Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour la cinquième année consécutive, le budget de la mission « Recherche et enseignement supérieur » est en augmentation, et c'est un effort qu'il convient de saluer. En effet, les crédits de paiement connaissent une nouvelle progression de 200 millions d'euros et les crédits destinés spécifiquement à la recherche sont en progression de 19,1 % par rapport à 2007. La part des dépenses consacrées à la recherche par rapport au budget général de l'État se situe à un niveau très élevé puisqu'elle est passée de 4,38 % en 2007 à 4,77 % dans le projet de loi de finances pour 2012.
Si cette évolution est très appréciable, particulièrement dans le contexte actuel, je souhaiterais néanmoins évoquer certaines difficultés budgétaires rencontrées par les organismes de recherche et dresser un premier bilan du programme « Investissements d'avenir ».
S'agissant, en premier lieu, des grands organismes de recherche, je voudrais commencer par souligner deux mesures très positives contenues dans ce projet de loi de finances.
Il s'agit, d'une part, de l'augmentation à hauteur de 19,5 millions d'euros des crédits destinés aux très grandes infrastructures de recherche au profit du CNRS et du CEA. Ce soutien financier de l'État est vital car les programmes qui leur sont liés, essentiels à la recherche française et européenne, occupent une part croissante des budgets d'équipement et d'investissement des organismes de recherche : cette part atteint ainsi 30 % au CNRS.
Il s'agit, d'autre part, de la poursuite du plan « Cancer 2 » porté par l'INSERM, lequel bénéficie d'une dotation supplémentaire de 3 millions d'euros.
Par ailleurs, monsieur le ministre, pouvez-vous nous confirmer que les établissements publics scientifiques et technologiques continueront de bénéficier en 2012 de taux réduits de mise en réserve, soit 0,25 % de la masse salariale et 3 % des dépenses de fonctionnement et d'investissement ?
J'en viens à présent à un axe important de ce projet de loi de finances : la poursuite des économies de fonctionnement demandées aux organismes de recherche, pour un montant total de 23 millions d'euros. L'impératif budgétaire justifie pleinement les économies demandées et les organismes en sont parfaitement conscients. Je tiens d'ailleurs à rendre hommage à l'esprit de responsabilité dont ils font preuve.
Plusieurs d'entre eux ont appliqué au cours des dernières années des plans très rigoureux de maîtrise des dépenses. Citons deux exemples : le CEA, qui a réduit les dépenses de fonctionnement par salarié de 20 % entre 2007 et 2011 ; le CNES, qui a réduit ses dépenses de fonctionnement de 67 millions d'euros entre 2005 et 2010.
Si le principe de ces mesures d'économie ne souffre pas de discussion, les modalités de leur application sont certainement perfectibles. Il me paraît important, monsieur le ministre, d'accorder une attention particulière aux situations individuelles et aux efforts de gestion déjà réalisés. Mieux encore, les efforts de réduction des dépenses devraient être encouragés et récompensés par la modulation de la subvention de l'État.
Ce n'est pas encore suffisamment le cas. Ainsi, malgré les efforts accomplis, le CEA s'est vu imposer 8,2 millions d'euros d'annulations de crédits en 2011, alors qu'il devra prélever 45 millions d'euros sur la subvention de l'État pour financer la construction du réacteur Jules-Horowitz.
IFP Énergies nouvelles, quant à lui, connaît une situation financière préoccupante. La dotation de l'État a en effet diminué de 40 % sur la période 2002-2012 alors que l'établissement applique à la lettre les préconisations issues de l'audit RGPP, qu'il s'agisse de l'augmentation des ressources propres, de la diminution des charges d'exploitation ou de la maîtrise des dépenses de personnel.
Je vous remercie également d'accorder une attention particulière à l'INRIA, l'Institut national de recherche en informatique et en automatique, qui est l'un des premiers organismes mondiaux dans le domaine de l'informatique et qui doit assurer la pérennité de ses trois nouveaux centres, lesquels emploient plus de 1 100 personnes. Alors que le numérique constitue l'une des trois priorités de la stratégie nationale de recherche et d'innovation, il me semble que la situation de cet organisme devrait être reconsidérée.
Une autre question préoccupante pour les organismes de recherche est celle du remboursement des crédits accordés au titre du plan de relance.
Plusieurs établissements ont exprimé leur surprise de constater que ces crédits étaient en réalité des avances remboursables. Les modalités de remboursement des fonds mériteraient d'être précisées. Elles prennent en effet la forme d'une diminution de la base de la subvention versée par l'État, opération qui, consolidée à chaque exercice, risque d'entraîner une diminution structurelle des subventions.
Monsieur le président, monsieur ministre, mes chers collègues, permettez-moi à présent d'évoquer l'une des réalisations les plus symboliques des réformes engagées au cours de ces dernières années, je veux parler du programme « Investissements d'avenir ».
Il s'agit d'un dispositif remarquable, tant par sa philosophie que par les moyens engagés, qui s'élèvent à 20,6 milliards d'euros, hors opération campus, pour la recherche et l'enseignement supérieur. On constate d'ailleurs que les organismes sont très nombreux à répondre aux appels à projets : plus de 800 dossiers ont été déposés lors de la première vague et 220 ont été sélectionnés. C'est un moyen inespéré pour les laboratoires de conférer une véritable reconnaissance internationale à leurs projets les plus innovants. Le programme est d'ores et déjà devenu une composante essentielle des ressources des établissements.
Toutefois il doit être simplifié, consolidé et financièrement ajusté.
Simplifié, tout d'abord. Je sais, monsieur le ministre, que vous avez déjà considérablement allégé certaines procédures – je pense aux laboratoires d'excellence –, mais il y a encore des progrès à accomplir car le coût de la demande d'un investissement d'avenir demeure élevé. Les organismes les plus impliqués dans les appels à projets passent trop de temps à remplir les dossiers et cela au détriment de leur productivité. Avant toute chose, il faut libérer du temps pour les chercheurs.
La simplification passe aussi par une meilleure coordination des initiatives locales. Le programme « Investissements d'avenir » a donné naissance à de nouvelles structures comme les instituts de recherche technologique, les instituts d'excellence en énergies décarbonées ou les sociétés d'accélération du transfert de technologies. Or, il existe souvent à proximité un institut Carnot, un pôle de compétitivité ou une technopole régionale. Il faut donc veiller à la cohérence de l'ensemble.
Enfin, l'information à destination des PME doit être améliorée afin que ce formidable outil soit mis à la portée de tous.
Le programme doit en outre être consolidé.
Il faut d'abord encourager l'Agence nationale de la recherche à moderniser ses procédures de gestion et d'évaluation. Il faut également lui assurer suffisamment de moyens pour lui permettre de gérer une enveloppe de près de 19 milliards d'euros.
Il convient également de s'assurer qu'il répond à sa fonction originelle, qui est le financement de projets nouveaux et innovants. Il ne doit pas se substituer au financement par le budget général de l'État de programmes de recherche préexistants – je pense en particulier aux très grandes infrastructures de recherche.
Enfin, le programme doit être financièrement ajusté. L'ANR ne prend en charge que 4 % des coûts de fonctionnement supportés par les EPST. Or, il est à craindre que ce seuil soit largement dépassé. Par ailleurs, l'assiette du financement ne prend en compte que le coût marginal de l'opération. À titre d'exemple, les recettes du CNRS liées aux contrats ANR ne représentent que 35 % de la charge réellement supportée, ce qui contraint l'organisme à prélever 20 millions d'euros sur la subvention de l'État. Cette difficulté me paraît justifier la réalisation d'un audit permettant de calibrer au mieux l'ajustement à réaliser.
Enfin, je tiens à vous remercier, monsieur le ministre, pour votre engagement en faveur du secteur spatial. Le lancement réussi de Soyouz, le 21 octobre dernier, parachève une année 2011 exceptionnelle pour le CNES. Les défis qu'il doit relever seront, vous le savez, encore plus importants en 2012 avec les lancements attendus de sept Ariane 5, de deux Soyouz et du premier Vega. C'est pourquoi je vous demanderai d'épargner au CNES, autant que faire se peut, les annulations de crédits sur le programme multilatéral car elles risqueraient de compromettre le respect de ses engagements européens.
Par ailleurs, nous avons l'opportunité unique de contribuer à l'émergence d'une nouvelle filière industrielle : je veux parler des télécommunications satellitaires à haut débit. Sur ce dossier également, nous avons besoin de votre soutien.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, lors de sa réunion du 18 octobre dernier, la commission des affaires économiques a émis un avis favorable à l'adoption des crédits relatifs aux grands organismes de recherche. Je demande aujourd'hui à notre assemblée de se prononcer dans le même sens. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)