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Intervention de Camille de Rocca Serra

Réunion du 4 novembre 2011 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2012 — Mission Économie

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCamille de Rocca Serra, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire pour les participations financières de l'état et les avances à divers services de l'état ou organismes gérant des services publics :

Pour ce qui est d'Areva, les dernières années ont été marquées par une stratégie volontariste de croissance, alors justifiée par la perspective d'un renouveau du nucléaire. Elle s'est traduite par d'importants succès commerciaux, Areva devenant l'un des leaders mondiaux de son secteur.

Cette stratégie a cependant conduit à des prises de risque importantes, notamment l'acquisition de la société UraMin en 2007. Plus que le risque industriel encouru, ce sont les conditions de la réalisation de cette opération particulière qui sont critiquables : non seulement une certaine précipitation semble avoir prévalu au moment où les cours de court terme de l'uranium atteignaient un pic historique, mais les conditions posées par l'Agence des participations de l'État, notamment l'entrée au capital de la société d'un partenaire industriel – en l'occurrence chinois –, n'ont pas été respectées. Certes, il est possible de comprendre qu'Areva, entreprise alors étroitement dépendante du Niger, ait cherché à diversifier ses approvisionnements, mais il est à craindre que l'opacité du management n'ait pas permis à l'APE d'assurer un contrôle suffisamment étroit de l'opération. À moyen et long terme, cependant, cet échec sera peut-être relativisé si le cours de l'uranium retrouve un niveau plus élevé.

Les perspectives d'avenir d'Areva ont été assombries à la suite de l'accident de Fukushima. Le groupe devrait prochainement publier un nouveau plan d'affaires et probablement revoir à la baisse ses investissements. Il dispose toutefois des moyens de faire face à cette période qui s'annonce difficile.

À court terme, l'amélioration de sa gouvernance devrait faciliter ses relations avec l'État et avec son principal client, EDF. Areva bénéficie également de revenus réguliers du fait des services offerts à la base installée, qui constituent une part majoritaire de son chiffre d'affaires. Le groupe peut, par ailleurs, recourir à des relais de croissance, notamment dans le domaine des énergies renouvelables. À cet égard, Areva dispose d'un savoir-faire en matière d'énergie éolienne et l'entreprise répondra, en partenariat avec GDF-Suez, à l'appel d'offres relatif au développement de l'éolien offshore.

Le groupe peut également recourir à une augmentation de capital. Son conseil de surveillance en a adopté le principe en juin 2009, mais il n'a été que partiellement mis en oeuvre, À cet égard, monsieur le ministre, pourriez-vous nous indiquer si l'État accepterait le principe d'une nouvelle augmentation de capital et s'il serait en mesure d'y prendre part, comme il l'a fait en décembre dernier ?

À long terme enfin, les perspectives commerciales seraient probablement meilleures. Areva peut compter sur le maintien et le développement de l'énergie nucléaire, tant en Europe, avec notamment le Royaume-Uni, que dans les pays émergents, par exemple en Inde et en Chine.

En ce qui concerne EDF, la rentabilité et la structure financière du groupe sont satisfaisantes. L'endettement du groupe est certes élevé, mais il reste soutenable.

EDF devra toutefois relever le défi de réaliser dans les années à venir des montants importants pour moderniser le parc nucléaire et se développer à l'international. À cet égard, j'insiste sur le fait que sa priorité doit résider dans la sûreté du parc nucléaire et qu'il devra réaliser rapidement l'ensemble des investissements que l'Autorité de sûreté nucléaire jugera nécessaire pour tirer les leçons de l'accident de Fukushima. La sécurité des installations est la condition de la prolongation de leur durée de vie et du maintien de la part importante du nucléaire dans le mix énergétique. Elle est également un élément majeur de la réputation de la filière nucléaire française et la condition de ses succès commerciaux à l'export.

Au-delà de la situation présente de ces deux entreprises, le principal enjeu réside dans les relations qui les unissent et dans le développement de la filière nucléaire française. À cet égard, le Conseil de politique nucléaire a tracé une feuille de route, claire et utile, qui commence à être mise en oeuvre. L'objectif est d'assurer le succès des entreprises françaises à l'export. Pour cela, il a été décidé qu'EDF serait désigné comme architecte-ensemblier de la construction des nouvelles centrales nucléaires de fabrication française chaque fois que les besoins des clients le nécessitent. Si la demande n'implique pas la participation d'EDF, Areva pourra, éventuellement en partenariat avec GDF-Suez, répondre aux appels d'offre à l'international.

Le Conseil de politique nucléaire a également décidé de raffermir et d'apaiser les relations entre EDF et Areva. EDF a récemment accordé à Areva une part majoritaire de la fourniture de nouveaux générateurs de vapeur. D'autres projets sont en cours de négociation comme, par exemple, le renforcement des liens sur l'amont du cycle, c'est-à-dire sur l'approvisionnement en uranium et l'enrichissement. Des discussions ont également lieu pour inclure EDF dans le projet ATMEA de réacteurs de moyenne puissance développé par Areva et Mitsubishi, et dans lequel GDF-Suez est également impliqué.

En conclusion, je souhaiterais souligner la réduction des marges de manoeuvre financières de l'État actionnaire. La situation budgétaire du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État » est en effet caractérisée par une certaine tension. Compte tenu de la dégradation des conditions de marché, il est probable que les cessions d'actifs, qui constituent les principales recettes du compte, seront faibles, tant en 2011 qu'en 2012. Les dépenses, en revanche, restent élevées, avec notamment l'augmentation de capital de La Poste, qui requerra plus de 450 millions d'euros par an de 2011 à 2013. En conséquence, l'État est conduit à puiser dans la dotation qui avait été réservée à l'augmentation de capital du Fonds stratégique d'investissement. Le ministre pourra sans doute nous éclairer davantage sur la situation budgétaire du compte et sur l'avenir des crédits réservés au FSI.

Sur la base de l'ensemble de ces éléments, je donnerai un avis favorable à l'adoption des crédits des comptes spéciaux « Participations financières de l'État » et « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics ». (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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