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Intervention de Vuk Jeremić

Réunion du 15 novembre 2011 à 17h30
Commission des affaires étrangères

Vuk Jeremić, ministre des affaires étrangères de la République de Serbie :

La question des frontières est très importante et délicate. La constitution de la Serbie définit de façon claire le Kosovo comme partie intégrante de notre pays. La résolution 1244 du Conseil de sécurité de l'ONU, qui a mis fin à la guerre au Kosovo en 1999, confirme également clairement la souveraineté territoriale de la Serbie sur ce territoire. Donc juridiquement le Kosovo fait partie de la Serbie, qui bénéficie d'un régime spécial octroyé par cette résolution.

Le gouvernement du Kosovo a déclaré de façon unilatérale l'indépendance de ce territoire le 17 février 2008 : nous avons alors marqué notre opposition à cette démarche, qui n'a d'ailleurs pas eu le soutien du Conseil de sécurité.

Nous estimons qu'aucun territoire au monde ne peut décider unilatéralement de son indépendance, sans le soutien de cette instance. Si on le permettait, de nombreux pays pourraient être démantelés. Des États comme l'Espagne ou l'Argentine refusent de reconnaître l'indépendance du Kosovo, car cela pourrait constituer un danger pour eux. Comment la Serbie, qui pourrait être confrontée à d'autres revendications territoriales, pourrait-elle dès lors accepter de le faire ?

Reconnaître l'indépendance du Kosovo conduirait à encourager d'autres pays ou territoires à modifier leurs frontières. Si l'Espagne, membre de l'Union européenne et de l'OTAN, qui est un pays stable politiquement, s'y refuse, il serait irresponsable de notre part de le faire ! Non seulement nous nous opposerions à 90 % de la population serbe de ce territoire, mais nous pourrions créer des problèmes supplémentaires !

Cela ne nous empêche pas d'essayer de résoudre nos différends de façon diplomatique, d'avoir des relations économiques, d'organiser le transport des personnes et des biens et de faire en sorte que chacun se sente en sécurité au Kosovo. Mais nous attendons que Pristina fasse aussi de même et commence à mettre en oeuvre des normes standard de sécurité de même niveau que celles appliquées par la Serbie.

Nous avons déjà beaucoup fait pour la sécurité sur ce territoire et arrêté 46 criminels de guerre – encore récemment les deux plus importants en Serbie. Si vous voyagez dans la région, vous verrez que vous ne vous sentirez pas du tout dans les mêmes conditions de sécurité au Kosovo qu'en Serbie.

Monsieur Roubaud, les relations économiques entre nos deux pays pourraient en effet être meilleures. Mais nous allons bientôt signer un accord sur la construction d'un métro à Belgrade en coopération avec la France : il s'agit d'un projet important, qui devrait durer dix ans. Naturellement, nous n'allons pas nous arrêter là : je suis prêt à faire tout ce qui est possible pour améliorer ces relations et je vous serais reconnaissant de l'aide que vous pourriez nous apporter à cet effet. Nous avons encore beaucoup de choses à faire, notamment pour que les entreprises françaises s'investissent dans l'économie serbe.

Monsieur Loncle, nous n'avons pas assisté à une inertie du Conseil de sécurité, mais au fait que celui-ci ne souhaite pas être impliqué : cela est grave. À l'ONU, certains pays ont reconnu l'indépendance du Kosovo et ne souhaitent pas que certaines vérités éclatent…

Pour notre part, nous n'avons rien à cacher : nous avons déjà eu l'occasion d'extrader à La Haye d'anciens dirigeants ou généraux de l'armée serbe. Nous pensons que tous les criminels de guerre doivent être traités de la même manière, quelles qu'aient été leurs fonctions passées.

Nous avons payé un prix politique élevé pour cela : le Kosovo devrait faire de même.

Or une personnalité importante de l'Union européenne et du Conseil de l'Europe m'a dit publiquement qu'un vote en faveur d'une enquête serait considéré comme un acte inamical…

Je vous remercie pour ces échanges, qui doivent se poursuivre. Nous comptons, encore une fois, sur votre soutien et votre compréhension. J'espère que la Serbie fera un pas en avant vers l'Europe au mois de décembre. Si ce n'était pas le cas, ce ne serait pas la fin du monde, mais cela nous coûterait beaucoup d'un point de vue politique. Je vous demande donc de l'éviter, comme j'ai eu l'occasion de le dire à votre ministre des affaires étrangères.

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