Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, cette proposition de loi est l'occasion de rappeler combien les vacances collectives sont riches d'expériences, riches de découvertes de la vie en commun, d'environnements nouveaux et d'activités nouvelles, riches de rencontres avec d'autres enfants, d'autres jeunes issus de milieux différents, de régions différentes.
La vie d'un enfant, d'un jeune est rythmée par trois temps principaux. La famille est d'abord le premier lieu, celui où l'enfant se construit d'autant mieux que sa famille peut lui offrir un environnement équilibré, un cadre de vie propice, des règles précises, un accès au savoir et à la culture. L'éducation nationale, ensuite, à laquelle on demande beaucoup, à laquelle la société demande de plus en plus et notamment de compenser la démission de familles en difficulté, assure un rôle essentiel de formation des enfants.
Le troisième temps, c'est ce tiers temps pédagogique dont on a souvent parlé ; c'est ce temps de loisirs passé à découvrir, à pratiquer des activités sportives ou culturelles, des activités à la fois ludiques et éducatives. Il est essentiel à la construction de la personnalité de l'enfant, à son émancipation.
C'est dans ce cadre de l'éducation populaire qu'ont été organisées par les militants de l'enfance les « colos », que nous appelons maintenant les centres de vacances. Mais j'espère bien que les « colos » ont un bel avenir, car ces séjours collectifs, s'ils ont évolué dans leur organisation, offrent des activités de plus en plus variées en France et à l'étranger. De même que les vacances familiales, les vacances collectives de jeunes sont en effet l'occasion de découvrir d'autres pays.
Comme le rappelle l'exposé des motifs, un accident de la route dramatique survenu aux États-Unis a coûté la vie à deux jeunes filles en 2009. Je veux ici saluer leur mémoire, et mes pensées vont vers les familles touchées par ce drame.
Les contrôles exercés sur l'organisation des séjours à l'étranger sont limités ; il est bien sûr souhaitable que l'État prenne les dispositions nécessaires pour assurer la sécurité des jeunes.
Mais il est bon aussi de rappeler que les vacances collectives encadrées par des animateurs formés sont très peu accidentogènes ; elles le sont beaucoup moins que les vacances en famille, même s'il y a toujours trop d'accidents et que cela est parfois dramatique.
S'il y a peu d'accidents – il y en a toujours trop –, cela tient à la réglementation, bien sûr, mais surtout à la qualité, au sérieux des associations, des municipalités organisatrices de ces séjours, au sérieux des animateurs et directeurs de centres de vacances.
La réglementation concernant les vacances a évolué tout au long du XXe siècle. Elle n'est d'ailleurs pas la même pour les centres de vacances et les centres de loisirs que pour les scouts ; pour les mouvements de scoutisme, les règles sont bien moins strictes. La question pourrait donc se poser : le scoutisme, ce sont aussi des séjours collectifs pour enfants, n'y a-t-il pas lieu ici aussi de légiférer ? Il faudrait y regarder de plus près.
En ce qui concerne la réglementation de ces séjours collectifs, 1976 est une année importante. Au fil des années, le législateur s'est soucié de plus en plus de la sécurité physique et morale des mineurs, mais aussi de la valeur éducative des séjours.
La question du renforcement des conditions de sécurité des mineurs accueillis dans le cadre d'un séjour, à l'étranger comme en France, doit faire l'objet d'un véritable consensus, et mérite que l'on fasse preuve de responsabilité dans la conduite de ce travail législatif.
Or, nous déplorons que l'examen de ce texte se déroule dans des conditions peu propices à la tenue d'un travail parlementaire digne de ce nom. En effet, le délai extrêmement court entre l'inscription de ce texte à l'ordre du jour de notre assemblée et la date limite de dépôt des amendements – cinq jours, week-end compris ! – a notamment empêché l'organisation d'auditions et de réunions avec les principaux acteurs des accueils collectifs de mineurs avant l'examen en commission. Ce travail aurait été pourtant nécessaire pour appréhender cette question dans son ensemble et pour apporter des solutions justes et pérennes.
Nous avons donc déposé des amendements sur cette proposition de loi afin d'ouvrir dès à présent un débat nécessairement plus global sur l'encadrement de ces séjours et sur le volontariat associatif.
La question du renforcement du contrôle des conditions de sécurité nécessite en effet une analyse plus approfondie. Il est de notre responsabilité de faire en sorte que les accidents dramatiques qui ont pu survenir dans le cadre de séjours à l'étranger, comme parfois en France, ne puissent plus se reproduire à l'avenir.
Il est également indispensable de renforcer et de faire appliquer les sanctions en cas de dysfonctionnement dans l'organisation de ces séjours à l'étranger ou de manquements aux règles de sécurité.
Certes, il nous faut apporter une réponse à ces questions, mais cela ne pourra pas se faire sans une réflexion d'ensemble sur l'encadrement au sein des structures accueillant des mineurs et sur les évolutions nécessaires du volontariat de l'animation.
M. le rapporteur a même reconnu, lors de l'examen en commission, que ce texte était insuffisant et qu'il demeurait perfectible.
Cette proposition de loi a d'ailleurs fait l'objet de plusieurs amendements qui élargissent le champ du texte initial et qui renvoient à d'autres problématiques plus larges.
Si le texte initial comportait un article unique, celui voté en commission en comporte désormais six, qui ont considérablement transformé les objectifs poursuivis initialement.
Le nouvel article 6, issu de l'amendement de M. Baguet, est celui qui suscite le plus d'interrogations et d'inquiétudes. En effet, cette disposition remet en cause le contrat d'engagement éducatif et par là même l'avenir des séjours de vacances en créant un nouveau statut dérogatoire qui aggrave finalement le flou juridique actuel.
La position du Conseil d'État du 11 octobre dernier, confirmant la décision de la Cour de justice de l'Union européenne et instituant un repos obligatoire quotidien de onze heures, a mis en évidence la nécessité d'instaurer un véritable statut du volontaire de l'animation hors du champ d'application du code du travail. Il s'agit de la seule solution viable permettant de répondre aux exigences spécifiques de l'encadrement des mineurs, et notamment des centres de vacances.
Comme j'ai cru comprendre que nous sommes nombreux ici à avoir encadré des centres de vacances, nous savons bien que l'engagement dans l'encadrement des jeunes relève plus du volontariat, du militantisme que d'un contrat de travail trop strict. En effet, lorsque nous sommes dans un centre de vacances, il est difficile de s'arrêter onze heures par jour pour se reposer.
Faire appliquer ce repos obligatoire de façon généralisée à l'ensemble des structures sans prendre en considération la singularité du volontariat de l'animation et sans clarifier le contrat d'engagement éducatif, aurait de graves conséquences pour la survie de ces structures. Cela impliquerait automatiquement une hausse sensible des effectifs et des personnels d'encadrement, qui se traduirait par des difficultés très importantes et une hausse des tarifs des séjours que ces structures auront du mal à assumer sans moyens supplémentaires, aboutissant à l'annulation de nombreux séjours en 2012 et menaçant jusqu'à la survie de certaines structures. De plus, très peu d'enfants pourraient bénéficier de ces séjours en centres de vacances. Or ils participent véritablement à la construction des jeunes dans plusieurs domaines, comme la découverte de la vie collective, d'activités. C'est une formation pour devenir un adulte responsable.
Cela démontre bien qu'il est impossible d'apporter une réponse sérieuse à cette problématique par le simple biais d'un amendement. Elle nécessite, en effet, une véritable concertation avec l'ensemble des représentants du secteur pour sécuriser durablement l'organisation des séjours collectifs.
Depuis quelques jours, j'ai eu l'occasion, avec mes collègues du groupe socialiste, de recevoir différents organisateurs afin de réfléchir à l'amélioration de l'encadrement de ces séjours collectifs. Nous voyons bien que nous avons besoin de quelques semaines pour parvenir à un projet abouti. Nous avons déposé des amendements qui permettraient d'améliorer la situation. S'ils sont adoptés, nous aurons fait un grand pas. En tout cas, il me semble prématuré d'adopter le texte que vous nous proposez en l'état.
Je doute fort que le sparadrap législatif que vous nous proposez soit plus efficace que les sparadraps réglementaires évoqués par le rapporteur en commission.
On ne légifère pas pour répondre momentanément ou partiellement à un problème de cette nature. M. le ministre de l'éducation nationale a reconnu lui-même que cette problématique devait être réglée dans la durée. Il n'est pas question de différer à nouveau ce travail.
Nous regrettons d'ailleurs que le Gouvernement n'ait pas saisi cette occasion pour présenter un projet de loi complet qui aborde l'ensemble de ces questions et qui réunisse tous les ministères et les acteurs concernés, même si nous saluons le travail effectué par M. le rapporteur Christian Kert.