Troisième raison, de fond, celle-là : ce texte est avant tout une loi d'affichage. Elle est présentée dans les médias, auxquels elle s'adresse principalement, comme une loi d'encadrement militaire des jeunes délinquants. Or il ne s'agit pas de militaires d'active mais de militaires à la retraite. Quant aux délinquants, ils ne se sont rendus coupables que de tout petits méfaits et ils ne seraient que 200 à être concernés chaque année, ce qui est peu en comparaison des 11 000 mineurs ordinairement placés en tant que mineurs délinquants. Il ne s'agit en fait que des établissements de la « deuxième chance » de la défense nationale.
Quatrième raison : cette proposition de loi est inutile car nous aurions pu tout aussi bien mener une expérimentation après avoir donné aux écoles de la deuxième chance l'agrément qui aurait permis aux juges des enfants d'y procéder à des placements, comme cela se pratique au quotidien dans des établissements extérieurs à la justice.
Cinquième raison : cette loi est doublement incohérente. D'abord, elle a été arbitrairement extraite d'un ensemble de cinquante propositions rédigées par M. Ciotti. Ensuite, M. Bénisti avait lui aussi, en son temps, rédigé un rapport contenant soixante propositions pour répondre à la délinquance des mineurs, dont celle, très prudente, d'un encadrement. Là encore, une seule proposition en a été extraite. On peut penser ce que l'on veut de la pertinence de ces propositions, il demeure qu'en agissant ainsi, vous avez altéré la cohérence de l'ensemble.
Sixièmement, enfin, M. Dolez l'a dit, cette loi est dangereuse en ce qu'elle peut mettre en difficulté les établissements de la deuxième chance de la défense nationale, lesquels accueillent environ 2 000 majeurs volontaires chaque année et leur assurent un encadrement assez strict, inspiré des méthodes militaires, tout en faisant preuve de beaucoup de bienveillance et d'attention envers ces jeunes majeurs confrontés à l'échec scolaire, en proie à des difficultés sociales. Nous craignons que l'arrivée de jeunes mineurs qui vivront le placement dans ces établissements comme une sanction ne soit un facteur de déstabilisation et ne mette à mal une expérience qui donne d'assez bons résultats grâce au dévouement du personnel, comme ont pu le constater l'ensemble de nos collègues qui les ont visités.
Nous aurions pu accepter qu'une expérimentation soit menée, d'autant qu'il est toujours souhaitable de diversifier les lieux de placement des mineurs, mais il est impossible au groupe SRC de voter pour cette loi d'affichage, adoptée dans l'urgence et idéologiquement exploitée. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)