Et c'est ainsi qu'il n'y a jamais eu de problème…
Le bon sens voudrait que nous puissions examiner cette disposition en commission, quitte à ce que le ministère reprenne cette idée à son compte.
Enfin, il nous semble que la question des autorisations temporaires d'utilisation est loin d'avoir fait l'objet des développements qu'elle mérite. En l'état actuel, les dispositions du texte viendront restreindre l'accès de certains patients à des traitements spécifiques, ce qui n'est pas acceptable.
Nous estimons que la commission des affaires sociales n'a pas suffisamment approfondi les points qui viennent d'être évoqués et qui, à eux seuls, mériteraient une nouvelle réunion, en votre présence monsieur le ministre.
Outre ces points précis, dont les plus importants relèvent, comme vous avez pu le constater, de la prévention des conflits d'intérêts, le texte brille par ce qu'il ne contient pas et dont il conviendrait de débattre avant la séance.
Nous pensons notamment à la nécessité d'inverser la charge de la preuve dans les affaires d'accidents médicamenteux, et de prévoir une indemnisation des victimes de ces accidents. À l'heure actuelle, il est quasiment impossible pour ces victimes, ou leurs proches lorsqu'elles sont décédées, de prouver la responsabilité des entreprises qui se couvrent juridiquement derrière des notices géantes mentionnant les effets indésirables ou les contre-indications des médicaments qu'ils produisent ou exploitent.
Alors que le doute devrait profiter au patient et à l'usager, force est de constater qu'en ce domaine la transparence vaut exonération de responsabilité. Pourtant, l'on sait, comme la Cour des comptes l'a rappelé à l'occasion de son rapport sur les comptes de la sécurité sociale, qu' « une grande latitude dans la conduite des essais peut induire certains biais : tests contre placebo uniquement, comparaison avec des traitements habituellement non utilisés dans l'indication, tests cliniques sur des indications visant des populations réduites permettant des prix plus élevés, avant de les élargir à des indications beaucoup plus répandues, dosages supérieurs à ceux utilisés pour le comparateur, de façon à obtenir une efficacité significativement meilleure, sans que l'on puisse dire si la supériorité de l'effet est liée aux propriétés propres du produit testé ou à un effet dose ». Le texte vient remédier très inégalement à ces situations.
Nous considérons par ailleurs que le renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé passe inévitablement par une réforme du Comité économique des produits de santé et des méthodologies qui prévaut pour la fixation des prix des médicaments et produits de santé.
Cette réforme est concomitante de celle de la commission en charge de l'attribution des autorisations de mise sur le marché. Sans cette complémentarité dans le texte que vous nous proposez, ce dernier n'aura qu'un impact limité sur les stratégies industrielles et commerciales des entreprises du médicament, largement responsables du déficit de la branche maladie de la sécurité sociale. Cette dimension financière est trop absente de votre projet. Il vous appartiendrait, pour être cohérent, de nous proposer des évolutions en ce sens.
La création d'un pôle public du médicament et de procédures de rachat de molécules stratégiques par celui-ci pourrait constituer une base saine à notre future politique de santé publique. Voilà des dispositions qu'il appartient à un Gouvernement responsable de proposer.
Toutes ces cases vides et ces zones d'ombre s'ajoutent à toutes les faiblesses de ce texte et à votre absence dommageable et font de ce texte un rendez-vous manqué qui ne permettra pas, s'il demeurait en l'état, loin s'en faut, d'éviter un prochain scandale sanitaire dans le secteur du médicament et de la santé en général.
Cela fait, monsieur le ministre, beaucoup de raisons de renvoyer ce projet pour une nouvelle construction en commission, pour y intégrer toutes vos promesses et nos propositions constructives. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)