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Intervention de Catherine Quéré

Réunion du 22 novembre 2011 à 15h00
Délais de prescription prévus par la loi sur la liberté de la presse — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCatherine Quéré :

Monsieur le président, monsieur le ministre du travail, de l'emploi et de la santé, mes chers collègues, je voudrais tout d'abord insister sur l'esprit de la proposition de loi que j'ai eu l'honneur de défendre au nom du groupe socialiste.

Modeste dans son exposé des motifs et dans la simplicité des articles, elle n'a pour unique but que de réparer une anomalie dans la loi sur la liberté de la presse.

La discrimination introduite par la différenciation des délais de prescription en fonction des victimes rompt en effet le principe constitutionnel d'égalité devant la loi. Les victimes d'injures homophobes, sexistes ou handiphobes sont doublement victimes aujourd'hui.

Tous, sans exception, sur les bancs de l'Assemblée mais également du Gouvernement, en la personne de M. le garde des sceaux, nous avons reconnu que le législateur s'honorerait à voter l'alignement des délais de prescription. Certains ont voulu rappeler que nous devions également garantir la liberté d'expression et la liberté de la presse. Je pense que le débat a permis d'apaiser les craintes car il n'y a aucune incompatibilité entre notre souci de lutter contre les discriminations, enjeu démocratique fort, comme l'a rappelé M. le garde des sceaux, et notre volonté d'être les garants de la liberté de la presse. Mes chers collègues, il n'y a pas de délit d'opinion dans notre droit !

En revanche, nous devons nous prémunir des excès, sanctionner ce qui est de l'ordre non pas de l'opinion, mais bien des injures, des diffamations et des provocations à la discrimination, à la haine et à la violence. C'est bien cela qu'il s'agit de sanctionner et rien d'autre ! Comme l'a rappelé notre collègue Patrick Bloche, le chemin est long lorsqu'il s'agit de l'égalité des droits – et je le remercie d'avoir tant oeuvré sur ce chemin périlleux. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Si nous nous sommes entendus sur le coeur de cette proposition de loi, je regrette que le Gouvernement ait déposé un amendement de suppression de l'article 1er dont l'esprit est pourtant bien semblable à celui de l'article 2. L'alinéa 9 de l'article 24 de la loi de 1881 que nous entendons supprimer n'est pas moins préjudiciable à la liberté d'expression que l'alinéa 8 sur la rédaction duquel il s'aligne. Le groupe socialiste ne souscrit pas à l'argument selon lequel il élargirait le champ des discriminations punissables. Je ne vois pas ce qui justifie davantage la rédaction de cet alinéa 9, avec cette référence à l'article 225-2 et 432-7 du code pénal. Pourquoi circonscrire les provocations à la discrimination, à la haine et à la violence contre les personnes à raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou de leur handicap par ces deux articles ? Le même délit commis à l'encontre de personnes à raison de leur origine, de leur ethnie, de leur race ou de leur religion, n'est pas limité par la référence à ces deux articles au code pénal. Je regrette qu'on ne puisse aller au bout de la logique de cette proposition de loi. L'honneur et le devoir de la représentation nationale commandent de ne pas se rendre coupable d'une hiérarchisation des discriminations.

Le chemin est long, nous le savons. Notre société doit se prémunir plus que jamais contre l'homophobie, le sexisme et l'handiphobie. Je le répète, si l'esprit de cette proposition de loi est la modestie, il n'en reste pas moins qu'elle doit résonner symboliquement pour la reconnaissance de tous les individus quels que soient leur genre – je tiens à l'emploi de ce terme – et leur orientation sexuelle. C'est pour ces raisons que les amendements à l'article 1er qui introduisent la question de l'identité de genre et de l'état de santé s'inscrivent dans une démarche collective de réflexion et de reconnaissance du genre.

Mes chers collègues, le groupe socialiste votera évidemment cette proposition de loi qui répare une anomalie de la loi qui entraîne une hiérarchisation inadmissible des discriminations. Nous devons protéger toutes les victimes et empêcher tout sentiment d'impunité de ceux qui se rendent coupables d'injures sexistes, homophobes et handiphobes. Plus que tout, nous devons être les garants de l'égalité devant la loi, valeur essentielle de notre République. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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