Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'examen de cette proposition de résolution, signée par l'ensemble des responsables des groupes politiques et qui, à cet égard, fait l'objet d'un relatif consensus, nous permet de débattre de ce sujet important de notre société qui concernerait plusieurs milliers de personnes, dans un climat apaisé et loin de tout clivage partisan.
Ces conditions sont nécessaires à la mise en oeuvre de politiques publiques adaptées aux réalités de la prostitution et conformes aux principes républicains de notre pays.
Il convient en effet, plus de cinquante ans après la ratification de la Convention internationale des Nations unies pour la répression de la traite des êtres humains et de l'exploitation de la prostitution d'autrui, de réaffirmer et de définir avec précision la politique que la France entend poursuivre en matière de prostitution.
En premier lieu, la proposition de résolution qui nous est présentée entend mettre un terme aux idées fausses, comme l'idée selon laquelle la prostitution permettrait de faire reculer le nombre de viols.
En ce sens, faire prendre conscience à nos concitoyens de la réalité de la prostitution, c'est avant tout démontrer que la prostitution constitue bien une forme de violence, tant physique que psychologique, subie par les personnes prostituées.
C'est également souligner l'emprise croissante des réseaux de traite sur la prostitution. En témoigne le nombre croissant de femmes prostituées de nationalité étrangère, venant essentiellement de Roumanie, de Bulgarie, du Nigeria et de Chine, qui envahissent les trottoirs de nos villes.
Cette réalité n'est pas acceptable dans un pays comme le nôtre, au regard des principes qui fondent notre société, à savoir la non patrimonialité et l'intégrité du corps humain, l'égalité entre les sexes et la lutte contre les violences de genre.
Selon le principe de la non patrimonialité du corps humain, inscrit dans notre code civil, aucun droit de propriété ne peut être reconnu sur le corps humain, ses éléments et ses produits. Indéniablement, la prostitution ne peut être assimilée à une activité professionnelle semblable à toutes les autres.
La France a fait le choix d'abolir toute forme de réglementation de la prostitution, dans le but de ne pas encourager celle-ci par une quelconque reconnaissance juridique, et avec l'objectif, à terme, d'une société sans prostitution.
À la différence des Pays-Bas, qui considèrent la prostitution comme un fait social et ont donc choisi de la réglementer, la France refuse de l'accepter comme une fatalité, comme un phénomène inhérent à toute vie sociale, mais la tient pour une contrainte, puisque, le plus souvent, on l'exerce pour des raisons de nécessité économique.
Du proxénétisme de soutien au proxénétisme de contrainte, l'incrimination de proxénétisme dans notre droit couvre un champ particulièrement large, certains cas de proxénétisme aggravé recevant même une qualification criminelle. Cependant, si les dispositions relatives à la lutte contre le proxénétisme présentent des résultats plutôt satisfaisants, le bilan est nettement plus nuancé en ce qui concerne l'utilisation de l'infraction relative à la traite des êtres humains. En effet, l'examen de cette proposition de résolution est aussi l'occasion de constater qu'il nous reste à accomplir de nombreux progrès, tant dans le domaine de la lutte contre les réseaux de prostitution que dans la mise en oeuvre des dispositions tendant à protéger les victimes de la traite.
Si la réaffirmation de la position de la France fait l'objet d'un relatif consensus, les moyens à employer pour parvenir, à terme, à une société sans prostitution sont davantage problématiques.
La question de la pénalisation des clients – dont nous débattrons prochainement, à l'occasion de l'examen d'une proposition de loi tendant à responsabiliser les clients, qui s'exposeraient à une peine de six mois de prison et 3 000 euros d'amende – constitue, en la matière, l'un des sujets les plus polémiques. Selon l'une des personnes auditionnées dans le cadre de la mission d'information, « le client est la personne qui contribue le plus à la traite ». Sans clients, la prostitution et la traite des êtres humains qui en résulte n'existeraient pas. Partant de ce principe, on constate, en Europe, un mouvement de fond en direction de la pénalisation des clients, qui pourrait tendre, comme le démontrent les expériences de nos voisins, à la diminution globale de la prostitution.
Enfin, si l'abolitionnisme implique de lutter contre l'exploitation sexuelle et en faveur du maintien de l'ordre public, il est indispensable que ces actions puissent s'accompagner de la mise en place de moyens de protection et d'accompagnement social des personnes prostituées. Ces dernières, notamment celles en situation irrégulière, n'ont que difficilement accès aux soins et aux prestations sociales, et les dispositifs qui leur sont destinés se révèlent insuffisants. Pour ces personnes, l'accès aux soins et aux droits doit donc être renforcé. À ce titre, il est indispensable de développer le versant social de la politique abolitionniste de la France.
Parce qu'il considère la prostitution comme une forme de violence, incompatible avec les principes les plus fondamentaux de notre République, le groupe Nouveau Centre accueille favorablement cette proposition de résolution.
Le 07/12/2011 à 23:21, Th. Thomas (Informaticien) a dit :
Je me permets de vous renvoyer à un article de Romain Blachier, qui explique mieux que je ne saurais le faire pourquoi ce projet est criminel : http://www.romainblachier.fr/2011/12/la-loi-visant-%C3%A0-interdire-compl%C3%A9tement-la-prostitution-est-une-illusion-criminelle-autant-interdire-la-faim-sans-y-mettre.html
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