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Intervention de Luc Oursel

Réunion du 12 octobre 2011 à 10h00
Commission des affaires économiques

Luc Oursel, président du directoire d'Areva :

Je tiens à remercier la Commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale pour l'intérêt qu'elle porte à la question de l'énergie et particulièrement à Areva.

Nous avons récemment créé une direction des affaires publiques dont la mission est, notamment, de répondre aux questions que vous pourriez avoir à lui poser.

En ce qui concerne le domaine de l'énergie renouvelable, Areva poursuit son action dans son domaine à travers le lissage de ses investissements. Les domaines concernés sont : l'énergie éolienne off shore, l'énergie solaire par concentration et la biomasse. Depuis trois ans, Areva procède à l'acquisition d'entreprises ; il s'agit de transformer ses acquisitions en réussites. En ce qui concerne l'énergie éolienne off shore, elle a un bon avenir en Europe et Areva est présente en Allemagne, en mer du Nord. Un appel d'offres est actuellement en cours en France, auquel Areva candidate. S'agissant d'éventuelles capacités industrielles, nous sommes en attente de la décision du Gouvernement, car il n'y a pas de besoins de capacités supplémentaires à ce jour en France. Le cas échéant, nous pourrions nous tourner vers la Grande-Bretagne.

Au sujet de la compétitivité des diverses sources d'énergies, j'observe qu'un EPR produit un kilowatt-heure au prix de 50 à 60 euros. De son côté, l'éolien offshore produit le même kilowattheure pour 130 à 150 euros. La question n'est pas d'opposer le nucléaire au renouvelable mais bien de les considérer comme complémentaires, cela d'autant plus que l'énergie renouvelable peut n'être qu'intermittente. Le Danemark, par exemple, produit 30 % de son électricité grâce à l'énergie éolienne ; les 70 % restants se répartissent entre des importations depuis la Norvège ou la Suède, qui lui fournissent de l'électricité provenant de centrales nucléaires ou hydroélectriques, et de la production nationale dans des centrales à gaz. Les émissions par kilowattheure du Danemark sont 70 % plus élevées que la moyenne des autres pays européens, pour un prix de l'électricité plus élevé. Cela montre qu'il convient de rester prudent et de privilégier la diversification des sources de production d'énergie.

Dans le domaine du nucléaire, notre stratégie est bien tributaire d'un avant et d'un après Fukushima. Il ne s'agit pas d'une remise en cause du nucléaire mais d'une réflexion accompagnée d'un ralentissement des demandes. De fait, les besoins du marché ne sont pas immédiats. Aussi Areva réfléchit à l'utilité pour le groupe du maintien de certaines activités. Notre stratégie demeure celle de la production depuis la mine jusqu'aux réacteurs. Cela a été confirmé par le Conseil de la politique nucléaire de février 2011. Notre filiale minière est détenue à 100 % par le groupe. À l'avenir, une réflexion est en cours au sujet de l'entrée de partenaires dans cette filiale par le biais de partenariats industriels notamment. La question est bien celle du niveau de notre ambition minière. Pour l'établir, il faut évaluer l'évolution des besoins en tenant compte de la fin du nucléaire en Allemagne et de la baisse de la production constatée au Japon. Nous maintenons un outil pour demeurer leader dans la fourniture de minerais bruts. Afin d'asseoir notre crédit auprès de notre client, nous avons l'obligation de diversifier géographiquement nos sources de production.

Les relations entre Areva et EDF se caractérisent par la mise en présence de deux grandes entreprises fortes, aussi nos débats sont-ils intenses. Il est, au demeurant, préférable que ces débats n'aient pas lieu dans la presse. S'agissant de l'accord sur l'EPR, EDF construit à Flamanville et Areva en Finlande. Ce manque de coordination constituait une perte de temps ; nous comptons désormais faire travailler nos ingénieurs ensemble. J'ajouterai toutefois que nos relations avec EDF sont complexes puisque nous sommes tour à tour fournisseur, partenaire, et concurrent, ce qui nous oblige à faire preuve de subtilité.

Nos démarches d'implantation dans les Émirats Arabes Unis nous ont mis en concurrence avec la Corée qui propose un matériel plus ancien mais moins coûteux. L'équipe française a tardé à proposer un programme structuré, et s'est pénalisée elle-même. Cette expérience montre qu'il faut, avant tout, réfléchir à la demande du client : que veut-il ? Il s'agit de s'adapter cas par cas et non pas de faire de la théorie. Au demeurant, l'EPR n'est pas le seul réacteur au monde. Areva est actuellement en discussion avec le Japon comme avec la Chine pour la construction d'un réacteur 1 000 mégawatts en partenariat avec EDF. Il s'agit d'établir une réflexion commune et convergente pour un produit qui n'existe pas encore mais saura trouver sa place sur le marché.

Les difficultés rencontrées par l'EPR en Finlande et à Flamanville ont été évoquées par un certain nombre des commissaires présents. Il ne s'agit pas de questions liées à un prototype mais bien à une tête de série. Il n'y a donc pas de problèmes techniques, la question étant celle de la conduite de grands chantiers, de plus de 3 000 personnes. Cette culture avait été quelque peu perdue. Elle nécessite la mobilisation de fournisseurs offrant toutes les garanties. De leur côté, les autorités de sûreté ont aussi dû se réhabituer à ces grands chantiers. Il s'agit, pour tous les acteurs concernés, de constituer une expérience.

Les comptes d'Areva sont parfaitement transparents et certifiés par les organismes compétents. Nous avons provisionné 2,7 milliards d'euros, par rapport au 1,8 milliard initial, pour répondre aux hausses des dépenses engendrées par les retards de l'EPR finlandais. Ce provisionnement s'effectue à « coût à terminaison » : à chaque instant nous nous plaçons à la fin de la construction et nous calculons le coût complet. Ce provisionnement est par ailleurs parfaitement encadré : il est certifié par nos commissaires aux comptes et surveillé par le Conseil de surveillance. J'opposerai à M. Marc Goua la réponse suivante : nous accroîtrons les provisions dans nos comptes s'il y en a besoin, au fur et à mesure d'éventuels retards constatés sur le chantier finlandais. Sur celui-ci, nous nous rapprochons à bonne vitesse de la phase de démarrage des réacteurs.

Areva a effectivement subi un piratage informatique, mais seule la messagerie électronique a été touchée. Nous avons fait appel à l'ANSSI qui s'est révélé particulièrement efficace, nous garantissant aujourd'hui, par le biais d'un système d'alerte, une sécurité totale.

Areva a procédé à beaucoup d'acquisitions dans le domaine de l'uranium en 2007 lorsque les prix ont augmenté et que des problèmes étaient constatés au Canada. Cet actif est réévalué chaque année comme tous les autres. Nous allons tirer le bilan et demeurons déterminés à rester leader. Cela est confirmé par notre conseil financier de la fin du premier semestre.

En ce qui concerne l'accident survenu sur le site de Marcoule, on ne peut que déplorer le décès d'un employé. Ce site étant géré par EDF, celle-ci serait mieux à même de répondre à des questions. Néanmoins, il s'agit d'un site où les activités, notamment nucléaires, sont multiples. Areva a donc été directement concernée, et nous avons constaté que les plans d'intervention ont été bien appliqués et la reprise en main de la situation rapide.

Plus de 100 réacteurs nucléaires sont en exploitation aux États-Unis. Areva y a construit une véritable présence industrielle, forte de 5000 emplois. Nous sommes les leaders du nucléaire dans ce pays, où cette filière représente un chiffre d'affaires de 2,5 milliards d'euros. Nous proposons surtout des services de démantèlement, mais nous poursuivons nos efforts car une reprise du développement de l'énergie nucléaire car nous prévoyons une reprise des programmes nucléaires aux États-Unis.

Au sujet du démantèlement, Areva a construit une expertise progressive, forte de sa participation au démantèlement de centrales en Allemagne, d'installations Areva en France et du Department of Energy aux États-Unis. Areva va structurer ses compétences pour répondre à cette demande croissante, mais nous pouvons d'ores et déjà vous assurer que l'expérience nous a rassurés sur les coûts du démantèlement. Le démantèlement, pour nous, n'est pas de la théorie mais de la pratique, et nous constatons que les coûts effectivement réalisés sont proches des estimations. Par ailleurs, conformément à la loi, nous constituons un portefeuille d'actifs dédiés au financement des charges futures de démantèlement.

S'agissant de la gestion des déchets, le recyclage nous paraît constituer la bonne solution, pratiquée en Chine, au Japon et en Grande-Bretagne et en débat aux États-Unis. Le recyclage permet de tirer le meilleur parti de l'uranium tout en limitant la quantité de déchets. Les accidents de Fukushima ont montré que les piscines placées près des réacteurs étaient, à la longue, devenues des aires de stockage faute de solutions de recyclage adéquates.

En Allemagne, Areva emploie 5000 salariés, dont 40 % travaillent pour le marché allemand et 60 % pour l'exportation. Compte tenu de telles caractéristiques, nous examinons toutes les options possibles dans le cadre de notre plan stratégique.

Les accusations portées au sujet de la sous-traitance ne sont pas fondées. Nous demeurons particulièrement attentifs à la sous-traitance « en cascade ». Nos sous-traitants reçoivent la même formation que nos agents, ce qui garantit une sous-traitance qualifiée avec laquelle nous pouvons travailler de façon régulière. À cet égard, EDF affiche de nouvelles intentions. En tant que fournisseur, c'est-à-dire sous-traitant, nous nous y conformerons sans difficulté aucune.

Je vous remercie.

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