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Intervention de André Chassaigne

Réunion du 16 novembre 2011 à 10h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Chassaigne, rapporteur :

Toutes vos interventions vont au coeur du sujet. Quelle que soit la sensibilité politique des orateurs, j'ai pleine conscience des problèmes qu'ils mettent en avant, notamment la difficulté à mettre en oeuvre le coefficient multiplicateur, les blocages qu'engendre la réglementation européenne, la difficulté de réunir autour d'une table l'ensemble des acteurs.

En présentant ce texte, notre groupe essaie d'apporter des réponses. Les auditions que j'ai menées, dans le temps limité qui m'était imparti, confirment la plupart de vos propos. Je le dis en toute transparence, elles ont révélé à quel point il est difficile de concrétiser ce que je propose.

Je ne mets pas en doute que l'on ait eu la volonté d'apporter des réponses par le passé, mais les réponses sont peu efficaces. La contractualisation mise en place par la loi de modernisation de l'agriculture, par exemple, devait garantir des prix aux producteurs. Or cela ne marche pas, au point que les producteurs ne signent pas les contrats.

Le développement des interprofessions est également un échec relatif. Leur rôle est plus d'offrir du volume aux acheteurs, notamment aux centrales d'achats, que de régler le problème du prix payé au producteur.

C'est pour apporter des réponses à ces problèmes que j'ai proposé un nouvel outil. Certes, comme plusieurs intervenants l'ont souligné, il faut apporter des améliorations à mon texte.

Devrait-on par exemple établir un dispositif de coefficient multiplicateur permanent, auquel cas il faudrait inscrire dans la loi un mécanisme de déclenchement – comme il en existe un aujourd'hui pour les fruits et légumes –, permettant de garantir un revenu minimum en période de crise ? Je suis tout disposé à examiner des amendements en ce sens.

De même, l'application d'un coefficient multiplicateur à l'ensemble des produits alimentaires ne va pas de soi. Le niveau de transformation du produit peut rendre complexe la mise en oeuvre d'un coefficient sur l'ensemble de la chaîne. Mais on a réalisé des progrès en la matière. L'Observatoire des prix et des marges – dont la création est le grand acquis de ces dernières années sur ces questions – est capable de réaliser les calculs nécessaires.

S'agissant des importations, je prends note des mesures d'étiquetage proposées, mais je souligne que le coefficient multiplicateur peut s'appliquer aux produits importés. Aujourd'hui, on importe pour casser les prix de nos productions, notamment les productions saisonnières. Or, avec un coefficient multiplicateur sur les importations, la grande distribution n'aura plus intérêt à acheter à des prix très bas à l'étranger puisque sa marge bénéficiaire sera beaucoup plus étroite.

Le dispositif demande à être travaillé davantage pour éviter les effets pervers, je le conçois bien, mais cette réponse peut être mise en place et elle n'épargne pas les importations.

Pour ce qui est du prix minimum indicatif, je conviens qu'il existe un réel problème au regard de la réglementation européenne. En revanche, l'article 3 peut sans doute nous réunir dès lors que nous en aurons modifié la formulation.

Les responsables de l'Observatoire et de FranceAgriMer l'ont souligné lorsque je les ai rencontrés : on est capable de dresser le constat de la situation, mais ce constat n'aboutit pas à une action concrète. Une conférence annuelle sur les prix par type de production permettrait de réunir tous les acteurs, grande distribution et consommateurs compris. De l'avis de tous mes interlocuteurs, il faut se parler. Or, les contacts n'existent pas aujourd'hui. Les échanges noués dans une conférence annuelle pourraient aboutir à la mise en oeuvre des conclusions de l'Observatoire des prix et des marges sur le prix de revient des produits, l'évolution des charges et des coûts, l'augmentation du prix des intrants, etc.

En créant cet outil, nous serions à même d'établir un socle de négociation assorti d'indicateurs. Certains pays le font : au Canada, par exemple, l'évaluation du coût de production à partir des charges et des revenus de l'agriculteur se traduit par la fixation d'un prix minimum permettant à chacun de vivre.

S'il faut en effet s'attaquer aux marges, il se pose également un problème de civilisation, de mode de vie, de consommation et de production, que nous nous devrons bien un jour prendre à bras-le-corps.

Vous comparez mon discours à un chant des sirènes, madame de La Raudière. J'en suis flatté, cela vaut mieux qu'un chant du cygne !

Reste que le texte est amendable. J'espère que l'examen en séance publique nous permettra de nous mettre d'accord, non pas sur un plus petit dénominateur commun, mais sur une ou deux actions qui permettraient aux agriculteurs de mieux vivre de leur travail, et aux consommateurs d'être également bénéficiaires au bout de la chaîne.

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