Alors que nous sommes plongés dans une crise qui a des conséquences terribles pour l'emploi puisque, toutes catégories confondues, le nombre des demandeurs d'emploi n'a jamais atteint un tel niveau dans notre pays, nous aurions pu nous attendre à ce que la priorité soit mise sur l'emploi. Or il n'en est rien : ce budget accuse une baisse historique de 1 387 millions d'euros, sans qu'aucune stratégie nouvelle ni aucun axe fort ne se dégagent.
Bien sûr, il faut sauver notre triple « A ». Reste que ce budget est injuste, inefficace et insincère.
Il est injuste parce qu'il met fin au dispositif d'allocation équivalent retraite et au dispositif d'allocation de fin de formation, qui s'adressent à des publics ayant des difficultés d'accès à l'emploi. Et comme environ 1 million de personnes vont prochainement se retrouver en fin de droits, l'extinction de ces deux dispositifs aggravera encore la situation.
Il est injuste encore parce qu'il réduit de 43 % le Fonds de solidarité qui finance, entre autres, l'allocation de solidarité spécifique (ASS). Les personnes ne pouvant plus bénéficier de l'allocation équivalent retraite vont basculer sur celle-ci ou, si elles ne peuvent y prétendre, se retrouver en fin de droits.
Enfin, il est injuste pour les seniors. Alors que le chômage de ceux-ci explose, le Plan seniors ne représente que 20 millions d'euros.
Il est inefficace parce qu'il ne répond à aucune stratégie. Pierre Méhaignerie a parlé du secteur industriel, qui rencontre en effet des difficultés. Mais il n'est pas le seul dans ce cas. Ainsi, pour la première fois depuis dix ans, le secteur associatif perd des emplois ; je pense en particulier à l'aide à domicile. Il conviendrait d'y réfléchir.
Arnaud Richard a ouvert le dossier de l'amélioration du service public de l'emploi. Tout le monde sait que Pôle emploi ne fonctionne pas de façon satisfaisante – le ministre s'est d'ailleurs invité hier à son conseil d'administration. De mon côté, j'ai cru comprendre que l'on attendait le nouveau directeur général. J'ai toujours défendu la territorialisation, mais il serait temps maintenant de passer à l'action. Comme pour les maisons de l'emploi, votre politique manque de lisibilité.
Paradoxalement, vous maintenez l'Établissement public d'insertion de la défense (EPIDe) dont le coût de revient est de 37 000 euros par jeune suivi, ce qui justifierait la création d'une mission d'information sur la façon dont il fonctionne. Le fait que son directeur général ait été limogé du jour au lendemain sans que l'on sache pourquoi prouve, s'il en était besoin, que cet établissement rencontre des difficultés. Il serait donc utile de se pencher sur la question. De la même façon, vous maintenez le contrat d'autonomie, dont l'efficacité n'est toujours pas établie.
Enfin, ce budget est insincère.
D'abord, il est prévu autant de contrats aidés que l'an passé, mais avec 135 millions d'euros en moins pour les réaliser. Il me semble même qu'au cours de l'année 2011, on avait rajouté de l'argent sur ces contrats.
Ensuite, il n'y aura pas de quoi financer l'allocation de solidarité spécifique pendant toute l'année.
Je remarque par ailleurs, et j'y reviendrai en séance, que la ponction du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels devient systématique, ce qui risque de lui créer des difficultés de trésorerie.
On ne sait pas non plus comment l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) finira l'année, financièrement parlant. De la même manière, Pôle emploi se voit contraint à une sorte de déficit récurrent.
Non seulement il n'y a pas suffisamment de crédits pour assurer les politiques indiquées, mais les déficits sont transférés sur les opérateurs satellites. C'est habile, par rapport à l'objectif de contenir le déficit de l'État, dans la mesure où ces déficits ne seront pas comptabilisés au plan européen. Reste que ces déficits cumulés, que l'on peut estimer entre 500 et 700 millions d'euros chaque année, seront bien là et viendront fragiliser les opérateurs.
Il est inquiétant de constater la forte baisse de ce budget 2012, avec lequel on ne sait pas comment on pourra préparer le second semestre, mais qu'il faudra bien préparer, quoi qu'il se passe au premier semestre.
En dernier lieu, on nous annonce que le budget que nous sommes en train de préparer est d'ores et déjà caduc. Devons-nous nous attendre à des baisses supplémentaires ?