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Intervention de Jean-Claude Viollet

Réunion du 5 octobre 2011 à 21h30
Service citoyen pour les mineurs délinquants — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Claude Viollet :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le choix de l'établissement public d'insertion de la défense pour l'accueil de mineurs délinquants pose problème, comme l'ont souligné nombre d'entre nous, toutes sensibilités confondues, lors de l'examen de ce texte par la commission de la défense nationale et des forces armées.

En effet, l'EPIDE propose à des jeunes, identifiés comme en voie de marginalisation sociale, de rejoindre, sur la base du volontariat, l'un de ses centres afin d'y suivre un cursus conjuguant apprentissage de la vie en collectivité, maîtrise des fondamentaux scolaires et formation professionnelle, et débouchant le cas échéant sur un apprentissage ou un premier emploi. Mais ces centres reçoivent uniquement de jeunes volontaires pour l'insertion qui ne sont pas ou plus sous le coup d'une décision de justice, tout simplement parce que la démarche de réinsertion d'un délinquant est de nature très différente et fait appel à des compétences que n'ont pas les personnels de l'EPIDE, notamment les anciens militaires, les armées n'accueillant pas ces publics. Devoir réinsérer des mineurs délinquants ajouterait encore à la difficulté, dès lors qu'ils devraient être intégrés à des structures initialement conçues pour le seul accueil de jeunes majeurs en mal d'insertion sociale et professionnelle. Ce serait de nature à déstabiliser le fonctionnement déjà fragile des centres.

Si l'EPIDE a effectivement, comme vous l'indiquez monsieur le rapporteur, la possibilité, depuis la loi du 24 novembre 2009, d'accueillir des mineurs de plus de seize ans, il ne l'a pas fait jusqu'à ce jour, faute de personnels formés, faute de l'ingénierie indispensable au lien avec les familles pour l'exercice de l'autorité parentale, mais également faute de locaux adaptés.

Une autre démarche aurait été de s'inspirer de « défense deuxième chance » pour bâtir un dispositif réservé aux mineurs délinquants, mobilisant, en sus des acteurs déjà présents dans l'EPIDE, des professionnels de la protection judiciaire de la jeunesse possédant les compétences requises.

Cette démarche aurait pu s'enrichir aussi de l'expérience de l'association « jeunes en équipe de travail » qui accueillait, jusqu'en 2002, de jeunes délinquants encadrés par des militaires d'active.

Bien entendu, resterait à traiter la question des moyens tant financiers qu'humains, qu'il s'agisse de la protection judiciaire de la jeunesse, parent pauvre d'un ministère de la justice sous-doté, comme de l'EPIDE, qui doit lui-même composer, depuis sa création, avec des crédits destinés aux contrats aidés, des crédits de l'aide au logement et des crédits du FSE. Au-delà de la question immobilière, cette difficulté explique que l'EPIDE, qui devait accueillir 20 000 jeunes à plein régime, en 2008, n'en accueille aujourd'hui guère plus de 2 000 dans ses vingt centres ouverts et peine à monter en puissance.

Voilà pourquoi nous sommes convenus en commission de la défense, encore une fois toutes sensibilités confondues, que ce texte n'était pas recevable en l'état et devait à tout le moins être retravaillé au fond, tant sur l'analyse des publics que sur les solutions coordonnées à mettre en oeuvre pour leur prise en charge.

Vous ne pouvez, monsieur le rapporteur, disqualifier cette position en affirmant, comme vous venez de le faire dans l'édition de ce jour de la revue L'Hémicycle, qu'elle aurait été prise par une commission mal informée. Et ce ne sont pas les dernières informations, qui évoquent une réduction des moyens de l'EPIDE et le non-renouvellement du contrat de son directeur, qui sont susceptibles d'infléchir notre premier jugement. Elles ne peuvent que renforcer nos interrogations au moment où vous vous apprêtez à charger un peu plus la barque. Car, s'agissant de l'avenir de notre jeunesse, notamment de jeunes en rupture, on ne saurait se satisfaire de textes de circonstance et de bricolages en tous genres, dans un positionnement partisan qui n'échappe à personne, alors que nous sommes tous attendus sur le traitement de la difficulté, pour être en capacité de faire durablement société. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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