Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Henri Nayrou

Réunion du 29 novembre 2011 à 21h30
Projet de loi de finances rectificative pour 2011 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHenri Nayrou :

Ce sera donc, en quelque sorte, un propos à deux voix.

Ce nouveau collectif budgétaire, le quatrième cette année, est censé s'inscrire dans le cadre de la nouvelle prévision gouvernementale de croissance de la France pour 2012, qui serait désormais fixée à 1 %. Il s'agit, en l'espèce, d'un ajustement a minima qui devrait logiquement nous amener, au regard de la conjoncture et des incohérences de la politique gouvernementale, à des ajustements autrement plus conséquent à très court terme. On le sait désormais : un projet de loi de finances rectificatif n'arrête pas d'en cacher d'autres.

Le retour à l'équilibre des comptes publics en 2016 paraît en effet toujours plus inatteignable ; votre marche supposée vers un déficit ramené à 3 % en 2013 va ressembler pour vous, quelle que soit la succession des sommets européens, à l'ascension de l'Everest en sandales d'été !

Dans la dernière révision des prévisions de croissance en date, l'OCDE, l'Organisation de coopération et de développement économiques, estime que celle-ci sera très faible en 2012, de l'ordre de 0,3 %, et limitée en 2013, soit 1,5 %. C'est peu dire d'affirmer que l'OCDE se montre moins optimiste que le Gouvernement, d'autant que le risque sur les conditions de refinancement de notre pays s'est accru. On constate en effet que le spread avec l'Allemagne s'est considérablement accentué. Comment réaliserez-vous l'ajustement correspondant ? Pour le moment, vous semblez vous réfugier dans un profond et coupable mutisme.

L'OCDE est on ne peut plus claire : l'activité économique s'est contractée en France au quatrième trimestre 2011, et notre pays va rentrer en récession alors que le marché du travail porte encore les stigmates de la crise de 2008-2009 avec une forte augmentation du chômage de longue durée et du chômage des seniors. Que propose le Gouvernement face à une telle situation ? La défiscalisation des heures supplémentaires… et derrière, le silence !

S'il est évident que la question de la soutenabilité de la dette publique ne peut être éludée, il faut aussi tenir compte de l'impact récessif sur l'activité des politiques d'austérité menées concomitamment par les différents pays européens. Aujourd'hui, tous les éléments sont réunis pour que les politiques de rigueur entraînent un ralentissement important de la croissance et que le déficit se résorbe peu, en particulier dans la zone euro.

Dans ce contexte, les mesures que comporte ce collectif budgétaire ne traduisent rien de moins que les insuffisances de la politique du Gouvernement qui semble ignorer que la capacité à rembourser une dette est appréciée autant au regard des équilibres des finances publiques que du potentiel de croissance de l'économie.

Or votre plan face à la crise ne prévoit aucune mesure de soutien à la croissance ; il ne comporte aucune mesure favorable à la compétitivité – Pierre-Alain Muet l'a souligné en défendant la motion de rejet préalable.

Il est incompréhensible que le Gouvernement s'échine à accentuer la récession en faisant des choix fiscaux contestables qui tuent dans l'oeuf toute perspective de reprise. Il est incompréhensible qu'il se prive de recettes d'un rendement supérieur en refusant, par exemple, de revenir sur l'ensemble des dispositions de la loi TEPA, qui coûtent encore 9,3 milliards d'euros par an, ou de s'attaquer aux différentes niches pointées par le rapport du comité d'évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales, émanant de l'inspection générale des finances.

Il est incompréhensible qu'il prenne le risque de casser l'un des principaux moteurs de la croissance en France : la consommation des ménages. À titre d'exemple, le relèvement de certains taux de TVA se répercutera directement sur le pouvoir d'achat du plus grand nombre. Le Gouvernement a dû se souvenir du sens de la dérision de Coluche qui disait qu'il fallait taper sur les plus pauvres parce qu'ils sont les plus nombreux…

Pour ce qui est du nouveau taux de TVA, Aurélie Filippetti vous aurait dit le Gouvernement doit revenir sur la hausse de la TVA, tout particulièrement dans le domaine du livre et de la culture car cette hausse pénalisera injustement notre réseau de librairies, chaînon vital du secteur culturel en France. En s'attaquant aux biens et aux services culturels en pleine crise, le Gouvernement prive encore davantage nos concitoyens de l'accès à la culture et il met en péril l'un des principaux atouts de la France.

Pour ma part, sur le même sujet, j'estime que le relèvement de la TVA sur les rénovations dans le secteur du bâtiment constitue une erreur funeste. Je vous renvoie à ce sujet à l'accélération de l'activité provoquée en 1998 par le passage au taux réduit.

Les ministres des finances de la zone euro étaient réunis aujourd'hui à Bruxelles. Ils avaient pour objectif d'avancer enfin sur la construction d'un pare-feu convaincant face à la crise de la dette, dans un climat de tensions sur l'avenir de la gouvernance de l'union monétaire. La course folle se poursuit sans que, pour le moment, des réponses concrètes et efficaces soient apportées. C'est un échec pour la France et pour l'Europe car ces évolutions sont aujourd'hui nécessaires. Il est urgent que les responsables politiques esquissent un scénario de sortie de crise crédible. Ce sera un des enjeux de l'épreuve élective et rectificative de 2012. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion