Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, si la délinquance dans sa globalité est en repli, celle qui concerne les agressions sur la voie publique commises par des mineurs est en forte progression.
Ces jeunes, en manque de repères, désocialisés, en échec scolaire, qui ont déjà commencé à avoir des démêlés avec la justice, quelquefois pour de simples petits larcins, doivent être repris en main, encadrés et restructurés. Le but, c'est bien sûr qu'ils ne récidivent pas et qu'ils évitent l'engrenage que nous connaissons trop bien et qui aboutit inéluctablement à la prison ou au centre éducatif fermé. Tout outil pouvant permettre d'éviter cette spirale infernale doit être privilégié et encouragé.
Le rapport que j'ai remis au Premier ministre en février dernier avait déjà fait un tel constat et, parmi une soixantaine de propositions que j'avais envisagées, il y avait celle d'ouvrir les EPIDE aux jeunes de seize à dix-huit ans. J'avais d'ailleurs obtenu l'accord des dirigeants.
Nous, maires de banlieue, côtoyons au quotidien cette réalité et c'est sur le terrain que nous puisons nos constats et nos propositions. Je salue donc, avec mes collègues UMP, cette proposition d'Éric Ciotti, qui connaît bien les problèmes de délinquance car il y est confronté comme nous dans son département, mais ce n'est qu'une pierre ajoutée à l'édifice bâti depuis 2007 par la première loi sur la prévention de la délinquance, déjà fondée sur un rapport de 2005 que j'avais remis à Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'intérieur.
La création du service citoyen pour les mineurs délinquants ne sera pas la solution miracle car une telle solution n'existe pas. C'est une option supplémentaire, un nouvel outil qui peut créer un électrochoc, dans un sens positif, pour que ces mineurs prennent conscience de l'avenir qu'ils ont à construire, de leurs capacités, et trouvent une issue sociale et professionnelle grâce à un accompagnement encadré et assorti d'une formation, qui leur inculquera des valeurs souvent ignorées telles que le respect de l'autre, les règles de vie en communauté, l'effort, la citoyenneté et déjà, ne serait-ce que cela, l'estime de soi.
Nous avons entendu les critiques de l'opposition, toujours aussi dogmatique, malheureusement, sur ces questions (Protestations sur les bancs du groupe SRC), et je regrette sincèrement qu'un sujet aussi crucial pour nos jeunes ne nous réunisse pas. Plusieurs centaines de mineurs seront concernés par ce dispositif, et je suis le premier à souhaiter qu'il puisse montrer son efficacité, calqué sur celui des majeurs, et surtout monter en puissance au fil des mois, après peut-être une phase d'expérimentation nécessaire pour l'affiner.
Pensez, mes chers collègues, à la valeur d'exemplarité de ces réussites dans nos quartiers sensibles. Il faut mettre fin à cette spirale qui fait qu'un jeune sortant de prison est perçu comme un caïd par les plus jeunes. Je veux croire que la réussite de certains de ceux qui seront passés par les EPIDE leur permettra de montrer aux plus jeunes que la seule voie possible est celle de la réussite sociale, professionnelle et familiale, et que celle de la délinquance a toujours été sans issue.
Les EPIDE, créés par Michèle Alliot-Marie alors ministre de la défense, dont le taux de réussite est de plus de 80 %, voire 100 % pour certains, est une chance inouïe dont nous ne devons pas priver ces jeunes, et il est logique de faire appel à ces structures qui ont fait la preuve de leur efficacité plutôt que d'essayer de mettre au point d'autres solutions illusoires.
Je crois aussi beaucoup à une notion essentielle de ce dispositif, qui est le volontariat. Sans volonté, sans acquiescement du jeune au projet pédagogique et professionnel, rien ne peut se faire. Les peines contraignantes, même si elles sont incontournables dans certains cas, n'ont pas la même portée que ces dispositifs qui, il faut le rappeler, sont fondés sur la durée et dont le fondement essentiel est l'adhésion du mineur et de sa famille.
D'ailleurs, si les EPIDE connaissent un tel taux de réussite, ce n'est pas un hasard. C'est certes le résultat d'un encadrement porteur de valeurs et structurant, mais c'est aussi le fruit de l'engagement du jeune, de son adhésion au projet et de sa volonté de s'en sortir. Car, contrairement à ce que l'on entend, les jeunes ne vivent pas cette mesure comme une sanction mais, au contraire, comme une main tendue pour les aider à s'extirper de cette spirale dévastatrice qu'est la délinquance. Je ne vois pas pourquoi les seize-dix-huit ans seraient privés de cette chance qui peut leur être donnée. Certains d'entre eux, d'ailleurs, n'ont jamais quitté leur cité et ont toujours subi la domination de petits caïds dans des bandes où ils ont été enrôlés et dont ils n'ont jamais pu sortir.
Certains prétendent que ce n'est pas la même population qui est accueillie aujourd'hui par les EPIDE. Qu'ils m'expliquent la différence qu'ils font entre un jeune majeur déstructuré, en manque de repères, et un mineur de dix-sept ans en recherche d'identité et primo-délinquant. La réalité, mes chers collègues, c'est que quel que soit leur âge, seize, dix-huit, vingt, vingt-deux, vingt-cinq ans, ces jeunes ont les mêmes problématiques et sont tous à la recherche d'une restructuration et d'un cadre pour se réinsérer.
Les équipes qui composent les EPIDE et qui sont, je le rappelle, composées d'anciens militaires et d'éducateurs spécialisés, ont tout autant l'expérience nécessaire pour encadrer et reconstruire un adolescent que pour encadrer un jeune qui vient d'avoir sa majorité. En fait, la différence est extrêmement mince. Alors, quand j'entends dire que des militaires ne seraient pas capables d'encadrer des jeunes de seize ans car ce n'est pas leur métier, laissez-moi vous dire qu'on se moque vraiment du monde !
J'ai visité plusieurs EPIDE, comme d'autres collègues, de toutes tendances, et pour avoir discuté avec ces jeunes et constaté par moi-même le mode de fonctionnement de ces établissements ainsi que l'ambiance qui y règne, je suis convaincu que les résultats nous étonneront.
Je salue également le Gouvernement, qui a entendu ceux d'entre nous qui avaient déposé des amendements relatifs à la durée du service citoyen, déclarés irrecevables au titre de l'article 40 de la Constitution. Tout le monde s'accorde à dire qu'une période de quatre mois est nettement insuffisante. Il est important de laisser le temps à ces jeunes de se reconstruire : une période de six mois à un an me semble beaucoup plus adaptée, avec également la possibilité de poursuivre la formation si elle n'est pas terminée. L'amendement du Gouvernement adopté en commission va dans ce sens, et nous nous en réjouissons.
Au groupe UMP, nous pensons que, sur ces questions éminemment sensibles qui touchent à l'avenir de notre pays puisque nous parlons d'une certaine frange de notre jeunesse, il faut sortir des postures dogmatiques, se montrer au contraire très pragmatique, coller à la réalité du terrain et à l'évolution de cette délinquance, et surtout proposer des solutions concrètes qui permettent à ces jeunes de se réinsérer. Aujourd'hui, le taux de réinsertion des délinquants est très faible. C'est la raison pour laquelle tout dispositif permettant de l'augmenter doit être pris en considération.
Dans tous les cas, mes chers collègues, je peux vous assurer qu'au groupe UMP nous n'hésiterons pas et soutiendrons fermement cette proposition de loi…