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Intervention de Catherine Coutelle

Réunion du 17 novembre 2011 à 9h30
Précarité professionnelle des femmes — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCatherine Coutelle :

Voici ce qu'on pouvait y trouver : « Les femmes forment aujourd'hui un sous-salariat précaire, disposant de revenus réduits, privées de certains acquis sociaux et bien souvent enfermées à vie dans cette situation ».

Le tableau est connu, depuis peu reconnu, Christophe Sirugue a rappelé les chiffres dans l'exposé des motifs de la proposition.

Une telle situation n'est ni le souhait ni la faute des femmes. Elles veulent massivement rester dans le monde du travail, avoir des enfants et continuer à travailler, assurer leur vie de femmes et de famille sans sacrifier leur carrière et, quand elles ont pris un temps partiel, pouvoir revenir à temps plein.

Alors pourquoi cette précarité ? Pourquoi la pauvreté se conjugue-t-elle au féminin ? Les causes sont à chercher dans les inégalités entre les hommes et les femmes, et je voudrais en souligner trois aspects.

Il y a d'abord les mentalités et les stéréotypes. Les salaires des femmes seraient-ils encore des salaires d'appoint ? En période de crise, certains seraient tentés de penser que les femmes prennent la place des hommes, sans voir qu'elles veulent avoir leur autonomie, avoir une carrière et assumer leur rôle familial.

Dans cette démarche d'autonomie, le conflit entre famille et travail continue d'influer négativement sur la carrière des femmes. Les femmes françaises sont les plus fécondes en Europe, mais ce sont aussi elles qui s'arrêtent le plus après la naissance du deuxième ou du troisième enfant. Elles voudraient reprendre un emploi mais cela est très difficile lorsqu'elles ont un emploi peu qualifié ou à temps très partiel, d'autant que le partage des tâches est toujours aussi mal partagé. Seuls 12 % des hommes assument plus de 30 % des tâches ménagères, 88 % ne les assument pas. La dernière enquête de l'INSEE indique que les femmes font trente-cinq heures par semaine de travail domestique !

Dans un excellent rapport sur les femmes dans les médias, Valérie Létard demandait à la rédactrice en chef d'un magazine féminin : « Pourquoi ne montrez-vous jamais de femme au travail ? ». Réponse : « Parce que nos lectrices ne sont pas concernées par la carrière ; ce sont les problèmes quotidiens qui les préoccupent, pas le travail. » Les stéréotypes ont la vie dure !

Deuxième raison : le manque de qualité des emplois féminins. Je veux souligner, monsieur le ministre, la sous-représentation des femmes dans les postes à responsabilité et chez les partenaires sociaux. Les femmes sont le maillon faible des négociations salariales et de la défense des salaires. Cela explique pourquoi, en dépit de trois lois, les rapports de situation comparée ne sont toujours par sortis et pourquoi la loi de 2008 modifie la hiérarchie des normes en faisant prévaloir l'accord d'entreprise qui laisse les femmes sans défense.

Troisième raison : la législation sociale qui devrait les protéger se retourne contre elles. Chaque fois qu'une dérogation est introduite dans le droit du travail, elle devient la norme. Ainsi, nous sommes indignées par votre décret de juillet 2011, qui interprète la loi sur les retraites de telle façon que l'égalité salariale n'avance pas.

En conclusion, les textes que nous présentons sont des textes d'urgence sociale. Il s'agit d'un enjeu d'information, de dialogue, de justice. Je voudrais, monsieur le ministre, appeler votre attention sur une notation de la France moins médiatisée que le triple A : dans le classement du Forum économique mondial, notre pays vient de passer de la 127e à la 131e place pour les écarts de salaire entre hommes et femmes. Nous sommes entre la Jamaïque et le Kazakhstan.

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