Monsieur le premier ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, durant la campagne présidentielle, le candidat Nicolas Sarkozy n'avait pas hésité à déclarer haut et fort la fin de la « Françafrique », autrement dit la rupture avec les dérives qui entachaient traditionnellement la politique africaine de la France. Les chefs d'État de la Ve République ont suivi, les uns après les autres, une ligne politique pour le moins cynique, laissant l'intérêt des peuples africains au second plan et faisant passer l'intérêt de la France par le soutien à des dictateurs parfois sanguinaires, sur fond de réseaux occultes, de diplomatie secrète, de clientélisme ou encore de détournements de l'aide au développement.
Une fois élu à la présidence de la République, Nicolas Sarkozy avait tenté de donner des gages de sa volonté de rupture en ce domaine et avait ainsi proposé aux Africains l'avènement de l'Eurafrique, « grand destin commun » liant l'Europe et l'Afrique, qu'il avait évoqué dans son discours de Dakar en juillet 2007. Or, plus d'un an et demi après sa prise de fonction, le président Sarkozy, loin de faire acte de rupture, se révèle le digne héritier de ses prédécesseurs.
Le décalage entre la parole et les actes se manifeste concrètement par la perpétuation de relations clientélistes, par le discours de Dakar sur « l'homme africain », par le soutien des dictateurs – Bongo, Déby, Kadhafi –, par la défense de l'affairisme français – Bolloré, Bouygues –, par l'intervention militaire au Tchad ou encore par le rôle joué par certains émissaires officieux – Bourgi, Balkany et d'autres.