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Intervention de Françoise Hostalier

Réunion du 28 janvier 2009 à 15h00
Autorisation de prolongation de cinq interventions des forces armées à l'étranger — Débat et votes sur une déclaration du gouvernement

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançoise Hostalier :

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je consacrerai mon intervention à l'EUFOR.

Lequel d'entre nous est resté insensible aux images, souvent insoutenables, des victimes de ce que l'on a pudiquement appelé la « crise du Darfour » ? Qu'elles aient été victimes des rebelles tchadiens, des Jenjawids soudanais ou encore des armées régulières tchadienne ou soudanaise, la plupart des populations étaient en fait victimes de brigands et, en tout état de cause, elles étaient toujours victimes. Le plus souvent, souvenez-vous, il s'agissait de femmes et d'enfants, abandonnés, assassinés, sous nos yeux. Deux cent mille morts, deux millions de personnes réfugiées ou déplacées dans les trois pays : Soudan, Tchad et République Centrafricaine. Nous nous sommes tous dit : « Il faut faire quelque chose » !

Ce fut à l'honneur de la France d'interpeller la communauté internationale, sinon pour résoudre le problème politique, du moins pour venir en aide à ces populations. C'est ainsi que la résolution 1778 du Conseil de sécurité, votée le 25 septembre 2007, a autorisé l'Union européenne à déployer, pour une durée d'un an, une opération militaire appelée EUFOR. Cette force militaire a principalement pour mission de soutenir la MINURCAT – Mission des Nations unies en République Centrafricaine et au Tchad – dans trois domaines.

Premièrement, elle doit sécuriser les abords des camps de réfugiés soudanais en territoire tchadien, ainsi que l'ensemble du secteur, par sa présence. Il faut bien avoir conscience des enjeux : environ 300 000 réfugiés soudanais sont répartis dans douze camps au Tchad, 53 000 sont en RCA, répartis dans cinq camps ; plus de 180 000 personnes déplacées vivent au Tchad et sans doute environ 300 000 en RCA, mais, pour le moment, seulement 20 000 d'entre elles sont prises en charge. Si l'on fait abstraction des autochtones, cela fait donc près d'un million de personnes à protéger. Deuxièmement, l'EUFOR doit faciliter l'acheminement de l'aide humanitaire. Troisièmement, elle a pour mission d'assurer la sécurité des personnels des ONG et de protéger ceux de l'ONU.

Cette résolution ne fut effective que le 28 janvier 2008. Les forces militaires ont été actives sur le terrain le 15 mars 2008, pour un mandat d'un an. Il faut en effet se souvenir qu'entre ces deux dates, au mois de février, une attaque rebelle a retardé le déploiement des forces. Vingt-six pays européens sont engagés, qui fournissent un effectif de 4 000 hommes, répartis entre quatre bases principales près de la frontière avec le Soudan : Iriba, Farchana et Goz-Beïda au Tchad, Birao en République Centrafricaine, auxquelles il faut ajouter les bases arrière d'Abéché dans l'est et de N'Djamena, capitale du Tchad. Les militaires sont déployés dans des zones très hostiles tant sous le rapport de la sécurité que sous celui du climat. Il a fallu, en outre, tenir compte, dans la mise en oeuvre du dispositif, des contraintes politiques et des disparités dans l'engagement des forces. Eh bien, malgré tout cela, le calendrier a été respecté.

Il fallait agir vite, dès la décision du Conseil de sécurité. Or la France était le seul pays européen capable de le faire immédiatement, grâce à la qualité de nos forces militaires, parfaitement adaptées à ce genre de mission, mais aussi à notre bonne connaissance du terrain. C'est ainsi que nous avons fourni près de la moitié des effectifs de l'EUFOR : 1 790 hommes et femmes, en lien avec les effectifs français du Tchad et le dispositif Boali en RCA. Cela n'a pas été facile pour la France d'être engagée dans ces deux dispositifs aux mandats très différents. Aussi, je veux rendre hommage au général Ganascia, qui a su, avec beaucoup de diplomatie, donner à l'EUFOR une dimension européenne au sens large et éviter l'amalgame franco-français de ces deux forces.

Pour avoir récemment effectué, à titre personnel, trois missions très intéressantes au Tchad, dans des contextes très différents – l'une dans un contexte humanitaire et les deux autres avec des militaires français et polonais –, je puis témoigner que les ONG et les structures internationales, notamment le Haut commissariat pour les réfugiés, sont reconnaissantes à l'EUFOR pour sa présence indispensable et pour la qualité du travail accompli.

Aujourd'hui, la sécurité est assurée dans toute la zone frontalière du Soudan, sauf à Abéché, qui est une zone de police tchadienne, où l'EUFOR n'intervient pas – c'est d'ailleurs la preuve du rôle que joue celle-ci dans le reste de la zone. Petit à petit, une situation de droit s'installe dans les zones des camps, avec une justice, une administration, des écoles et des centres de soins.

Je peux également témoigner du très bon fonctionnement de cette force multinationale. J'ai même rencontré des pilotes d'hélicoptères russes très heureux de participer à cette action. Quel magnifique exemple, qui prouve que l'Europe de la défense n'est pas une utopie, même si beaucoup de chemin reste à faire, et qui renforce la crédibilité de l'Europe politique face à ces grands partenaires que sont les États-Unis, la Chine ou la Russie !

La nouvelle résolution 1861, adoptée le 14 janvier 2009, redéfinit les missions d'une force placée, cette fois, sous mandat des Nations unies. Ayant pu visiter le chantier du camp de la MINURCAT II à Abéché, j'ai été impressionnée par la rigueur et la rapidité déployées, et je peux vous assurer que tout sera prêt en temps et en heure. Les militaires responsables de l'EUFOR, notamment les Français, sont fiers d'avoir prouvé qu'il était possible de déployer une telle force militaire en si peu de temps et de remplir une mission délicate, car les pièges étaient nombreux.

Dans quelques semaines, ils passeront la main aux Casques bleus, et la France doit y prendre toute sa part. Elle doit notamment être très présente lors du passage de témoin entre l'EUFOR et la MINURCAT II. Le groupe UMP votera donc le maintien de l'engagement français dans cette opération et je vous invite tous à faire de même, mes chers collègues, au nom des populations de l'est du Tchad, qui n'aspirent qu'à la sécurité et à la paix. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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