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Intervention de Alfred Marie-Jeanne

Réunion du 8 novembre 2011 à 21h30
Projet de loi de finances pour 2012 — Outre-mer

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlfred Marie-Jeanne :

La météo du climat des affaires, qui prend le pouls des chefs d'entreprise, indique un degré de pessimisme et de déception en hausse de 2,5 % sur le dernier trimestre étudié. Dans ces conditions, faire encore des ponctions sur la Martinique ne peut qu'amplifier les déconvenues et les aléas.

Dans ce contexte, le budget 2012 de la mission « Outre-mer » ne peut faire de miracle. C'est le contraire qui se produira avec un ralentissement prévisible accru de l'activité.

Malgré tout, on aurait tout de même pu mieux faire en regardant au plus près les mesures d'austérité qui ont été retenues pour réduire le fardeau de la dette de la France, qui s'élève à environ 1 700 milliards d'euros, soit plus de 86 % de sa richesse. Dans ce montant figurent les dettes des régions, des départements et des communes pour environ 170 milliards d'euros. Il existe une exception, c'est celle de la région Martinique que j'ai eu l'honneur de présider, et dont la gestion a supprimé l'endettement énorme qui l'accablait. Si vous perdez le triple A, ce ne sera pas à cause de l'ancienne région !

En 2012, le premier poste budgétaire de l'État est le remboursement d'une partie des intérêts de cette dette anesthésiante, pour un montant de 50 milliards d'euros.

Solidarité oblige, nous dit-on. Taxer inopportunément les complémentaires santé constitue-t-il, pour la Martinique, une mesure de justice sociale réparatrice et solidaire ? Est-ce que trop de taxes disséminées ici et là n'engendre pas de casses supplémentaires ? La question est posée. L'an dernier, la Martinique a contribué au redressement dans des proportions non négligeables, me semble-t-il. L'effort par habitant y serait relativement plus significatif qu'en France. S'il en était ainsi, il n'y aurait ni égalité ni – encore moins – équité.

Solidarité oblige, nous dit-on ! Le dispositif d'abattement d'un tiers sur le résultat des exploitations situées dans les DOM est-il bien ciblé ? J'en doute un peu, car un rapport récent de l'Inspection générale des finances affirme que 46 % du coût de cette mesure bénéficiait à des entreprises de moins de neuf salariés. N'y a-t-il pas là un vrai hic qui mérite un peu plus d'éclaircissements ?

Solidarité oblige, nous dit-on ? Comme par enchantement, le Gouvernement nous exhorte fortement à nous ancrer de plus en plus dans notre sphère naturelle, le continent Caraïbe. Enfin ! Mais qui nous l'avait interdit jusqu'à ce jour ? Pas celui qui vous parle, en tout cas. Il l'a toujours revendiqué, car c'était un non-sens de ne pas y être intégré.

À cet égard, vous avez déclaré, madame la ministre, le 26 octobre dernier, devant la commission des affaires économiques, que votre budget n'a qu'un but, et je vous cite : « Il s'agit de redonner aux ultramarins les clés de leur développement et de les accompagner dans les projets qui sont les leurs. » On nous remet les clés de notre développement au moment où l'exogène a déjà mis KO l'endogène ! C'est la preuve qu'a posteriori, notre développement ne nous a jamais réellement appartenu et qu'il a toujours été orienté, et réorienté selon les choix décidés par Paris et de Paris.

J'espère qu'il n'en sera pas encore ainsi et que la Martinique y trouvera son compte. Car il n'est jamais trop tard pour mieux assumer, à condition de mettre à bas les très nombreux carcans existants. Parmi eux, citons pêle-mêle le problème des visas, l'insertion à part entière dans des organismes régionaux et internationaux, l'aide au fret ou l'aide à l'export, les zones de pêche, etc.

Sachez, par exemple, que l'aide au fret ne peut être attribuée que sur des trajets entre l'Union européenne et les DOM, ce qui est restrictif et dommageable à souhait ! À l'époque, j'avais demandé la possibilité de l'extension de cette mesure aux frets régionaux – ce qui fut refusé. Si les choses restaient en l'état, développement endogène et ancrage dans la Caraïbe resteraient un leurre supplémentaire. Il faut libérer totalement la coopération de toute entrave préjudiciable à sa réalisation.

En conclusion, un nouveau monde est en train d'émerger. Dans la Caraïbe, notre berceau géographique, cette émergence ne peut se concevoir sans nous ni contre nous, comme ce fut le cas dans le passé. Nous ne pouvons plus nous satisfaire du rôle mineur de paravent et de pare-chocs. Nous devons être acteurs et non observateurs, nous devons être partenaires. Il y va de l'intérêt réciproque bien compris de chacun et de tous. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

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