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Intervention de François de Rugy

Réunion du 1er décembre 2011 à 15h00
Transparence de la vie publique et prévention des conflits d'intérêts — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois de Rugy, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

En ce qui concerne l'Autorité de la déontologie, vous avez indiqué qu'il ne convenait pas de créer un organisme supplémentaire. Or, comme je l'ai indiqué en commission – il n'y a pire sourd que celui qui ne veut entendre –, il s'agit de fondre deux, voire trois commissions existantes en une seule. C'est donc tout à fait conforme au souci de rationaliser le nombre de nos autorités administratives indépendantes.

Enfin, alors que vous exigez un consensus, car, dites-vous, les grandes lois auraient toujours été votées dans le consensus, notre collègue Bernard Roman a rappelé que cela n'a pas toujours été le cas dans le domaine du financement de la vie politique. Même les grandes lois de société n'ont pas toujours été votées dans le consensus, tant s'en faut, et c'est souvent bien des années après que le consensus se crée. Cela se passe ainsi dans notre République.

Je remercie Bernard Roman pour son soutien à la plupart des dispositions que nous proposons. Pour répondre à d'autres collègues et au ministre, je reprendrai son argument : nous revenons en effet à la charge. Le groupe socialiste avait déjà déposé des propositions de loi, que nous avons reprises car nous considérions qu'elles étaient bonnes. Je vous en rends la paternité, mes chers collègues.

Je précise néanmoins, s'agissant du plafonnement des dons, que nous avons intégré l'idée que les cotisations d'élus devaient avoir un plafond spécifique, que nous avons fixé à 20 % du montant global des indemnités.

J'indique également que, pour notre part, nous ne souscrivons pas à l'idée que des élus puissent reverser à leur parti – c'est une pratique qui existe, nous le savons – l'intégralité de leurs indemnités, car nous considérons que c'est un détournement de la loi. En effet, les indemnités sont versées pour l'exercice d'un mandat et non pour le financement d'un parti. Qu'elles y contribuent accessoirement, comme d'autres cotisations, c'est légitime, mais il ne faut pas que ce soit à titre principal.

Je souscris, cher collègue, à votre propos sur la transparence des indemnités. S'il est aujourd'hui possible de trouver les informations, c'est au prix d'un véritable chemin de croix ! Pour un citoyen, et même pour un journaliste payé pour cela, trouver le montant des indemnités dans les collectivités locales, par exemple, relève du parcours du combattant. Si la loi fixe pour ces indemnités des maxima, les assemblées locales votent à chaque début de mandat leur niveau, qui peut être très inférieur au maximum autorisé. Il n'y a aucune raison de le cacher à nos concitoyens, bien au contraire. J'ai moi-même été adjoint au maire d'une grande ville. Alors que notre indemnité était de 40 % du montant maximum affiché par la loi, les gens étaient persuadés que nous percevions la totalité de ce montant.

M. Roman a donc tout à fait raison de rappeler qu'en la matière les collectivités locales ne font malheureusement pas oeuvre, du fait de l'organisation législative, de transparence.

Enfin, il a posé, d'autres collègues aussi, un débat de principe sur la transparence. Lorsque nous avons procédé aux auditions, il nous a bien été indiqué qu'il y a deux écoles en la matière. La première considère que la transparence doit être totale pour les citoyens car ce sont eux, en dernier ressort, les seuls juges. Je l'ai dit en commission : ceux qui craignent le gouvernement des juges devraient soutenir cette position, consistant à dire que le citoyen doit être éclairé lorsqu'il vote, mais que c'est lui qui décide en dernier ressort. Une autre école estime en revanche qu'il vaut mieux s'en remettre à des commissions qui ont des moyens de contrôle – encore faut-il qu'elles les aient – et des moyens de sanction. C'est un peu la logique du confessionnal, dirai-je pour rappeler une tradition chère à notre pays ou en tout cas à un certain nombre de ses citoyens. Il n'y a alors évidemment pas de transparence à l'égard du citoyen, puisque c'est une commission qui se charge de la question.

Je préfère, chacun l'a bien compris, la première école, mais je ne suis pas contre la seconde et l'on peut trouver des compromis par voie d'amendement. En tout cas, je suis tout à fait ouvert sur le sujet, de même que sur la composition de l'Autorité de la déontologie de la vie publique. J'en viens ainsi à vous, monsieur Lionel Tardy, puisque vous avez déposé un amendement à ce sujet qui pourrait faire l'objet d'un avis tout à fait favorable.

Je note avec beaucoup d'intérêt, monsieur Tardy, que vous avez soutenu notre démarche, rappelant que vous avez été en désaccord avec le vote de votre groupe quand celui-ci a refusé de pénaliser fortement les fausses déclarations. Mais je ne partage pas l'idée selon laquelle le sujet ne serait pas mûr. Je constate en effet qu'il y a eu d'autres propositions de loi, qu'on en a souvent parlé, et que, lorsque nous ferons le bilan des cinq ans de notre législature, il apparaîtra sans doute qu'aucune mesure législative n'a été prise, sinon à la marge. Par conséquent, dire qu'un tel texte arrive trop tard est un argument que je n'aime guère, et d'autant moins que le groupe auquel j'appartiens ne choisit pas la date à laquelle il peut inscrire une proposition de loi. La dernière fois, c'était il y a un an, et l'avant-dernière fois, il y a deux ans ! Notre texte est inscrit maintenant, et je ne crois pas qu'il soit trop tard. Je ne vois pas pourquoi nous serions maintenant moins légitimes aujourd'hui pour voter, en cette matière comme en d'autres. Si la légitimité du Parlement est trop faible en fin de mandat, que dire des mesures fiscales prises en flux continu depuis plusieurs mois ?

Je finirai sur votre intervention, monsieur Jean-Michel Clément. Je l'ai appréciée, elle était tout à fait mesurée. Je suis d'accord avec vous sur le fait que la notion de conflit d'intérêts est difficile à définir. Mais si l'on s'en tient principalement aux questions économiques et financières, au mélange des genres entre des intérêts privés et l'intérêt public, je constate que nous avons tout de même bien cerné la question.

Par ailleurs, s'agissant du « tribunal de l'opinion », selon votre expression, je crois que cela pose un problème quand on est dans la logique des révélations. À cet égard, la transparence serait une forme de dissuasion et de tranquillisation puisque les choses seraient connues et dites. Il ne serait plus question d'aller chercher des révélations sur telle ou telle personne pour la mettre en difficulté ou tout simplement par curiosité.

C'est pourquoi, mes chers collègues, monsieur le ministre, je pense qu'il est possible de prolonger la discussion et d'examiner les amendements afin de mieux cerner le sujet. Faisons-le maintenant sur les articles.

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