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Intervention de François Baroin

Réunion du 17 octobre 2011 à 17h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2011

François Baroin, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie :

On reviendra sur la surveillance. Je l'ai dit et répété en commission, mais je répondrai avec la même sincérité à vos questions.

Le resserrement de l'accès aux liquidités observé sur les marchés en 2008 a grandement fragilisé ce modèle, c'est le moins que l'on puisse dire ! C'est la raison pour laquelle les États belge, français et luxembourgeois sont intervenus à cette époque, pour permettre à Dexia de franchir ce cap difficile. Ils ont renforcé son capital et ont apporté leur garantie. Dans ces circonstances, l'équipe dirigeante de la banque a été profondément renouvelée et a pris les décisions nécessaires dans un esprit de responsabilité. Avec l'appui des États et sous le contrôle de la Commission européenne, cette nouvelle équipe a réduit significativement la taille du groupe. Son action a permis de diminuer le besoin de financement à court terme de 164 milliards d'euros et d'abaisser fortement l'encours de financement auprès des banques centrales. La cession d'actifs non stratégiques a contribué, en moins de trois ans, à réduire le bilan de 651 à 518 milliards d'euros. Enfin, depuis cet été, la banque a cédé les 15 milliards de dollars qu'elle avait investis dans des subprimes américains, comme on le sait les actifs les plus risqués. Toutefois, la crise de la zone euro cet été n'a pas laissé à l'équipe dirigeante de Dexia le temps de mener cette restructuration indispensable à son terme.

Deux éléments ont particulièrement affecté le groupe depuis le début de l'été 2011 : d'une part, on craint pour sa solvabilité du fait de son exposition aux risques souverains, alors même que Dexia détient des actifs de qualité et, d'autre part, les conditions de marché plus défavorables ont dégradé de 20 milliards d'euros sa situation de liquidités. Face à cette réalité, les Gouvernements belge, français et luxembourgeois soutiennent le schéma proposé par Dexia pour lui permettre de stabiliser au plus vite sa situation. Alors que la situation de liquidités se détériorait chaque jour davantage, Dexia a voulu restaurer la confiance auprès de ses investisseurs, de ses clients et de ses créanciers. Son plan nécessite une garantie de refinancement des trois États.

Cette garantie figure au I de l'article 4 du projet de loi que vous examinez aujourd'hui. Quelles en sont les modalités ? La garantie est partagée entre les trois États. Selon la clé de répartition établie en 2008 et qui reste inchangée, la Belgique en assumera 60,5 %, la France 36,5 % et le Luxembourg 3 %. La garantie portera au maximum sur un montant de 90 milliards d'euros au total, soit, pour la France, un plafond de 32,85 milliards d'euros. C'est principalement la dette nouvellement émise qui sera garantie pendant une durée limitée à dix ans. Une partie des 90 milliards d'euros sera utilisée pour rembourser la dette garantie dans le cadre du programme de 2008. Le Gouvernement souhaite aussi garantir une part de la dette existante, pour un montant limité. Je précise également que nos trois gouvernements n'envisagent pas de garantir des titres dont la maturité serait supérieure à dix ans, bien que la loi ne fixe pas la durée maximum de la dette garantie. Et, comme en 2008, l'État n'accordera pas, bien entendu, cette garantie à titre gracieux. Elle sera tarifée selon des modalités conformes aux règles européennes.

Autre question que l'on est en droit de se poser : à quoi servira cette garantie de financement ? D'abord, elle permettra à Dexia de réaliser son plan de restructuration ordonnée, qui se déclinera en trois opérations d'envergure. La filiale Dexia Municipal Agency sera adossée à la Caisse des dépôts et consignations, qui en aura la responsabilité et la gestion. Pour assurer la pérennité des financements aux collectivités locales, un consortium formé par la Caisse des Dépôts et La Banque Postale sera créé. Deuxième opération d'envergure, l'État belge fera une offre de rachat de Dexia Banque Belgique. Enfin, troisième opération d'envergure, Dexia engagera la négociation avec le Luxembourg et un investisseur international pour la cession de sa filiale, la Banque internationale à Luxembourg.

J'en viens maintenant à la question de la garantie des prêts structurés aux collectivités locales détenus par Dexia. Vous vous posez, sur ce point, de bien légitimes questions. Il s'agit des produits les plus complexes dont l'encours est de 10 milliards d'euros. La Caisse des Dépôts a souhaité être protégée par Dexia contre les risques que ces prêts pourraient représenter. Dans la mesure où ces prêts concernent des collectivités locales françaises, nos partenaires belge et luxembourgeois ont souhaité limiter leur participation à cette charge. C'est pourquoi la France a proposé de garantir cet engagement de Dexia vis-à-vis de la Caisse des dépôts, selon des modalités qui permettent d'en limiter les conséquences pour l'État.

Autre question : Comment fonctionnera cette garantie ? Elle interviendrait au-delà d'une franchise de 500 millions d'euros. Au-delà de ce montant, 70 % des pertes seraient à la charge de l'État et 30 % resteraient à la charge de Dexia. Cette garantie donnée par l'État sera, bien sûr, rémunérée.

Ce dispositif concernant les prêts structurés témoigne de l'engagement déterminé du Gouvernement en faveur des collectivités locales et de l'avenir de leur financement, engagement qui est au coeur de ce projet de loi de finances rectificative.

La première opération du plan de restructuration de Dexia annoncé le 10 octobre en est un bon exemple. Il s'agit avant tout d'offrir à nos collectivités locales un nouvel acteur public solide, familier, qui leur fournira des produits de crédit simples et transparents. C'est ce qu'elles attendent. Elles souhaitent également que le marché des prêts aux collectivités locales soit stable, les interrogations sur Dexia ayant diminué leurs capacités à emprunter pour financer leurs programmes d'investissement. Cette opération devrait permettre de revenir dans les semaines qui viennent à un système normal.

Cette société commune, spécialisée dans le financement des collectivités locales, créée par la Banque postale et la Caisse des dépôts, sera opérationnelle dans les prochains mois.

D'ici là, comme l'a annoncé le Premier ministre, un dispositif temporaire de financement sur fonds d'épargne a été ouvert, à hauteur de 3 milliards. Il permettra de prévenir tout manque éventuel de liquidités sur le marché des collectivités locales françaises.

Ce projet de loi de finances rectificative vous est soumis dans des délais extrêmement contraints, j'en suis conscient. Au nom du Gouvernement, je vous renouvelle mes remerciements pour votre grande disponibilité.

Adopter ce collectif, c'est faire preuve de responsabilité. Les clients de Dexia, comme ses créanciers, doivent avoir la certitude que les États respecteront leur parole. Nos collectivités, pour leur part, doivent pouvoir s'appuyer sur ces dispositifs pour poursuivre leurs investissements au bénéfice de l'activité économique et du développement durable des territoires. Enfin, Dexia doit revenir rapidement sur les marchés financiers dans de bonnes conditions. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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