Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Écologie, développement et aménagement durables », ce n'est pas seulement l'addition de chiffres, c'est aussi un bon thermomètre du développement durable pour le Gouvernement.
Dès que l'on parle du développement durable, le Gouvernement n'a que le mot « Grenelle » à la bouche. Il faut dire qu'il résume et décrit assez bien vos intentions en la matière. La méthode du Gouvernement relève de l'astuce. Du grand art au service d'une noble ambition pourrait-on croire à la lecture de l'affiche. Un art consommé de la communication au service d'une ambition électorale à court terme, et d'ailleurs vite déçue, lisons-nous dans le générique final.
Acte premier : le grand remue-ménage, qui fait plancher tout le monde, en évitant au passage les sujets qui fâchent, comme le nucléaire.
Acte deux : la grand-messe. Les mots prononcés s'inscrivent dans le registre de la grande histoire : « Je veux que le Grenelle soit l'acte fondateur d'une nouvelle politique, d'un new deal écologique en France, en Europe et dans le monde » disait le Président de la République. Rien que cela !
Acte trois : la loi-cadre qui rappelle les objectifs, eux-mêmes compatibles avec les engagements européens. Là encore, cela ne mange pas de pain : lorsque vous accrochez un cadre, le critique d'art reste circonspect, il attend le dessin, la peinture ou la photo pour commenter ; il fallait attendre la suite. La suite se fit d'ailleurs un peu désirer.
Acte quatre, le Grenelle 2, que l'on pourrait appeler la loi « boite à outils ». De ce côté-là, on ne fut pas déçu. Des dizaines et des dizaines d'articles, plusieurs codes revisités, et – c'est là où le bât blesse –, au moins deux cents décrets d'application. M. Borloo n'était pas loin de la vérité lorsqu'il a qualifié cette loi de « cathédrale ». La cathédrale de M. Borloo, c'est au mieux un véritable labyrinthe, avec ses fameux deux cents décrets d'application donnant parfois l'impression de chercher à noyer le poisson ; au pire, c'est une cathédrale de sable, à l'image de ces sculptures éphémères qui disparaissent avec la vague. Disons-le tout net : depuis le Grenelle, vous n'avez cessé de le défaire et de le détricoter, atteints que vous êtes d'une espèce de complexe de Pénélope.
Les exemples ne manquent pas. Pour améliorer notre bouquet énergétique, la question des énergies renouvelables est essentielle, et même déterminante. Or vos atermoiements ont eu une conséquence très simple en la matière : nous n'atteindrons pas les objectifs du Grenelle, qui reprennent pourtant des engagements européens. En 2010, notre consommation d'électricité aurait dû provenir pour 21 % d'énergies renouvelables. Cette part n'a atteint que 14,6 %, soit le même niveau qu'en 1997. Quant à la production de chaleur d'origine renouvelable, elle devait augmenter de 50 % en 2010 par rapport au niveau de 2005, comme le prévoyait la loi de programme de juillet 2005, mais elle n'a finalement progressé que de 28 %, comme le rappelle le bilan énergétique de la France en 2010.
Pourquoi en sommes-nous arrivés là ? Parce que l'éolien terrestre et le photovoltaïque ont été les bêtes noires du Gouvernement. L'ambitieux et nécessaire objectif de porter la part des énergies renouvelables à 23 % de la consommation d'énergie à l'horizon 2020 ne pourra être atteint sans un fort déploiement de l'éolien terrestre. Le lancement de l'éolien en mer, même s'il faut s'en féliciter, ne le compensera pas. D'ailleurs, les objectifs sont bien distincts : pour l'éolien terrestre, il s'agit de passer de six gigawatts aujourd'hui à dix-neuf gigawatts à l'horizon 2020. Nous en sommes à une puissance installée de 1 100 mégawatts par an, alors qu'il faudrait au moins 1 400, voire 1 500 mégawatts par an pour atteindre les 19 000 mégawatts en 2020. Ce n'est pas gagné : il est plus difficile d'ouvrir un parc éolien terrestre aujourd'hui qu'hier ; la filière est perturbée, les investissements ralentis.