Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, les priorités qu'affiche la France en matière d'aide publique au développement sont bien connues du fait qu'elles ont été formulées dans un document-cadre. Nous souscrivons tout particulièrement à l'engagement maintes fois réitéré de lutter contre la pauvreté dans les pays en développement, ce qui nous a conduits à nous engager dans les Objectifs du Millénaire pour le Développement.
Pour autant, monsieur le ministre, il y a loin de ces engagements aux moyens mis en oeuvre pour les atteindre. Tout d'abord, la priorité affichée aux secteurs sociaux dans les pays pauvres ne se traduit pas dans l'effort budgétaire français. Que voyons-nous en effet dans le budget à cet égard ? Un fort développement des prêts octroyés aux pays émergents, avec pour corollaire, bien évidemment, un désengagement du financement de projets bilatéraux sur dons.
On privilégie donc les prêts à des pays solvables, et non aux pays les moins avancés qui, selon nos engagements, devraient pourtant être prioritaires. C'est ainsi que l'aide française est de moins en moins adaptée aux besoins de ces pays pauvres. Les chiffres le traduisent d'ailleurs parfaitement, puisque la part des dons affectés aux Objectifs du Millénaire pour le développement dans les pays les plus pauvres, qui sont pour nous prioritaires, est passée de 80 % en 2010 à 50 %.
Ce décalage entre affichage et réalité budgétaire est, hélas, illustré par le fait que les quatorze pays prioritaires du Comité interministériel de la coopération internationale et du développement sont en queue de peloton dans l'aide bilatérale effective de la France. Pourtant, quand l'aide est réellement mise au service du développement, les exemples de réalisations efficaces ne manquent pas, qu'il s'agisse de la scolarisation massive en Afrique, des services de santé intégrés permettant tout à la fois l'accès aux organismes de planification familiale et la prévention du SIDA, ou encore de la généralisation des vaccinations.
Monsieur le ministre, la France s'est engagée à de multiples reprises en faveur de la santé mondiale, partant de cette terrible réalité des pays pauvres qui veut que la grossesse représente encore un risque majeur pour la santé des jeunes filles et des femmes en âge de procréer. Aujourd'hui, il reste seulement quatre ans avant l'échéance fixée par la communauté internationale pour atteindre les huit Objectifs du Millénaire pour le Développement. Or nous savons que l'aide publique au développement en matière de santé est cruciale pour la réalisation des objectifs quatre, cinq et six, alors que les femmes pauvres des pays en développement, tout particulièrement en Afrique subsaharienne, continuent à payer le prix fort des mesures d'austérité des pays donateurs, qui, s'agissant de l'aide publique destinée à la santé, n'en affectent que 3 % à 5 % à la santé sexuelle et reproductive, comme c'est d'ailleurs le cas pour l'aide française.
Certes, le Président de la République a pris des engagements en faveur de la réduction de la mortalité maternelle et infantile à Muskoka en 2010. Pour autant, chez certains de nos partenaires en Afrique subsaharienne ou dans la région Caraïbe, les nouveaux cas d'infection par le SIDA touchent de trois à huit fois plus de jeunes filles que de garçons du même âge.
Mon interrogation est triple. D'abord, que fait concrètement la France concernant la prévention du SIDA chez les jeunes filles ? Ensuite, le Fonds mondial est-il le meilleur instrument pour protéger les jeunes filles, vulnérables à tous les abus et violences qui les exposent au SIDA ? Enfin, les engagements de Muskoka correspondent-ils vraiment à des crédits additionnels ?
Par ailleurs, alors que la Terre atteint 7 milliards d'habitants, 1,2 milliard de jeunes vont bientôt fonder leur propre famille. Leurs choix en matière de procréation seront déterminants pour l'avenir de notre planète, compte tenu du lien systémique qui existe entre réchauffement climatique, population et pauvreté.
C'est pourquoi je vous interroge, monsieur le ministre, sur la manière dont la France aborde cette question, du fait de l'urgence qu'il y a à apporter une forte contribution financière aux programmes de planning familial, tout particulièrement en Afrique subsaharienne, où les familles comptent de sept à dix enfants.
Monsieur le ministre, le G20 n'est pas allé très loin sur une taxation des transactions financières. Pour autant, si celle-ci se met en place, même partiellement, en 2012, pouvez-vous nous confirmer qu'il est toujours envisagé de l'affecter aux trois domaines clés de notre futur que sont l'aide au développement, la lutte contre la pauvreté et le changement climatique ?