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Intervention de Pierre Lellouche

Réunion du 7 novembre 2011 à 21h30
Projet de loi de finances pour 2012 — Aide publique au développement

Pierre Lellouche, secrétaire d'état chargé du commerce extérieur :

En quoi une annulation de dette contribue-t-elle au développement ? demandiez-vous, monsieur Asensi. Demandez-le donc au gouvernement ivoirien, il va vous expliquer : c'est une charge financière extrêmement lourde qui lui est ainsi retirée. C'est du vrai argent, permettez-moi de vous le dire, de l'argent apporté par le contribuable français et auquel nous renonçons.

Notre effort d'APD en 2012 est fondé sur des bases solides, puisque les crédits budgétaires de la mission APD sont stabilisés à un niveau de 3,34 milliards d'euros par an, soit 10 milliards d'euros au total sur le triennum budgétaire. S'agissant du programme 110 « Aide économique et financière au développement », les crédits de paiement resteront ainsi à leur niveau de l'an passé ; seules les autorisations d'engagement varieront en fonction des reconstitutions triennales des fonds multilatéraux.

Je remercie tous les orateurs qui ont bien voulu le reconnaître, à commencer par M. Emmanuelli, mais aussi M. Hunault, Mme Bourragué, M. Christ et d'autres.

Venons-en à l'efficacité de ces fonds. Il en va en matière d'APD comme en matière commerciale : il faut cesser la naïveté. À cet égard, monsieur Janquin et monsieur Asensi, je vais vous dire ma façon de voir les choses. Il ne s'agit pas d'être moins généreux, vous l'aurez compris, ce n'est pas notre philosophie ; il s'agit d'adapter notre générosité à la réalité du monde qui nous entoure. En ce début du XXIe siècle où la puissance est en train de basculer, personne ne comprendrait que nous, Français, continuions à accorder les mêmes libéralités, qu'il s'agisse de préférences tarifaires ou de financements d'aide publique au développement, à des économies émergentes en forte croissance comme le Brésil ou la Chine, et à des pays pauvres comme Haïti, le Burkina Faso et le Bangladesh.

C'est sous l'impulsion de la France que le chantier de la révision des critères d'accès au système des préférences généralisées a enfin été lancé au niveau européen. Notre politique européenne de préférences commerciales doit être un vecteur de réduction des inégalités et d'insertion de ces pays dans le commerce, pas un outil pour subventionner des importations turques, chinoises ou brésiliennes.

Nous n'avons pas attendu pour remettre de l'ordre et de l'équité dans notre aide publique bilatérale au développement. Plusieurs orateurs ont évoqué la question que j'ai moi-même soulevée dès l'année dernière au sein de mon ministère : l'aide publique au développement à la Chine – le banquier de la planète qui détient notamment des créances à l'égard de l'Europe – pose problème. Nous sommes en train de le régler.

Désormais, les nouveaux prêts d'APD que nous faisons à la Chine à travers l'Agence française de développement ne coûteront plus un centime au contribuable français. Ce que l'on appelle le « coût État », c'est-à-dire l'effort budgétaire consenti par l'État, sera concentré dans les pays prioritaires d'Afrique subsaharienne. Au dernier orateur, j'indique que la part de l'effort financier de l'État consacrée aux grands pays émergents a été limitée à 7 % en 2010, alors que le nouveau contrat d'objectifs et de moyens liant l'État à l'AFD pour 2011-2013 prévoit un plafond de 10 %.

Ce recentrage de notre aide est dicté par le bon sens et je suis convaincu, à titre personnel, qu'il mérite d'être poursuivi ; je suis heureux de voir qu'il recueille l'assentiment des députés sur tous les bancs. Générosité ne peut pas dire naïveté. De même, à l'heure de la rigueur budgétaire et des déficits commerciaux records, on ne peut plus se permettre de faire de l'aide publique au développement sans penser commerce extérieur ; je m'inscris en faux, sur ce point, contre certains orateurs, dont M. Asensi.

La France est pratiquement la championne du monde du déliement de son aide, c'est-à-dire des aides accordées sans contrepartie directe pour ses entreprises. Notre aide bilatérale est déliée à 87 % depuis 2006, contre 75 % pour l'Allemagne, 71 % pour l'Espagne, 69 % pour les États-Unis et seulement 63 % pour l'Italie. Voilà, monsieur Janquin, quels sont les chiffres : ils sont exactement à l'opposé de la réalité que vous prétendiez dénoncer tout à l'heure.

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