Monsieur le président, messieurs les ministres, monsieur le président de la commission de la défense, mes chers collègues, permettez moi, de me réjouir, de pouvoir intervenir dans le cadre de nos nouvelles compétences, issues de la réforme constitutionnelle de juillet 2008.
À l'heure où nous souhaitons tous la revalorisation de notre travail parlementaire, ce débat suivi d'un vote par opération extérieure est un excellent exemple de cet effort que nous devons tous mener. Je souhaite vivement qu'il se déroule dans la sérénité qui sied à la gravité du sujet.
En me replongeant, afin de préparer cette intervention, dans l'historique de notre présence en Côte d'Ivoire, je me faisais la remarque qu'il était, hélas, loin le temps où la Côte d'Ivoire figurait au programme du bac, en histoire-géo, avec le titre flatteur de « Miracle ivoirien » !
À l'époque – et ça n'est pas si vieux que cela –, on évoquait l'extraordinaire développement de ce pays, îlot de stabilité politique et économique où les investissements et les ressortissants étrangers se précipitaient pour s'installer durablement. Un pays dont la population était passée de 3,7 millions en 1960 à plus de 12 millions en 1988, et à plus de 18 millions aujourd'hui.
La crise des matières premières, la stagnation économique, la mort d'un leader – père de l'indépendance et garant de l'unité du pays –, les tensions ethniques et politiques issues de sa succession, la corruption ont fini de plonger ce pays dans une crise durable et sanglante.
La France est intervenue en Côte d'Ivoire dès les événements du 22 septembre 2002, lors de la tentative de coup d'État des forces rebelles du Nord à Abidjan, la capitale économique du pays, et à Bouaké, dans le centre du pays. Elle est intervenue pour protéger ses très nombreux ressortissants – plus de 20 000 en 2002 –, ainsi que les ressortissants d'autres pays.
Elle l'a fait en vertu de l'accord de défense signé avec l'État ivoirien en 1961. La France dispose, en effet, de forces sur place : le fameux 43ème BIMA, crée et installé depuis 1978 à Port-Bouët au sud d'Abidjan.
Héritier des régiments d'infanterie coloniale qui se sont illustrés sur le sol européen pendant la Grande Guerre et des troupes d'infanterie de marine, ces soldats français de l'opération dite Licorne sont rapidement devenus une force d'interposition entre les forces gouvernementales et la rébellion du Nord, privant de fait ces deux camps d'une victoire potentielle. Ils ont protégé nos ressortissants, mais se sont aussi interposés – faut-il le rappeler ici ? – aux exactions touchant les civils ivoiriens.
Lors de la signature d'un cessez-le-feu le 17 octobre suivant, les forces françaises de l'opération Licorne sont affectées à la surveillance de la « zone de confiance » entre le nord du pays, où sont installées les forces rebelles, et le sud, sous contrôle gouvernemental.
La force Licorne représente à ce jour 1 800 hommes, elle en a compté plus de 4 000, et vient compléter l'Opération des Nations unies en Côte d'Ivoire mise en place par la résolution 1528 du Conseil de Sécurité de février 2004 et agit selon le mandat du Conseil de sécurité des Nations unies et l'accord politique de Ouagadougou, signé entre les forces belligérantes en mars 2007.
Pas moins de six résolutions du Conseil de sécurité régissent le mandat de l'ONUCI, qui comprend actuellement 8 000 hommes de plus de quarante pays, dont 200 Français. Son mandat principal consiste essentiellement en un contrôle de l'application du cessez-le-feu global du 3 mai 2003, en un soutien au gouvernement ivoirien dans le processus de réconciliation nationale et la mise en oeuvre de l'accord de Linas-Marcoussis du 24 janvier 2003 : plan DDR, appui de la mise en place du processus de paix, organisation d'élections.
C'est bien cette question de l'organisation d'élections qui demeure en suspens. Après un accord en avril 2008, la date du 30 novembre avait été fixée. Le Front populaire du président Laurent Gbagbo et l'ex-rébellion des Forces nouvelles du Premier ministre Guillaume Soro se sont accordés pour procéder à un nouveau report des élections en 2009.
La signature en décembre 2008 de la quatrième étape des accords de Ouagadougou a rappelé la volonté des dirigeants ivoiriens d'y procéder dans des délais « raisonnables ».
Notre intervention en Côte d'Ivoire a permis la mise en place d'un processus politique ; nous pouvons, certes, en déplorer la lenteur, mais c'est une réalité.
Seules nos forces, bien équipées, entraînées et compétentes, ont pu efficacement protéger les populations civiles – je passe, hélas ! sur les exactions constatées à l'ouest du pays et les problèmes à la frontière libérienne.
Nos forces ont payé un lourd tribut à notre présence en Côte d'Ivoire – je pense au bombardement des positions Licorne à Bouaké en novembre 2004, qui a fait neuf morts et trente-sept blessés. Je tiens à rendre hommage, en ce jour, à nos soldats.
La situation en Côte d'Ivoire reste fragile, même si le processus politique est clairement engagé. Ce pays a encore besoin de nos forces sur place, même si l'heure est venue d'en envisager un redéploiement.
Pas plus tard qu'hier soir, le Conseil de Sécurité a prorogé pour six mois le mandat de l'ONUCI, tout en réduisant légèrement son effectif. Il prévoit aussi une mobilité accrue de cette mission grâce entre autres à l'appui fourni par Licorne. Pouvez vous nous dire, monsieur le ministre, comment cela va s'articuler sur le terrain ?
Conformément à la volonté exprimée par le Président de la République le 6 janvier 2009 lors de ses voeux aux Armées prononcés sur le sol libanais, je souhaite que notre assemblée soit pleinement associée à cette redéfinition du format de nos opérations extérieures.
Le groupe UMP, dont je me fais la porte-parole aujourd'hui, souhaite voter favorablement à la prolongation de notre intervention en Côte d'Ivoire.
C'est un signe fort que nous adressons à nos partenaires ivoiriens, mais aussi une marque de confiance et de soutien que nous adressons à nos forces engagées sur place. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)