J'en viens aux enjeux et aux pistes de réflexion que nous formulons sur le très haut débit. Le schéma de déploiement actuel suscite des interrogations. D'autres scénarios auraient ou être ou sont envisageables : le scénario d'un opérateur unique à majorité publique ou à majorité privé ; un scénario centré sur les collectivités territoriales avec possibilité de projets publics intégrés couvrant des zones rentables et non rentables.
Avec ma co-rapporteure, Mme Laure de La Raudière, nous divergeons dans l'appréciation que nous portons sur l'opportunité du schéma actuel comparé à ces pistes alternatives. Mais comme nous sommes dans le cadre d'un contrôle d'application de la loi, nous avons aussi réfléchi aux améliorations qui peuvent être apportées au cadre actuel et nous avançons des propositions communes.
Les moyens humains dont dispose l'État sont d'abord insuffisants. Il y a très peu de personnel, à la fois au niveau central et au niveau déconcentré : parfois seulement un mi-temps par région, comme nous l'avons constaté au cours de nos déplacements.
Il faut ensuite rappeler que l'objectif doit être de déployer la fibre pour tous. Une fraction importante des fonds disponibles pour soutenir les déploiements des collectivités territoriales pourrait être consacrée au financement de projets de montée en débit sur le réseau cuivre. Le point positif de ces projets est qu'ils permettent de réduire la fracture numérique et de faire profiter de débits élevés aux territoires ruraux. Le point négatif est qu'ils conduisent à des surcoûts par rapport au passage direct à la fibre, puisqu'une partie des investissements consacrés à la montée en débit ne sera pas réutilisable. Il n'existe d'ailleurs pas d'estimation fiable de ce surcoût. Je signale que le problème des estimations de coûts est plus large, puisque le directeur de cabinet du ministre de l'énergie annonçait ce matin à l'occasion d'un colloque organisé par l'ARCEP que le coût du déploiement de la fibre optique sur l'ensemble du territoire devrait être de 25 milliards d'euros, alors que l'estimation de l'ARCEP est de 21 milliards.
Autre point, le schéma de déploiement retenu par le Gouvernement conduit à distinguer trois zones : en zones très denses, concurrence entre les opérateurs privés; en zones moyennement denses, déploiement d'un réseau mutualisé par les opérateurs privés; et dans les zones les moins denses, déploiement à la charge des collectivités publiques. Un appel à manifestation d'intention d'investir a été lancé pour connaître les projets de déploiement des opérateurs privés et délimiter la zone d'intervention des collectivités territoriales. Le problème est qu'aucun dispositif ne vient sanctionner les déclarations des opérateurs. C'est pourquoi nous proposons qu'un aspect « sanction » soit introduit.