Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui a pour objet de retranscrire dans le droit français la législation européenne relative au système de propriété des variétés végétales. Celui-ci est régi actuellement dans notre pays par les certificats d'obtention végétale. Tout le monde s'accorde reconnaître les avantages spécifiques de ce système. À ce jour, 77 000 certificats ont été enregistrés et l'industrie semencière française se classe première au niveau européen et deuxième à l'échelle mondiale. Les COV garantissent une rémunération du travail de recherche tout en permettant l'utilisation libre et gratuite de toute variété protégée lorsqu'il s'agit de sélectionner une nouvelle variété.
À l'opposé, le système des brevets, en autorisant l'appropriation du vivant à des fins commerciales, a certes permis aux multinationales semencières, telle Monsanto, de se gaver de profits, mais il a en contrepartie mis le couteau sous la gorge de milliers d'agriculteurs. À ce sujet, monsieur le ministre, permettez-moi de vous interroger sur l'état d'avancement des négociations du traité ACTA – l'accord de commerce anti-contrefaçon –, qui n'a pas été évoqué jusqu'à présent. Celui-ci a vocation à régir la propriété intellectuelle en général, dont celle des semences végétales. Au vu du climat actuel, on peut craindre un renforcement du système des brevets et de la propriété du vivant que nous combattons avec force. Qu'en est-il exactement ?
J'en reviens au texte qui nous occupe. Si les COV font consensus, pourquoi alors la proposition de loi a-t-elle soulevé autant de critiques et de résistances dans le monde agricole ? Je pense notamment à l'appel lancé par dix-huit organisations aussi diverses que la Confédération paysanne, ATTAC, Les Amis de la Terre, les Chrétiens du monde rural et la Coordination nationale pour la défense des semences fermières. Cet après-midi, des agriculteurs ont manifesté devant l'Assemblée pour dénoncer ce qu'ils considèrent comme une attaque sans précédent contre les droits fondamentaux des paysans. Vous avez des références historiques, monsieur le ministre : vous comprendrez donc que je regrette le temps de la Convention nationale, quand les gens pouvaient venir eux-mêmes porter leur parole, que les députés étaient obligés d'écouter. Tandis qu'ici, nous sommes enfermés à double tour, ce qui vous permet, monsieur le ministre, mes chers collègues de la majorité, de débrancher vos sonotones pour vous mettre à l'abri de la protestation des paysans.