Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la rapporteure, mes chers collègues, nous entamons l'examen de la première proposition de loi inscrite par le parti socialiste à l'ordre du jour de cette journée d'initiative parlementaire. Son objet ne manque pas d'intérêt : la sécurité aérienne nous est chère à tous. Je regrette d'ailleurs qu'il y ait ce matin si peu de monde dans l'hémicycle pour cette discussion d'origine parlementaire.
Monsieur le ministre, je voudrais vous remercier de l'appréciation que vous avez portée sur cette proposition de loi : « Proposer d'améliorer la transparence des enquêtes et la diffusion des informations en matière de sécurité aérienne constitue une intention louable », avez-vous dit, est un objectif que nous partageons tous.
Vous me permettrez de saluer l'attention que vous avez portée à ces questions sensibles depuis que vous êtes ministre, notamment vis-à-vis des familles des victimes des accidents, notamment celui du vol Rio-Paris. Vous n'avez pas à cette occasion ménagé votre peine, et je voudrais vous rendre hommage : les boîtes noires ont été retrouvées, et je sais que c'était l'une de vos priorités dès votre nomination à ces fonctions par le Président de la République.
Pour autant, ce qui est déplaisant dans cette proposition de loi, c'est qu'elle jette un doute sur les instruments actuels de la sécurité aérienne.
Vous vous êtes appuyée, madame la rapporteure, et vous avez eu raison de le faire, sur les travaux de la commission d'enquête parlementaire de 2004. On ne peut pas dire, toutefois, que cette commission d'enquête n'ait pas eu de suite : sous l'autorité de l'Europe, et à l'initiative de la France, un classement des compagnies aériennes a été établi. Pour avoir assisté il y a quelques instants à une réunion avec un représentant d'un pays qui n'a plus de compagnie, car celle-ci a été inscrite sur la liste noire, je peux vous dire que le travail qui a été fait n'a pas été vain. Il n'est donc pas tout à fait vrai que la commission n'ait servi à rien.
Vous nous dites ensuite qu'il faut que le Bureau d'enquêtes et d'analyses soit indépendant et devienne un établissement public. Croyez-vous que cela améliorerait son efficacité ? En tout cas, je voudrais, pour ma part, comme Mme Billard l'a fait tout à l'heure – et je l'ai alors approuvée –, rendre hommage à nos experts, qui travaillent de façon exemplaire.
Toutefois, monsieur le ministre, la question est louable : transparence et indépendance doivent être nos maîtres mots. La presse est heureusement très vigilante sur ces sujets. Mais je ne crois pas que jeter le doute sur l'indépendance des enquêtes menées soit la bonne solution.
Nous disposons d'un règlement européen. Je parle sous votre contrôle, monsieur le ministre : il a force de loi. Sans doute devrions-nous prendre en compte les propositions des élus de l'opposition pour mieux appliquer ce règlement, et ainsi améliorer sur certains points la transparence et l'efficacité ; peut-être, monsieur le ministre, y a-t-il là une piste intéressante à explorer. Ainsi, la sécurité aérienne pourrait encore gagner en transparence et en efficacité, et, encore une fois, c'est un combat que nous voulons tous mener.
Vous souhaitez, madame la rapporteure, la transformation du BEA en établissement public. Nous ne sommes pas ici dans une réunion de la commission des lois destinée à choisir la meilleure structure juridique possible pour le BEA. Mais je ne pense pas que cette transformation le rendrait plus efficace.
Concernant la Haute autorité que vous préconisez, il me semble que c'est la négation même des prérogatives de l'État ! Monsieur le ministre, vous avez été élevé au rang de ministre à part entière du Gouvernement, alors qu'il y a quelques mois encore, il y avait un secrétaire d'État aux transports. C'est bien l'illustration que la sécurité dans les transports constitue une fonction régalienne.
J'ai envie de dire à mes collègues de l'opposition : lorsque nous avons débattu des autorités administratives indépendantes, vous n'avez jamais évoqué la nécessité de faire du BEA une autorité indépendante. La sécurité aérienne est, à mon sens, une prérogative de l'État.
Monsieur le ministre, pour atteindre l'objectif partagé de sécurité et de transparence, des améliorations peuvent très certainement être apportées, et les élus de l'opposition ont raison de poser des questions : au lieu de balayer cette proposition de loi d'un revers de main, je vous proposerai, monsieur le ministre, au nom du groupe Nouveau Centre, dans la lignée des travaux parlementaires, notamment du remarquable travail de Mme la rapporteure sur ces questions, de permettre à un groupe de parlementaires de veiller à ce que le règlement européen soit appliqué au mieux, afin d'atteindre des objectifs que nous partageons tous.