identité, sous le contrôle d'un magistrat, est une limitation substantielle qui assure la proportionnalité de la proposition de loi aux objectifs visés.

Mesdames et messieurs les députés, le texte issu des travaux de votre commission des lois inscrit dans notre droit les moyens de protéger l'identité de nos concitoyens sans porter atteinte à leurs libertés fondamentales.

C'est un texte nécessaire et équilibré.

Au nom du Gouvernement et dans l'intérêt de nos compatriotes, je vous demande donc de le soutenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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