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Intervention de Patrick Beaudouin

Réunion du 28 janvier 2009 à 15h00
Autorisation de prolongation de cinq interventions des forces armées à l'étranger — Débat et votes sur une déclaration du gouvernement

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Beaudouin :

Monsieur le président, messieurs les ministres, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, il me revient d'évoquer, au nom de mon groupe, la participation de la France à la FINUL, présente au Liban. Notre pays entretient avec le Liban un lien particulier, fondé sur une relation quasi millénaire, tant sur le plan politique qu'économique et, bien sûr, culturel, puisque la moitié de la population y est francophone.

C'est cette relation forte qui a naturellement conduit la France à prendre une part prépondérante au sein de la première Force intérimaire des Nations unies au Liban, la FINUL I, créée en 1978 pour restaurer l'intégrité territoriale du pays, mise à mal par le conflit israélo-palestinien. Dotée de moyens limités, tant sur le plan militaire que juridique, la première FINUL présente un bilan décevant. Tandis que la guerre civile se prolonge jusqu'en 1989, le Liban ne recouvre son intégrité territoriale qu'en 2000, avec le retrait des troupes israéliennes du Sud-Liban, malgré une tutelle syrienne encore pesante. L'attentat du Drakkar, le 23 octobre 1983, au cours duquel 58 parachutistes français trouvèrent la mort – la plus lourde perte de l'armée française depuis la fin de la guerre d'Algérie – est le symbole de cette impuissance.

C'est donc instruite par cette expérience que la France entend obtenir des garanties, lorsque, à l'été 2006, les circonstances nécessitent un renforcement de la FINUL. L'enlèvement de soldats israéliens par le Hezbollah conduit alors, en effet, à une intervention israélienne. Plusieurs semaines de conflit se soldent par des centaines de morts et de blessés, des dégâts matériels considérables, et d'importants déplacements de populations. La France joue à ce moment un rôle décisif dans l'élaboration de la résolution 1701 du Conseil de sécurité des Nations unies, qui appelle à la fin des combats et au retrait des forces israéliennes, prévoyant en contrepartie le déploiement d'une force armée libanaise au Sud-Liban, le désarmement des groupes armés et l'établissement, entre la Ligne bleue et le Litani, d'une zone exempte de tous personnels armés, à l'exception de l'armée libanaise et de la FINUL.

Pour veiller à l'application de ces dispositions, le Conseil de sécurité décide « en vue de compléter et renforcer les effectifs, le matériel, le mandat et le champ d'opérations de la FINUL, d'autoriser un accroissement des effectifs de celle-ci pour les porter à un maximum de 15 000 hommes ».

Cette FINUL II dispose, conformément au souhait de la France, de règles d'engagement solides et d'une chaîne de commandement efficace et réactive. En particulier, les troupes ont désormais le droit de recourir à la force, y compris en employant des moyens létaux, non seulement pour assurer leur protection, mais aussi pour faire respecter la résolution.

En plus de son engagement diplomatique, la France s'investit fortement sur le plan militaire : pour un coût de 79 millions d'euros en 2008, et avec 1 900 hommes sur un total de 12 700, la France est le deuxième pays contributeur. Elle a pris en charge l'un des secteurs les plus difficiles, et a déployé les moyens les plus visibles et les plus puissants. La FINUL incarne ainsi une nouvelle approche des opérations de maintien de la paix, fondée sur des moyens puissants et des règles d'engagement robustes.

Plus de deux ans après sa mise en place, le bilan de la FINUL apparaît largement positif. Sa présence renforcée a été déterminante pour la fin des hostilités entre Israël et le Hezbollah, et a permis d'éviter toute reprise des affrontements. Elle a rendu possible la reconstruction, mais aussi l'apaisement des populations, le retour et le déploiement des forces armées libanaises au Sud-Liban, dont elles avaient été chassées en 1978, et l'établissement d'un dialogue entre l'armée libanaise et les forces de défense israéliennes. Quant au Hezbollah, il n'est plus ouvertement – j'insiste sur cet adverbe – présent dans la zone. Enfin, la FINUL est certainement un facteur clé de la stabilité que connaît le Liban depuis 2006. Sa présence a vraisemblablement contribué à la restauration du bon fonctionnement des institutions libanaises à la suite de l'accord de Doha.

D'autre part, notre présence militaire au Sud-Liban constitue un levier important pour notre engagement en faveur de la stabilisation de ce pays. Je pense à la conférence des pays donateurs, à la conférence inter-libanaise de La Celle Saint-Cloud, ou au travail pour la création du tribunal spécial chargé de juger les coupables de l'assassinat de Rafik Hariri – et, d'une façon plus générale, à notre action au Proche-Orient.

Notre présence a certainement contribué aussi au succès de la politique consistant à tendre la main à la Syrie, politique largement inspirée par notre Président de la République. Ce pays a normalisé ses relations avec le Liban par le retrait de ses troupes et l'ouverture d'une ambassade, mais aussi engagé des discussions avec Israël. Enfin, la présence au sein de la FINUL de nombreux États européens illustre la capacité de l'Union européenne à jouer un rôle actif au Proche-Orient.

Toutefois, ces avancées doivent encore être consolidées, alors que se profilent des élections législatives cruciales pour l'avenir du Liban. Les objectifs posés par la résolution 1701 ne sont pas encore pleinement atteints, faute d'un accord durable entre les parties israélienne et libanaise, en particulier sur la question des fermes de Chebaa. Il existe également de forts soupçons pesant sur le Hezbollah, selon lesquels celui-ci poursuivrait un programme de réarmement clandestin en dehors de la zone contrôlée par la FINUL.

D'autre part, la guerre menée ces dernières semaines dans la bande de Gaza a illustré la fragilité des équilibres régionaux. Plusieurs tirs de roquettes ont visé Israël depuis le Sud-Liban, provoquant des répliques de l'armée israélienne. Si ces échanges sont demeurés contenus, et cela sans doute en partie grâce à la présence de la FINUL, ils démontrent la persistance de tensions.

L'action de la FINUL est appréciée des populations, et son rôle stabilisateur a été reconnu en août dernier par l'adoption à l'unanimité de la résolution 1832 du Conseil de sécurité, qui a prorogé son mandat pour un an, à la demande du gouvernement libanais, et a rendu hommage « au dynamisme et au dévouement » de son personnel – un hommage auquel je m'associe.

Son succès pourrait, du reste, servir de modèle à d'autres opérations dans la région : je pense naturellement à la sécurisation de la bande de Gaza, en particulier au contrôle et à l'imperméabilité de la frontière entre l'Égypte et Gaza, afin d'interdire le trafic massif d'armes, en particulier d'Iran vers le Hamas. L'envoi d'une frégate française au large de Gaza, pour concourir à la lutte contre la contrebande d'armes, pourrait préfigurer une mission de ce type.

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