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Intervention de Christiane Taubira

Réunion du 6 octobre 2011 à 9h30
Hydrocarbures non conventionnels — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristiane Taubira :

À vous, madame la ministre, j'ai posé au mois de juin une question écrite portant sur la demande qui vous a été adressée par Tullow Oil – à la suite d'un incident technique, Tullow Oil demandait une dérogation pour permettre l'utilisation des boues à huile. J'attends toujours une réponse de votre part ; j'ai d'ailleurs déjà obtenu une réponse des exploitants.

Il est donc extrêmement difficile d'obtenir des informations ; j'en suis d'autant plus reconnaissante à mes collègues qui ont inclus la question du pétrole offshore dans le texte d'aujourd'hui.

Au sein de la commission de développement durable, certains députés ont prétendu qu'il y aurait une contradiction entre l'interdiction que formule l'article 1er de la proposition de loi et des amendements qui viennent par la suite, et notamment un amendement portant sur la fiscalité. Dans ce cas, je vous invite tout simplement à voter l'article 1er ! Ainsi, tout le reste tombe, n'a plus lieu d'être. Si, au contraire, vous ne votez par l'article 1er, alors les amendements ont toute leur raison d'être. Il n'y a donc absolument aucune contradiction.

Je me situe donc dans l'hypothèse, madame la ministre, où vous autoriseriez l'exploitation du pétrole offshore en Guyane. C'est une hypothèse tout à fait vraisemblable, dans la mesure où le communiqué que vous avez cosigné avec vos collègues de l'industrie et de l'outre-mer m'a donné le sentiment d'avoir été écrit par les services de communication de Shell et de Total… Un tel enthousiasme pour la découverte qui venait d'être faite, une explication de la nécessité de nouveaux forages – ce qui relève pourtant davantage peut-être de la campagne d'information de l'opérateur économique que de la puissance publique –, la mise en avant des retombées extraordinaires dont la Guyane pourrait profiter : tout cela laisse à penser, en toute logique, que vous accorderez le permis d'exploitation.

Je voudrais donc aborder, très rapidement, six sujets prioritaires.

Il y a d'abord la formation des jeunes Guyanais, qui devront pouvoir accéder à tous les niveaux de métier : cela suppose une anticipation, à laquelle l'exploitant pourrait participer ; cette question ne se pose pas au niveau du seul conseil régional, car il faudra des partenariats avec l'université, mais aussi des ouvertures de filières dans les lycées professionnels, voire des BTS.

Passons rapidement sur les infrastructures, non que le sujet soit insignifiant, mais parce que vous comprendrez facilement la nécessité de vous pencher sur les conditions de construction et d'aménagement d'infrastructures, ainsi que sur leur sécurisation.

Votre Gouvernement se flatte de favoriser le développement endogène dans les outre-mer ; or celui-ci ne peut pas venir de multinationales spécialisées dans un domaine aussi potentiellement à risque que le pétrole. Vous regarderez donc de près, je suppose, comment seront associés à ce projet les artisans, des très petites entreprises, des petites et moyennes entreprises et des prestataires de service sur place.

Je voudrais insister sur la question de la fiscalité, qui pose de sérieux problèmes à la majorité. Il faut créer une taxe régionale ; vous ferez ce que vous voulez avec l'impôt sur les sociétés, en continuant éventuellement à appauvrir l'État par des exonérations, mais il est nécessaire de créer une taxe régionale. Vous ne pourrez pas continuer à faire ce qu'ont fait tous les gouvernements depuis neuf ans, c'est-à-dire refuser tous les amendements que je propose pour la création de cette taxe, dans la mesure où l'Union française des industries pétrolières a elle-même reconnu publiquement qu'elle était tout à fait fondée, et son existence tout à fait juste.

Au demeurant, je vous alerte sur l'existence d'un précédent, sur l'or : une taxe minière forfaitaire, tout à fait dérisoire, a été créée, à la suite d'interpellations récurrentes du Gouvernement en 1994 et 1995. Pour vous donner une indication, sur un chiffre d'affaires de 32 millions d'euros l'an dernier, elle aura rapporté localement 86 000 euros !

Enfin, il y a la question de l'extension de la surface du permis. Celui-ci couvre plus de 35 000 kilomètres carrés en Guyane, sur une surface totale de 200 000 kilomètres carrés depuis l'extension du plateau continental ; Shell et Total disposent au Nigeria d'une surface de 31 000 kilomètres carrés, alors que celui-ci s'étend sur 923 000 kilomètres carrés. Ces deux compagnies ont d'ailleurs été épinglées au mois d'août dernier par un rapport du programme des Nations unies pour l'environnement : ils sont accusés d'être responsables de marées noires qui n'auraient pas été correctement traitées, et qui ont considérablement pollué le delta du Niger. Mme la présidente. Merci de conclure, madame Taubira !

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