Mesdames et messieurs les députés, nous entendons vos inquiétudes à propos du financement des collectivités locales. Nous nous soucions aussi du financement des sociétés d'économie mixte.
La complexité de l'organisation globale du financement des collectivités locales est le fruit de l'Histoire. Non seulement, nous devons utiliser des structures – Dexia et DexMA – qui existent depuis une quarantaine d'années, mais, de plus, des milliards d'euros d'encours – on parle de 150 milliards – sont concernés. La situation n'est pas du tout la même que lorsque la Banque postale crée un nouveau métier : pour le financement du crédit à la consommation, par exemple, elle a créé une filiale avec un partenaire.
Nous faisons appel aux marchés financiers et nous avons recours à DexMA pour deux raisons. D'abord, un banquier qui finance les collectivités locales à travers DexMA ne consomme pas de capital au sens de Bâle III. En effet, les crédits sont alors inscrits non à son bilan – auquel cas il consommerait du capital – mais dans un autre véhicule, qui est DexMA, la société de crédit foncier. Ensuite, lorsque des collectivités locales demandent des liquidités à vingt ou trente ans demandées, elles ne peuvent guère être trouvées que sur les marchés financiers.
Il reste que la difficulté, pour nous, à sortir d'un modèle hérité du passé va bel et bien compliquer l'organisation du financement des collectivités locales.
Nous avons l'intention de nous développer de façon progressive sur les produits destinés aux PME. Après avoir commencé par le crédit-bail, nous irons sur les marchés du crédit-bail immobilier, puis de l'affacturage. Ce n'est que plus tard, vers 2013, que nous proposerons des crédits secs : cette activité est en effet plus risquée.
Nous ne nous développerons aussi que progressivement sur les encours : ce métier est le plus risqué de tous ! Nous espérons aller plus vite en matière de crédit aux collectivités locales : cette activité est moins risquée et les enveloppes de crédits peuvent être déboursées beaucoup plus vite.
Nous avons donc bien l'intention de financer les petites entreprises, les associations et les bailleurs sociaux.
Cette année, la Banque postale a collecté 1,8 milliards d'euros sur le Livret A, à comparer à une collecte globale supérieure à 20 milliards d'euros. Notre encours sur ce produit est aujourd'hui de 55 milliards d'euros, sur un encours global de 206 milliards d'euros. Nous restons le deuxième intervenant dans ce domaine, après les Caisses d'épargne, et nous continuons de développer ce produit.
En 2008, la Banque postale avait déployé 5 200 DAB sur le territoire. À la fin de cette année, ce nombre sera de 6 300. Autrement dit, nous avons installé en trois ans plus de 1 000 DAB supplémentaires.
Les 32 DAB spécifiquement ruraux commandés à la suite du CIADT de mai 2010 ont été implantés. L'évolution des critères d'implantation faisant l'objet d'un intérêt particulier des commissions départementales, nous y travaillons. Il reste que, pour ne pas coûter d'argent, un DAB doit générer 5 000 retraits par mois. Un DAB n'est rentable qu'au-delà de ce chiffre. Or les 32 DAB que nous avons installés à la suite de la décision du CIADT sont tous sources de pertes. Notre enthousiasme pour en déployer beaucoup d'autres qui présenteraient les mêmes caractéristiques est donc mesuré : nous souhaitons équilibrer les comptes de la Banque postale ! Pour autant, nous prêtons une attention particulière aux demandes des élus dans ce domaine.
Nous avons mis en place à la fin de l'an dernier un nouveau mécanisme de rémunération de nos forces commerciales, dénommé RVB – rémunération variable bancaire. La rémunération de nos milliers de conseillers comporte une part fixe et une part variable : il y a bien sûr un intérêt à ce que l'ensemble de l'activité d'un bureau se développe ! En revanche, nos conseillers ne reçoivent pas de rémunération directe sur la vente d'un produit donné. La part variable est une rémunération collective. Elle tient compte des résultats collectifs du bureau et jamais de ceux d'un seul conseiller. Il est logique que la force commerciale d'un bureau de poste qui obtient de bons résultats reçoive une rémunération supérieure à celle d'une équipe moins performante. Mais la RVB est donnée par le manager sans commissionnement direct. La RVB ne s'étiole pas : même si elle peut varier selon les régions et les objectifs fixés – que certains auront atteints et d'autres non –, son montant reste du même ordre que celui de l'année 2010.
Enfin, les décisions de crédit sont prises pour l'essentiel non dans les bureaux de poste mais dans les centres financiers. Cette organisation supprime le risque de pression immédiate. Cette mesure correspondait à une mise en conformité destinée à permettre à la Banque postale, la plus jeune des banques, de mener des opérations de crédit. Avec le directeur de l'enseigne, M. Jacques Rapoport, nous expérimentons un dispositif où les décisions seraient prises par le chef d'établissement.
Nous sommes plutôt favorables au fichier positif.
Nous essayons de développer rapidement notre part de marché en matière de crédit à la consommation. Cette année, notre production s'est montée à 1,7 milliards d'euros. Certes ce chiffre est beaucoup plus faible que celui du crédit immobilier, qui est de 10 milliards d'euros. Mais il faut garder à l'esprit que, avant que le Parlement ne nous ait donné l'autorisation de mener des opérations de crédit immobilier sans épargne préalable, cette production était déjà de 4 ou 5 milliards d'euros par an. En matière de crédit à la consommation, nous sommes partis de zéro le 1er janvier 2010. Autrement dit notre croissance dans cette activité est extrêmement rapide. Nous pensons atteindre les 5 ou 6 milliards d'euros d'ici 5 ou 6 ans. Nous travaillons donc bel et bien à développer cette activité.
Monsieur le président Poignant, c'est en effet dans le cadre d'un partenariat avec la Société générale que nous développons notre activité de crédit à la consommation. Si j'adhère tout à fait au modèle partenarial et que j'ai l'intention de continuer à l'utiliser, c'est qu'il constitue la seule manière de gagner du temps. Ainsi, s'il nous était demandé de lancer notre activité de prêts aux collectivités locales à partir de rien, nous ne pourrions pas promettre d'être prêts au cours du premier semestre 2012 ; il ne serait pas possible de mettre en place cette activité avant 2014. C'est bien parce que nous allons avoir recours aux systèmes, à l'expérience et au personnel d'un partenaire – Dexia, partenaire certes un peu particulier – que nous serons prêts aussi vite.
Notre partenaire Groupama connaît en effet des temps un peu difficiles. Mais la force d'un partenariat suppose que les partenaires se soutiennent même par gros temps. Nous restons très satisfaits du service de très grande qualité que nous rend Groupama.
Nous sommes, je crois, la seule banque qui travaille avec les trois grandes associations – Croix-Rouge, UNCCASS et Secours catholique – qui ont lancé le manifeste pour les clientèles fragiles. Lors de leur conférence de presse du 7 décembre prochain, ces associations auront, je crois, l'occasion de souligner notre rôle.
Notre plan stratégique n'oublie pas les actions à l'attention de la clientèle fragile. Ainsi, nous développons des produits qui ouvrent à cette clientèle l'accès à l'ensemble des services bancaires, ce qui correspond à la mission que la collectivité nationale nous a assignée. Outre les trois associations que j'ai citées, nous travaillons avec le Secours populaire, ATD Quart Monde, l'Adie et Emmaüs. Nous sommes la seule banque aussi présente auprès des associations.
Nous souhaitons aussi développer notre activité de gestion patrimoniale. J'associe souvent notre action au profit des clientèles fragiles à notre action en faveur de celles qui sont plus favorisées, et surtout celles dont le patrimoine est important : une banque qui se développe et est rentable doit pouvoir travailler avec ces deux types de clientèles. Le produit net bancaire très élevé et fortement rentable généré par chaque client patrimonial doit nous permettre de financer ce que nous faisons en matière service public. Nous lancerons donc de nouvelles initiatives en matière de gestion patrimoniale au cours de l'année 2012.
Comme l'a dit Jean-Paul Bailly, dès lors que le produit n'est pas interdit, nous souhaitons être présents sur le marché du crédit renouvelable. Nous travaillons à proposer un crédit renouvelable conforme à nos exigences éthiques et de service public. Nous espérons que la solution à laquelle nous aboutirons vous plaira.
Notre modèle est très simple : la Banque postale n'est pas à la fois une banque d'affaires et une banque de dépôts. C'est une très grande banque de dépôts au service de toutes les catégories de la population. Notre métier, c'est la banque de détail. Ainsi, au cours de discussions avec Dexia, nous avons dit à son patron, Pierre Mariani, que nous n'étions pas intéressés par le financement de projets : il s'agit en effet d'une activité de financement et d'investissement et non de banque de détail.
Pour autant, nous ne sommes pas favorables à ce que, dans le système continental européen, celui de la zone euro, il y ait une séparation entre l'activité de banque de détail et celle de financement et d'investissement. Ces deux activités doivent se nourrir ; dans le mécanisme continental, la présence des deux activités au sein d'une même banque est positive.
Pourquoi nos revenus et notre produit net bancaire sont-ils inférieurs à ceux d'autres banques ? La première raison est sociologique : la clientèle de masse qui est la nôtre – et qui fait notre fierté et notre raison d'être – procure moins de revenus par client que la clientèle de la Société générale ou de la BNP-Paribas, par exemple. La deuxième, qui peut expliquer notre volonté d'accélérer notre développement commercial, c'est que nos clients sont moins bien « équipés » que d'autres : nombre d'entre eux ne trouvant pas auprès de la Banque postale ce dont ils avaient besoin en matière de crédit immobilier, d'assurance IARD ou de crédit à la consommation sont allés s'adresser ailleurs. Nous pensons donc que l'essentiel de notre croissance proviendra de l'équipement de l'ensemble de nos clients.
Pour vous rassurer, je tiens à vous indiquer que, matière de financement des collectivités locales, nous nous interdisons les prises de positions spéculatives. Investir dans un produit à effet de levier est une prise de spéculation ; nous nous l'interdisons. En revanche, nous proposerons bel et bien des crédits particulièrement souples. Du reste, nous sommes prêts à élargir cette offre aux services publics locaux : si le financement des collectivités locales est réglé, il reste à assurer celui des sociétés d'économie mixte, des hôpitaux publics et des offices d'HLM. Nous songeons à une solution liée au livret A, pour laquelle nous négocions aujourd'hui avec l'État.
Enfin, en matière de dette souveraine, nous avons bien une ligne directrice. Par exemple, nous sommes exposés à hauteur de 3 milliards d'euros sur l'Italie. Or si nous vendions cette créance aujourd'hui, nous perdrions 600 millions sur ces 3 milliards. Donc, nous ne prendrons pas cette décision. Pour nous, l'ensemble des pays d'Europe, même s'ils voient leur notation dégradée, seront capables de pays leur dette – sachant que la dette grecque, dont 60 % vient d'être passée par pertes et profits, constitue un cas à part. Quand l'Argentine a fait faillite en 2001, elle a tout de même réussi à rembourser 28 % de sa dette. Passer 100 % de la dette souveraine en provisions n'a pas de sens. Nous préférons rester sereins.
De plus, au fur et à mesure où nous accroîtrons l'encours de nos prêts aux entreprises, aux collectivités locales et aux particuliers, la part des liquidités investie dans les dettes souveraines diminuera.