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Intervention de Christian Bataille

Réunion du 7 novembre 2011 à 21h30
Projet de loi de finances pour 2012 — Aide publique au développement

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristian Bataille :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l'examen du budget de la mission d'aide publique au développement creuse encore plus, que ce soit en commission ou en séance publique, le fossé entre, d'une part, les informations et les documents d'origine gouvernementale, très lacunaires et transmis tardivement, et d'autre part, les efforts faits par notre assemblée et sa commission, afin de procéder à une analyse claire du budget qui nous est communiqué.

Tout d'abord, comme le souligne Mme Martinez dans son rapport, nous ne disposons pas, en particulier au moment de l'examen en commission, des documents budgétaires qui nous permettraient d'avoir une vision d'ensemble. Cette situation, ressentie par la représentation nationale comme une forme de mépris de la part de l'administration gouvernementale, met en évidence que le Parlement aura à effectuer un véritable travail de reconquête, dans l'esprit de la Constitution, lors de la prochaine législature.

Nous ne débattons aujourd'hui, au titre de la mission, que sur un tiers des crédits déclarés au CAD de l'OCDE, soit 3,3 milliards d'euros pour l'année. Il est difficile de voter sur une ligne budgétaire ne permettant pas à notre assemblée de disposer d'une vision politique réelle et globale. En tout état de cause, nous sommes loin des objectifs fixés à 0,7 % du produit intérieur brut : avec 0,5 % environ, nous nous situons 30 % en dessous de cet objectif.

Par ailleurs, les perspectives annoncées pour le développement – réduction de la pauvreté, éducation élémentaire pour tous, lutte contre les épidémies et contre la mortalité infantile – sont parfois oubliées. Ainsi, que vient faire l'utilisation de ces crédits de solidarité pour la réalisation de certains projets économiques qu'il est, certes, judicieux d'accompagner, mais dans un autre cadre lié aux missions économiques à l'étranger ?

Enfin, comment expliquer que des pays du G20 bénéficient de l'aide publique au développement au détriment de l'aide qui devrait aller, par exemple, aux pays de l'Afrique subsaharienne, pour lesquels nous pouvons faire beaucoup plus ? Nous sommes devant un ensemble de crédits dont l'engagement manque de lisibilité car, si les montants versés ne nous sont que partiellement connus, nous ignorons tout des transferts réels ! Quels moyens avons-nous de contrôler l'exécution des crédits de la République française par les États bénéficiaires, surtout quand il s'agit de régimes autoritaires, dont l'opacité est la principale caractéristique ? De plus, je rappelle que nous suivons aujourd'hui moins de 3,5 milliards d'euros sur les dix milliards déclarés.

Dans ce contexte maussade, je me dois tout de même de relever un aspect positif : la France a, pour le moment, échappé à la tentation de réduire sa contribution brute, et reste dans les premiers rangs mondiaux, cette contribution échappant au coup de rabot qui a frappé le MAE.

Je ne voudrais pas non plus oublier de souligner la qualité du travail effectué par notre rapporteure, qui a rédigé son rapport avec beaucoup de rigueur. Hélas, la valeur de notre collègue ne peut faire oublier le manque d'information dont nous souffrons et l'opacité des crédits que nous avons à voter ou à rejeter. Si, en commission, nous pouvons apprécier la qualité du rapport présenté et du débat, au final, c'est la politique gouvernementale qu'il nous revient d'apprécier.

Je voudrais, pour terminer, faire un constat et une suggestion. Le constat, c'est que nous avons besoin, de façon urgente, d'un mécanisme indépendant qui aille le plus loin possible pour s'assurer de la bonne exécution de crédits que nous ne contrôlons pas et dont, hélas, nous ignorons tout de l'utilisation qui en est faite. La suggestion consiste à mobiliser fortement la Cour des comptes qui, j'en suis sûr, se pencherait utilement sur l'aide publique au développement afin que, dans l'avenir, nous soyons bien mieux éclairés et puissions avoir un débat sur des engagements crédibles et vérifiés.

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