Je souhaite dépassionner le débat, qui est un peu diabolisé.
J'apporterai tout d'abord une précision à mes collègues de la commission des affaires économiques : le vote d'un rapport en commission n'est pas un vote sur le fond, mais une autorisation à publication. Je le dis parce que nous avons eu de nombreux échanges sur les dispositions de filtrage à la suite des propositions qui figurent dans notre rapport.
Je ne renie en rien ces propositions. Je précise simplement que la proposition n° 3 ne suggère pas d'instaurer un moratoire. L'objectif est de s'interroger de façon plus précise sur la justification des mesures de blocage légales et sur les effets pervers qu'en dépit de leur légitimité apparente, elles sont susceptibles d'engendrer.
Je vous interroge donc solennellement, monsieur le secrétaire d'État, comme j'ai eu l'occasion d'interroger un autre ministre : quelles sont les mesures de blocage et de filtrage que peut prescrire un juge et quelles sont celles qu'il ne peut pas prescrire ? Il me paraît intéressant que l'on puisse aller plus loin dans la réflexion et la législation dans ce domaine parce que certaines mesures, en particulier de filtrage, sont extrêmement intrusives : je parle de technologies du type DPI. Certaines de ces mesures conduisent à des surblocages, par exemple des blocages par adresse IP, d'autres, en revanche, sont contournables mais sont peut-être efficaces dans le cas de la DGCCRF, en particulier les blocages par DNS.
Même s'il ne s'agit pas de légiférer sur une technologie, on voit qu'on laisse aujourd'hui au juge une très grande liberté dans le choix des mesures de blocage qu'il va prescrire. D'où la proposition n° 3 du rapport que nous avons remis avec Corinne Erhel, et nous souhaitons réellement que le Gouvernement avance sur ce point.
Sur le fond, la proposition n° 4 suggère d'établir une procédure unique de blocage ou de filtrage avec un recours systématique au juge.
Dans le cas qui nous intéresse, on en reste à la procédure déjà établie dans la LCEN, qui me paraît la plus équilibrée. On demande le retrait du contenu illicite d'abord à l'éditeur, puis à l'hébergeur et, si ces demandes ne sont pas suivies d'effet, parce que ni l'éditeur ni l'hébergeur ne sont en France par exemple, le juge prescrit une mesure de blocage. C'est la disposition législative la plus proportionnée et, finalement, le dispositif qui nous est proposé est un peu la procédure unique que nous appelons de nos voeux dans la proposition n° 4.
Dernier point qui me semble important : ce n'est pas un nouveau pouvoir que l'on donne au juge, c'est un nouveau pouvoir que l'on donne à la DGCCRF pour protéger les consommateurs.
Ainsi, sachant que notre volonté est d'avancer pour inscrire dans la loi ce qui doit être autorisé ou non comme type de blocage ou de filtrage prescrit par un juge, je pense que le texte de loi respecte clairement la proposition n° 4 de notre rapport.