Quant à la situation de nos ports, monsieur le ministre, je vous ai dit en commission combien l'absence de politique résolue en matière de dessertes terrestres était pénalisante.
Comment ne pas voir que les assises du ferroviaire ont pour objets la fuite en avant en matière de concurrence et la casse du statut des cheminots ?
Ainsi, le plan fret consacre l'abandon du wagon isolé et un report modal estimé à un million de camions. Avec 2,5 milliards d'euros de crédits, RFF va devoir à la fois régénérer le réseau, construire des lignes nouvelles et subir une dette de 27 milliards d'euros qui devrait encore croître avec les projets en cours. Vous en faites supporter les conséquences à la SNCF par un accroissement inconsidéré des péages ou encore par le passage de 75 à 155 millions d'euros en 2012 de la taxe sur le résultat des entreprises ferroviaires, qui, évidemment, est principalement à la charge de l'entreprise nationale.
Les effets sur le fret de l'ouverture à la concurrence sont visibles : nous sommes passés de 46,9 milliards de tonnes par kilomètre en 2004 à 16,9 milliards en 2010.
Que dire du schéma national d'infrastructures de transport ? M. Mariton l'affirmait en quelque sorte tout à l'heure : l'exercice est dénué de toute crédibilité faute de priorisation des projets et surtout de financements dédiés. 260 milliards sur trente ans, c'est tout simplement irréaliste sans même tenir compte de la crise que nous traversons actuellement.
Vous évoquez les partenariats public-privé, qui offrent au privé une belle rente au détriment des finances publiques. La LGV Tours-Bordeaux en est un parfait exemple. Mais il n'y aura pas de politique ambitieuse des transports sans maîtrise publique, fondée sur des financements pérennes, non soumis à la pression des marchés financiers.
La nécessité d'une politique ambitieuse nous amène à vous faire trois propositions.
Tout d'abord, la création d'un « versement transport régional », permettant aux régions de province de disposer d'une ressource propre ; je développerai ce point dans le cadre d'un amendement.
Ensuite, une maîtrise publique des sociétés d'autoroutes, avec affectation des ressources dégagées aux financements des infrastructures favorisant le report modal. Cette proposition est portée par mes amis du Sénat, vous la retrouverez lorsque vous défendrez votre budget devant eux. Rappelons que le bradage scandaleux que vous avez consenti aux sociétés d'autoroutes permet aux opérateurs privés de réaliser aujourd'hui deux milliards d'euros de bénéfices par an sur un chiffre d'affaires de huit milliards. Qui dit mieux ?
Enfin, nous vous proposons la création d'un livret défiscalisé, dédié au financement des infrastructures de transport, sur le modèle du livret A. C'est l'objet d'une proposition de loi que je viens de déposer. Les fonds partiellement centralisés par la Caisse des dépôts et consignations seraient disponibles pour des prêts à très long terme, pour le financement des projets retenus au SNIT et des investissements réalisés par les collectivités territoriales pour améliorer les performances des réseaux de transport.
Votre projet de budget est loin de cette ambition, nous ne le voterons évidemment pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)