À la frontière allemande, le bureau de tabac de Lauterbourg réalisait en 1992 un chiffre d'affaires équivalent à 12 millions d'euros : à l'époque, les prix des cigarettes étaient plus élevés en Allemagne. Depuis, la situation s'est inversée et son chiffre d'affaires tabac a baissé à 1,1 million en 2000 et n'était plus que de 300 000 euros en 2010.
En fin de compte, si les ventes des buralistes ont baissé de 30 % depuis 2003, la baisse réelle de la consommation est plutôt de l'ordre de 10 %.
Dans ce contexte, nous souhaitons faire une dizaine de recommandations. La première est de soutenir les efforts du Gouvernement pour faire converger les prix des tabacs en France et dans les États voisins, en concertation avec ceux-ci, l'harmonisation fiscale européenne ne pouvant être que très lente, et d'un effet limité sur les prix. Ce sera long, car tous les pays n'y sont pas prêts. D'après les volumes de consommation au Luxembourg, chaque Luxembourgeois devrait fumer de sa naissance à sa mort plus d'une cartouche par jour…
D'après la Commission européenne elle-même, l'étape la plus récente de l'harmonisation des accises, avec la directive de 2010, n'a eu aucun impact sur les prix et la demande de cigarettes en France, pas plus qu'en Allemagne, en Irlande, ou au Royaume-Uni. Mais la Pologne a vu les prix augmenter de 47 % et la demande baisser de 20 %.
Les prochaines hausses de prix devront absolument s'inscrire dans le cadre du Plan cancer 2009-2013. Nous devons éviter des hausses de prix unilatérales et irrégulières.
Il faut ensuite engager une réflexion sur la fiscalité des tabacs à rouler, en vue de contrecarrer l'effet de substitution à chaque hausse des prix des cigarettes. Les tabacs manufacturés autres que les cigarettes sont soumis à un taux normal applicable à leur prix de vente au détail, bien inférieur à celui des cigarettes, et ne se voient pas appliquer de part spécifique.
Les ventes de cigarettes ont presque baissé de moitié en France en 20 ans, passant de 97,1 milliards d'unités en 1991 à 54,8 milliards d'unités en 2010, mais celles des tabacs à rouler augmentent.
S'agissant des buralistes, il faut faire une différence entre les frontaliers qui souffrent et ceux qui équilibrent leur budget. Nous proposons de valider le recentrage du troisième contrat d'avenir sur l'aide aux buralistes les plus en difficulté.
Nous voulons maintenir les restrictions prévues aux articles 575 G et 575 H du code général des impôts pour le transport de tabac par les particuliers, afin de préserver la cohérence de la politique française de lutte contre le tabagisme. S'en tenir à la notion de consommation personnelle, sans seuil précis, est irréaliste.
Une campagne nationale d'information sur les dangers de la contrefaçon serait particulièrement utile, ainsi qu'une amélioration des analyses des produits.
Affiner le marquage des paquets permettrait aussi de préciser les études sur la répartition des ventes hors réseau, qui s'appuient notamment sur le ramassage de paquets dans des lieux publics. Il existe plusieurs solutions aujourd'hui, avancées par les fabricants, ou des marquages étatiques. Un cahier des charges est en cours d'élaboration par les services de la direction générale des Douanes et des droits indirects qui imposera aux fabricants le principe d'une solution technique permettant l'identification de l'origine et l'authentification des produits.
Nous recommandons de refuser les propositions de création du paquet générique de cigarettes, ainsi que de vente sous le comptoir, qui paraissent de nature à favoriser les trafics illicites.
Pour améliorer la lutte contre la vente illicite sur Internet, nous recommandons de donner à la justice la capacité de désactiver un site suspect le temps d'une enquête et de saisir les noms de domaines des sites convaincus de pratiques illégales, même si nous savons la difficulté de viser des sites étrangers.
Les buralistes ou leurs organismes professionnels doivent être encouragés à se porter partie civile contre les acteurs des ventes illicites.
Enfin, il convient de sanctionner plus lourdement le trafic de tabac, de durcir l'arsenal répressif en la matière et d'améliorer la formation des magistrats qui seront chargés de l'instruction et du jugement de ces infractions.
En conclusion, nous souhaitons réaffirmer, avec notre attachement au réseau, que le maintien du monopole des buralistes est la meilleure protection contre les trafics ; que nous voulons une politique de santé publique efficace ; et que cela ne sera possible qu'avec une véritable harmonisation européenne. À défaut, nous serons perdants sur le triple plan fiscal, économique et sanitaire.