Je comprends moi aussi les points de vue qui ont été exprimés. Mais il faut également comprendre qu'il est essentiel de présenter dès que possible les mesures qui s'imposent. Tout entrepreneur ou père de famille faisant face à un ajustement de son budget agit de même. Lorsque les recettes diminuent, les dépenses doivent baisser aussi. Si, depuis trente ans, nous avions procédé ainsi, il n'y aurait pas d'effet de surprise.
Nous devons assumer nos responsabilités ! Les Français sont davantage rassurés quand on prend des mesures immédiatement, si celles-ci sont justes et efficaces.
Comme l'a annoncé le Premier ministre le 7 novembre dernier, compte tenu de la révision de notre hypothèse de croissance, le Gouvernement a décidé de prendre des mesures supplémentaires.
Le plan proposé par le Gouvernement représente 17,4 milliards d'euros de moindres dépenses et de recettes supplémentaires à horizon 2016, dont 7 milliards d'euros dès 2012.
S'agissant de la sécurité sociale, 700 millions d'euros supplémentaires seront économisés en 2012 au titre de la maîtrise des dépenses – qui est le véritable enjeu, souligné par de nombreux parlementaires.
La progression de l'ONDAM en 2012, initialement fixée à 2,8 %, sera en effet ramenée à 2,5 % jusqu'en 2016, ce qui représentera 500 millions d'euros d'économies en plus l'an prochain.
Par ailleurs, un effort d'économies de 120 millions d'euros sur les dépenses de gestion des caisses de sécurité sociale et de 100 millions d'euros sur les fonds de la protection sociale sera réalisé en 2012.
Les économies sur le champ de l'ONDAM concerneront trois postes principaux.
D'abord, un effort de 290 millions d'euros sera accompli sur le médicament. Il s'agit d'opérer davantage de baisses de prix sur le générique et dans le répertoire. Nous consommons trop de médicaments, il y en a trop, et nous les payons trop cher !
J'ai eu l'occasion de dire, lors de la discussion en première lecture, que je n'étais pas favorable aux appels d'offre pour les génériques. On peut néanmoins obtenir des économies supplémentaires sur le prix de ces produits.
Ces économies seront négociées par le Comité économique des produits de santé (CEPS). Elles procureront un avantage pour la sécurité sociale, le patient et les mutuelles – une baisse des prix permettant de réduire les remboursements.
Ensuite, les tarifs des spécialités médicales dont les revenus sont les plus élevés seront également mis à contribution : 90 millions d'euros de baisses de tarifs supplémentaires sont prévus, portant principalement sur les radiologues et les laboratoires de biologie.
Enfin, une marge de 100 millions d'euros sera dégagée sur le Fonds de modernisation des établissements de santé publics et privés (FMESPP), ce qui permettra une expertise plus poussée des projets de la deuxième tranche du plan « Hôpital 2012 » encore en cours de révision. Tous les projets pour lesquels des engagements ont été pris seront lancés dès 2012 ; les autres ne sont pas remis en cause.
Lors de mes premières fonctions de ministre de la santé, il nous avait été indiqué que tout projet d'investissement s'équilibrait naturellement, voire dégageait des économies de fonctionnement. Ce n'est pas tout à fait le cas : prendre quelques mois supplémentaires pour passer en revue un certain nombre d'équipements est donc justifié.
Avec une progression de l'ONDAM à 2,5 %, nous avons fait le choix de protéger les assurés et l'accès aux soins. Cela confirme la politique que nous avons toujours défendue.
Quant aux retraites, nous avons en effet décidé d'avancer d'un an la phase transitoire de la réforme et, en conséquence, l'atteinte de la cible de l'âge légal de départ à 62 ans en 2017 au lieu de 2018.
Revenir à l'équilibre un an plus tôt permet de se désendetter un an plus tôt. Concrètement, la mesure que nous vous proposons fait gagner un an sur la montée en charge de la réforme : elle concerne la génération née en 1955.
Cette mesure ne revient pas sur les paramètres arrêtés dans la réforme des retraites de 2010. Toutes les modalités liées aux dispositifs concernant les carrières longues et la pénibilité demeurent inchangées.
La réforme a déjà commencé à porter ses fruits : en 2011, elle aura permis de réduire de 100 000 le nombre de départs à la retraite et, en 2012, ce sont près de 200 000 départs de moins qui sont attendus. L'an prochain, la réforme apportera 5,4 milliards d'euros d'économies et de recettes supplémentaires pour la branche vieillesse du régime général.
Dans le contexte actuel de crise des dettes souveraines, l'accélération de la phase transitoire se traduira par une diminution des déficits cumulés des régimes de retraite à hauteur de 4,4 milliards d'euros entre 2012 et 2016 et 7,1 milliards d'euros entre 2012 et 2018, soit autant d'endettement et de frais financiers correspondants en moins pour les organismes gestionnaires de ces régimes.
Par ailleurs, cette mesure garantit le pouvoir d'achat et ne pèse pas sur la croissance.
Je sais, certes, que travailler de un à quatre mois de plus ne sera pas facile, mais il nous a semblé préférable d'agir sur ce plan-là : c'est en effet ainsi que nous pourrons garantir intégralement le pouvoir d'achat des retraités, les pensions étant indexées sur l'inflation comme l'avait prévu la loi Fillon. J'ajoute que les premiers assurés concernés seront bel et bien ceux qui sont nés le 1er janvier 1952.
Enfin, comme je m'y étais engagé devant vous, je souhaiterais revenir sur la mesure d'économie portant sur les indemnités journalières. Le Gouvernement prévoyait initialement de modifier le taux de remplacement des indemnités pour arrêt maladie, permettant ainsi une moindre dépense de 220 millions d'euros. À la demande de votre commission et de son président, nous avons examiné des mesures alternatives permettant une économie équivalente. À la suite des propositions de votre rapporteur, M. Yves Bur, le Gouvernement propose donc l'instauration d'un quatrième jour de délai de carence dans le secteur privé – cette mesure réglementaire, qui représente une économie de 200 millions, permettra de responsabiliser davantage les assurés pour garantir un recours justifié aux arrêts de travail –, ainsi que, par souci d'équité, et à la demande des parlementaires, l'institution d'un jour de carence dans les trois fonctions publiques. Cette mesure nécessite une modification législative qui a été introduite hier dans le projet de loi de finances pour 2012. Les indemnités journalières maladie, qui s'élèvent à 6,6 milliards d'euros, progressent en effet à un rythme élevé et difficilement justifiable – + 3,9 % en 2010 après une hausse de 5,1 % en 2009.
J'ajoute, enfin, que cette mesure sera accompagnée d'un renforcement des contrôles sur les arrêts de courte et de longue durée dans les secteurs public et privé.
Je souhaite revenir sur le projet de loi de financement tel qu'il est issu du Sénat. Non seulement il est fondé sur un surcroît de recettes, mais aussi, ce qui est très alarmant, sur un relâchement inquiétant des dépenses : avec un ONDAM à 3,8 %, ce sont 1,5 milliard d'euros de dépenses supplémentaires qui ont été votées par rapport à la proposition du Gouvernement, ce qui est en total décalage avec la réalité économique de notre pays et ne saurait être évidemment accepté, à moins de vouloir faire peser sur les générations à venir tout le poids des efforts.
Dans le même esprit, le Sénat a refusé un certain nombre de propositions visant à accroître notre crédibilité et à conforter notre esprit de responsabilité.
S'agissant, tout d'abord, de l'efficience hospitalière, le texte issu du Sénat ne propose rien de moins que de mettre un terme à tous les efforts progressivement engagés par le Gouvernement et les établissements de santé : suppression de la convergence ciblée entre établissements de santé publics et privés, non-introduction des indicateurs d'efficience dans les contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens (CPOM), alors que l'article voté par votre assemblée prévoit un mécanisme incitatif pour atteindre les objectifs.
S'agissant, ensuite, de l'accès aux soins, j'ai proposé d'instaurer le secteur optionnel en ne l'ouvrant qu'au secteur 2. Or, le Sénat a supprimé la mesure sans faire aucune autre proposition constructive. Là encore, ce n'est pas dans l'intérêt des Français et nous souhaitons revenir au texte initialement adopté par l'Assemblée.
Nos concitoyens sont conscients des risques que les déficits et le ralentissement de la croissance mondiale font peser sur l'avenir de notre protection sociale.
Avec ce projet de loi de financement et ces mesures complémentaires, le Gouvernement apporte des réponses à la hauteur des enjeux car il tient compte des conséquences de la crise sur l'équilibre financier de la sécurité sociale afin de garantir la pérennité de notre système solidaire.