…et comme a tenté de le faire votre collègue de la majorité, fût-il centriste, M. Préel, en proposant une augmentation de 0,5 point de la CSG pour voter un budget en équilibre.
J'évoquerai pour commencer une des mesures phares de la loi TEPA : l'exonération des heures supplémentaires, qui coûtera, en 2012, 4,9 milliards d'euros, dont 3,5 milliards à la sécurité sociale.
Cette exonération était censée promouvoir l'emploi et augmenter le pouvoir d'achat. Pourtant, le Conseil des prélèvements obligatoires a indiqué dans son rapport son « effet ambigu », la mesure se substituant à l'embauche, notamment en période de hausse du chômage – et il explose malheureusement aujourd'hui – où elle devient particulièrement contre-productive.
D'autre part, le bénéfice, pour le salarié, augmente avec son niveau de revenu. L'inspection générale des finances a indiqué que ce dispositif multipliait les gains par trois pour les mêmes heures supplémentaires lorsque les revenus se situent dans les déciles supérieurs par rapport aux déciles inférieurs.
Il s'agit donc, j'y insiste, d'une mesure contre-productive en matière d'emploi, inégalitaire dans l'avantage de revenu qu'elle procure en faveur des salaires les plus élevés et offrant un effet d'aubaine aux entreprises puisque le nombre total des heures supplémentaires n'a pas significativement augmenté. Ce dispositif inefficace et coûteux doit donc être supprimé.
Madame la secrétaire d'État, la majorité a fait preuve d'un demi-courage en supprimant à moitié le bouclier fiscal pour l'an prochain. Nous l'appelons à faire preuve d'un vrai courage dans un plan qui va nous être proposé très certainement dans les mois ou les semaines qui viennent et à supprimer cette disposition, ce qui rapporterait 3,5 milliards d'euros de recettes non pas nouvelles mais, si je puis dire, de recettes non gaspillées pour la sécurité sociale.
Le deuxième grand thème abordé au cours de la discussion du présent projet de loi est la lutte contre les fraudes, thème repris dans le discours prononcé par le Président de la République le 15 novembre dernier à Bordeaux. Il a rappelé que 460 millions d'euros de fraude avaient été détectés en 2010 par les différents organismes de contrôle.
Je vous ferai observer que la Cour des comptes a évalué les fraudes aux prestations, imputables à l'usager, à 2 voire 3 milliards d'euros, tandis que les fraudes aux prélèvements, imputables, elles, à l'employeur, sont estimées à 8 voire 15 milliards d'euros, c'est-à-dire quatre à cinq fois plus.
La MECSS, dont l'un des coprésidents préside en ce moment la séance, a évalué à 10 milliards d'euros le coût pour les organismes de sécurité sociale du travail non déclaré, la responsabilité étant là aussi celle de l'employeur.
En matière de recouvrement, toujours selon le Président de la République, sur les 460 millions d'euros récupérés, 300 millions concernent les prestations mais seulement quelque 150 millions les prélèvements, à savoir les employeurs. Alors même que la prévalence des fraudes aux prélèvements est, j'y insiste, de quatre à cinq fois plus élevée que celle des fraudes aux prestations, le recouvrement a été moitié moindre pour les premières !
Le bilan 2010 de la lutte contre la fraude à la sécurité sociale, établi par la délégation nationale qui porte ce nom et qui dépend du ministère du budget, indique que, pour 156 millions d'euros de fraude détectés concernant l'assurance maladie, 80 % sont le fait des professionnels de santé. On peut néanmoins isoler les sommes imputables aux établissements de santé, la fraude à la tarification à l'acte, car il peut en l'occurrence s'agir d'erreurs de comptabilité ou d'interprétation. Il reste tout de même, sur ces 156 millions, 45 millions d'euros imputables aux professionnels indépendants !
L'essentiel des fraudes à l'assurance maladie dues à des professionnels met en jeu des sommes importantes. Lorsque certains pharmaciens, infirmiers ou transporteurs sanitaires facturent irrégulièrement des médicaments ou des services, ce sont chaque fois plusieurs centaines de milliers d'euros qui sont en cause, ce qui est très supérieur aux quelques centaines ou milliers d'euros récupérés comme indus sur certains prestataires, parfois victimes d'erreurs administratives, mais aussi, dans d'autres cas, responsables de dissimulation.
Les professionnels sont responsables de 40 % des fraudes à l'assurance maladie, soit 62 millions d'euros, dont 50 millions pour les seuls transporteurs. Mais, au lieu de ces gros fraudeurs, quels sont les professionnels les plus montrés du doigt, bien que les montants qui leur sont imputables apparaissent comme anecdotiques ? Eh bien, ce sont les médecins, pour 5 millions d'euros ; les dentistes, pour 3 millions ; les masseurs kinésithérapeutes, pour 2 millions. Les assurés sociaux, quant à eux, dans le cadre de la couverture médicale universelle complémentaire, fraudent à hauteur de 2,5 millions d'euros. La fraude à l'aide médicale d'État, concernant ces étrangers si souvent montrés du doigt, atteint moins de 3 millions d'euros. Enfin, la fraude aux indemnités journalières représente 5,4 millions d'euros.
Si l'on compare ces sommes aux 10 milliards d'euros que représente le travail au noir selon la MECSS, 10 milliards de la responsabilité des employeurs, on peut vraiment parler de broutilles.
Certes, voler la sécurité sociale, c'est voler l'ensemble des assurés, mais il y a les gros et les petits. Or vous persistez, madame la secrétaire d'État, et le Gouvernement avec vous, à désigner comme fraudeurs ceux qui se rendraient coupables d'arrêts maladie abusifs. J'entendais tout à l'heure le ministre de la santé répéter qu'un dispositif était à l'étude pour permettre le remboursement, par le patient qui en aurait profité, des indus d'indemnités journalières. Il s'agit là d'un terrain glissant. Le patient, s'il est reconnu avoir bénéficié d'un arrêt maladie abusif, n'en a pas été le prescripteur. Quand on prescrit, il y a possibilité de contrôle. Mais le contrôle médical est affaire difficile dès lors que l'un des piliers de la médecine libérale est la liberté de prescription. Comment le médecin contrôleur pourrait-il se prévaloir d'un avantage hiérarchique sur le médecin prescripteur et prétendre rendre un avis qui aboutirait au remboursement ? L'article 103 du code de déontologie médicale l'interdit. La jurisprudence a déjà exclu la responsabilité d'un patient qui respecte une prescription médicale. Voilà pourquoi, madame la ministre, j'invite le Gouvernement à la plus grande prudence avant de mettre en place ce dispositif qui conduirait à obtenir le remboursement de la part d'un patient de sommes considérées comme indues par un contrôleur médical.
Je vous inciterai également à la plus grande prudence et sans doute à effectuer une pause afin d'évaluer le dossier médical partagé. La mise en place de ce dernier, promise en 2004 pour 2007 – il s'agissait alors du dossier médical personnel – par l'un de vos prédécesseurs, M. Douste-Blazy, au sortir d'une clinique de Toulouse, visait à économiser 3,5 milliards d'euros. On connaît la suite : un GIP fut créé et tourna en rond entre 2004 et 2009 au prétexte de problèmes de gouvernance, mais au prix de dizaines de millions d'euros. Après cette longue hésitation, décision a été prise de constituer une nouvelle agence regroupant un certain nombre de missions, notamment celle visant à mettre en place un dossier médical partagé, l'ASIP, l'Agence des systèmes d'information partagés.
Vos choix se sont révélés lourds : passer par internet avec un hébergeur unique. Se posent dès lors des problèmes de confidentialité. Tous les jours, le piratage et la substitution d'identité fleurissent sur les systèmes les mieux protégés. Si les plus grands systèmes étatiques et industriels, y compris celui du Pentagone, sont pénétrés par des hackers – même le site du groupe UMP a récemment été pénétré –,…