Je le sais. Ce point est au coeur de notre problématique. Les familles d'otage deviennent souvent spécialistes de la région concernée. Nous avons pu le constater encore lors de l'enlèvement d'Hervé Ghesquière et de Stéphane Taponier. Dans un monde où il faut, non pas rechercher l'information, mais la sélectionner et en tirer les conséquences, l'action du Centre de crise prend tout son sens. Nous avons un rôle de transformateur. Nous l'exerçons pour les autorités de l'État et pour les familles. Mais, encore une fois, on ne peut pas tout savoir tout le temps et immédiatement.
Madame Aurillac, oui, j'ai été en poste en Égypte et je suis avec beaucoup d'attention la situation actuelle qui est effectivement très préoccupante. Du point de vue de la sécurité des personnes, il y a un an encore, ce pays était un exemple entre tous. Aujourd'hui, au-delà des manifestations, on constate une élévation du niveau général de l'insécurité. C'est problématique pour nos compatriotes installés là-bas, pour les touristes, pour l'économie égyptienne car la ressource touristique diminue, et pour nos entreprises qui réfléchissent à deux fois avant de s'engager dans un pays où il y a en outre un fort risque d'instabilité politique. Nous suivons la situation très étroitement.
S'agissant du Soudan, la problématique est essentiellement humanitaire. À une exception près, il n'y a plus d'ONG française dans cette région. En cas de difficulté, nous dépêcherons une aide humanitaire et nous débloquerons des crédits pour financer des opérations. Le Soudan fait partie des pays que nous qualifions à veille renforcée.
Monsieur Souchet, le fonds de concours rattaché au fonds d'urgence humanitaire fonctionne bien. Ce fonds est conçu comme un instrument de service public : il n'est pas question de lever des fonds qui pourraient aller à d'autres organisations comme les ONG ou la Fondation de France. Il s'agit d'avoir un instrument financier permettant de recueillir des contributions qui ne trouvent pas à être versées ailleurs. Le tremblement de terre en Haïti, il y a deux ans, a suscité beaucoup d'émotion. Nombre de communes ont souhaité faire des versements, 100, 150, 350 euros. Or il ne s'est trouvé personne pour accepter de prendre en compte ces dons dont le traitement représentait beaucoup de travail administratif. Ils étaient en outre assortis d'exigences de comptes rendus très importantes. Le fonds de concours a été activé et nous avons pris en charge ces milliers de contributions. Ces sommes, comme le veut la logique des fonds de concours, doivent être employées conformément à l'intention de ceux qui les ont versées. Ce n'est pas toujours simple. En l'espèce, le fonds a été géré par un comité où étaient représentés la Fondation de France, des ONG, divers représentants de l'administration et des associations de maires et d'élus territoriaux. Nous avons ainsi identifié cinq ou six projets qui ont bénéficié des fonds recueillis.
Le bilan est globalement positif pour nous. Il nous faut cependant résoudre une petite difficulté que la Cour des comptes a d'ailleurs signalée, sans nous l'imputer : techniquement, ce fonds de concours est destiné à l'urgence humanitaire or on nous demandait de soutenir des projets durables – en l'occurrence une école d'infirmières. J'ai dû expliquer pourquoi nous avions décidé de mener de telles actions. L'argent envoyé par les communes nous est parvenu sur une période de six mois : on était donc sorti de l'urgence absolue en Haïti et il fallait trouver un autre emploi aux fonds récoltés.
S'agissant du Japon, nous n'avons pas activé le fonds de concours, ce qui était peut-être une erreur. Nombre d'entreprises françaises ont en effet souhaité verser une aide aux Japonais : elles l'ont fait auprès de la Croix rouge japonaise mais, aujourd'hui, elles ne savent pas ce qu'elles ont financé. Le fonds de concours aurait pu servir en quelque sorte de salle d'attente et nous aurions pu financer plus tard des projets mieux identifiés. Il faudra tenir compte de cette leçon.