Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à l'heure où la France doit se fixer comme objectif intangible la réduction de ses déficits, il faut faire preuve de responsabilité et penser à l'avenir. Nous approuvons par conséquent le choix du Gouvernement de maîtriser les dépenses publiques puisqu'il permet dans le même temps de respecter ses priorités, aussi bien en matière de recherche, d'enseignement supérieur, de politique sociale, qu'en ce qui concerne les missions régaliennes de l'État. C'est du reste dans ce contexte financier contraint que le Gouvernement a tenu sa promesse d'accorder aux étudiants un dixième mois de bourse.
Nous en sommes convaincus, il est important que les universités conservent les moyens de construire leur budget sans toucher à la pédagogie ni aux politiques transversales en faveur des étudiants. Or ce budget le permet.
Je profite de l'occasion qui m'est offerte pour souligner une anomalie dont les effets négatifs sont considérables : les vingt écoles nationales supérieures d'architecture font partie des rares formations de l'enseignement supérieur qui ne relèvent pas du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, puisqu'elles sont sous la tutelle directe du ministère de la culture après un bref rattachement au ministère de l'équipement.
Il en résulte un statut un peu à part au sein de l'enseignement supérieur et surtout un manque de financement évident. Ainsi, l'AERES, dans sa dernière évaluation, a pointé le niveau très faible des ressources financières propres de l'école d'architecture de Paris-Belleville.
Autre chiffre frappant : l'État a consacré l'année dernière à un étudiant en école d'architecture 6 800 euros par an, soit 13 % de moins que l'année précédente. Autrement dit, l'État consacre cinq fois moins d'argent pour former un architecte que pour former un ingénieur, et trois à quatre fois moins que la moyenne européenne pour l'enseignement de l'architecture, alors que la France compte moitié moins d'architectes, que la demande de nouveaux architectes se fait massive et que les départs à la retraite dans ce secteur sont très nombreux.
Depuis le rattachement des écoles nationales d'architecture au ministère de la culture, aucun acquis d'envergure n'a été obtenu ; les enseignants, dont les grilles d'avancement n'ont pas été modifiées depuis l'époque où lesdites écoles relevaient du ministère de l'équipement, se sentent méprisés par leur tutelle. L'enseignement lui-même n'est pas conçu comme un service public prioritaire et stratégique, mais comme une charge administrative supplémentaire, étrangère aux soucis du ministère.
Pourtant, 15 000 étudiants sont concernés, qui ont des problèmes propres à leur situation, qu'il s'agisse des bourses, des moyens d'étudier, des budgets de fonctionnement ou même des questions relatives aux PRES.
Il existe en particulier un vrai problème : l'application de la réforme LMD aux écoles d'architecture. Il serait utile que votre ministère ouvre des négociations pour que celles-ci puissent enfin délivrer de vrais diplômes universitaires.
Son actuel rattachement institutionnel place l'architecture dans une situation baroque : elle est rattachée à la direction du patrimoine alors qu'elle traite d'enjeux urbains, territoriaux et environnementaux.
Soit l'on considère les écoles d'architecture comme des établissements de formation, relevant donc normalement du ministère de l'enseignement supérieur, soit l'on tient compte du domaine dans lequel vont évoluer ces futurs architectes, et il faut les rattacher au ministère dont relèvent l'urbanisme, l'aménagement, la construction et l'habitat.
Il est évident que la dissolution de l'architecture dans une direction soucieuse du patrimoine, et celle des écoles d'architecture dans un ministère qui n'a pas vocation à traiter d'enseignement supérieur, de recherche et de construction, aboutissent aujourd'hui à affaiblir l'enseignement de l'architecture.
Face à cette crise, pourquoi ne pas organiser des états généraux de l'enseignement de l'architecture afin de promouvoir la réorganisation de ce secteur qui se sent délaissé ? Je plaide, monsieur le ministre, pour un grand ministère de l'éducation nationale ayant sous sa responsabilité tout l'enseignement supérieur.