Le mythe du « plus vieux métier du monde » a décidément la vie dure. La réalité de la prostitution n'est pourtant pas celle d'un choix professionnel librement consenti ; la réalité, ce sont les violences sur les personnes prostituées, c'est le proxénétisme, c'est la traite d'êtres humains à travers des réseaux mafieux, c'est enfin la marchandisation du corps.
Vous l'avez dit et répété : 85 % des personnes prostituées en France sont des femmes et 90 % d'entre elles sont étrangères, en grande majorité en situation irrégulière, donc en situation de grande fragilité et de dépendance. C'est bien là, malheureusement, le signe du rôle prédominant que jouent les réseaux de traite sur le système prostitutionnel actuel.
La proposition soumise au vote de notre assemblée, aujourd'hui, est le résultat d'un consensus traversant nos différents courants politiques. La France se doit d'être à la fois un moteur et un modèle en matière de lutte contre toute forme de prostitution.
Cette proposition de résolution poursuit trois objectifs très clairs : montrer que la prostitution est incompatible avec les idéaux d'émancipation de la République, battre en brèche les clichés qui lui sont associés et réaffirmer que la lutte contre la prostitution ainsi que la protection des personnes prostituées sont une priorité. La République ne peut tolérer la perpétuation de l'idée selon laquelle la sexualité serait un droit devant être satisfait à n'importe quel prix. Tout acte sexuel non désiré constitue une violence pour la personne qui la subit et porte atteinte au principe fondamental qu'est le respect de la dignité humaine. Comme le montre le rapport d'information sur la prostitution en France, la majorité des personnes qui se prostituent ne le font pas au nom d'un libre choix. Comment prétendre cela lorsqu'on constate la prostitution de mineures ou d'étudiantes ?
Il est tout aussi essentiel de garantir les droits fondamentaux des personnes prostituées et de lutter ardemment contre le proxénétisme et la traite des êtres humains. Nous ne pouvons que nous féliciter que la majorité accepte de les regarder comme des victimes. La création du délit de racolage passif, la lutte contre la visibilité de la prostitution n'ont pas simplement culpabilisé les prostituées ; on a en réalité aggravé le danger qui pèse sur ces personnes en les rejetant dans l'ombre. Nous avons raté l'occasion, avec la loi du 9 juillet 2010, de protéger les victimes de traite au même titre que celles de mariage forcé. Cette résolution marque donc une évolution dont nous nous félicitons et que nous ne pouvons que vous encourager à poursuivre. Il s'agit de mettre en place une politique volontariste et ambitieuse visant, bien sûr, à changer les mentalités et à bousculer les idées reçues sur la prostitution et les personnes contraintes de la pratiquer. Un des objectifs de cette résolution porte justement sur l'effort à consacrer à l'information, la prévention, l'éducation et la responsabilisation des clients, mais également de toute la société. La volonté politique est au coeur d'une possible évolution.
Parce que le groupe socialiste, radical et citoyen et divers gauche est profondément attaché aux principes qui fondent notre République, à savoir l'égalité entre les hommes et les femmes, le respect de la dignité humaine et la lutte contre toutes formes de violences, notamment les violences de genre, il votera bien évidemment cette proposition de résolution. (Applaudissements sur tous les bancs.)