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Intervention de Gilles Carrez

Réunion du 6 septembre 2011 à 22h00
Ouverture de la deuxième session extraordinaire de 2010-2011 — Article 1er a, amendement 181

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGilles Carrez, rapporteur général :

D'abord, je me réjouis de l'esprit de coopération du Gouvernement pour parvenir au bon réglage d'une mesure à laquelle nous souscrivons pleinement dans sa finalité, c'est-à-dire durcir la fiscalité des plus-values immobilières.

La proposition initiale du Gouvernement, telle qu'elle résulte de la lettre rectificative approuvée en conseil des ministres le 31 août dernier, posait deux problèmes.

Le premier était lié à la rapidité, pour ne pas dire la brutalité de sa mise en oeuvre. Je rappelle qu'il était prévu que le nouveau dispositif, la suppression de tout abattement, entrerait en vigueur dès les compromis de vente signés à compter du 24 août.

Sur ce point, les collègues ont été unanimes pour souligner le danger de provoquer une paralysie du marché immobilier. Si l'environnement fiscal est radicalement modifié, le réflexe naturel d'un vendeur potentiel est de différer la mise du bien sur le marché. Or ce délai provoquerait de très gros problèmes de recettes, pour l'État s'agissant de la fiscalité sur les plus-values, et pour les collectivités locales, en particulier les départements, dont les droits de mutation sont une ressource essentielle.

Pour régler ce premier problème, le Gouvernement propose, dans son amendement n° 182 rectifié , une période de transition permettant de bénéficier du régime actuel jusqu'à la signature d'actes authentiques survenant au plus tard le 31 janvier prochain. Cela va maintenir la fluidité du marché, voire le stimuler. Des transactions qui étaient encore à l'état d'intention vont peut-être se concrétiser. C'est dans l'intérêt de tous : d'une part, l'État et les collectivités locales percevront des recettes fiscales supplémentaires ; d'autre part, un afflux de biens sur le marché accélérera la baisse des prix de l'immobilier qui a commencé à s'amorcer. Je remercie donc le Gouvernement de cette proposition.

Le deuxième problème est celui des abattements. La fiscalité sur les plus-values immobilières a été appliquée en 1963 aux terrains à bâtir et étendue quelques années plus tard aux biens immobiliers. Sous tous les gouvernements et toutes les majorités, elle a toujours comporté des abattements grâce auxquels, au terme d'un délai de détention – de 30 ans, il a été porté à 32 ans, est revenu à 22 ans et est de 15 ans depuis 2004 – les plus-values sont exonérées d'impôt. Passer à une imposition perpétuelle serait une erreur. Dans notre société aux racines rurales, un bien provient souvent de la famille, voire des ancêtres. Le vendre a aussi une dimension psychologique. Il faut conserver l'exonération après un certain laps de temps. Le Gouvernement nous propose de conserver ce principe de l'abattement, mais juge que le délai de quinze ans est trop court et favorise la rétention. Il propose trente ans. La commission des finances s'était prononcée, quasiment à l'unanimité, pour vingt-cinq ans. Nous acceptons de passer à trente ans. Nous sommes donc parvenus à un dispositif parfaitement équilibré.

Beaucoup, sur tous les bancs, ont demandé comment la mesure était gagée. C'est une question importante, en effet. Distinguons ce qu'il en est pour 2011 de ce qu'il en sera ensuite en régime de croisière.

Pour 2011, la mesure sera gagée en anticipant le passage de 5 % à 10 % de la quote-part pour frais et charges liée aux plus-values sur la cession de titres de participation. De surcroît, nous allons mettre fin au régime du bénéfice mondial consolidé des groupes, et ce dès 2011 lorsqu'il n'y a pas de renouvellement d'agrément dès cet exercice : c'est encore une recette.

Enfin, la commission des finances vous proposera ensuite de voter un excellent amendement de Jérôme Chartier qui porte sur le point suivant. Ces dernières années, se sont multipliées les SCI pour des biens immobiliers très importants – du type de la villa Léopolda – afin de pouvoir en céder les parts à l'étranger, en se soustrayant ainsi aux droits de mutations et à la fiscalité sur les plus-values. Il est proposé de traiter par acte authentique, dès la promulgation de la loi, cette cession de parts de SCI, dès lors qu'il s'agit de biens immobiliers situés en France. Les recettes que cela procurera serviront aussi à compenser le manque à gagner dû au rétablissement d'un régime d'abattements.

Au passage, comme l'a proposé la commission, l'amendement du Gouvernement prévoit, pour éviter les abus, que d'ici au 1er février prochain on ne puisse pas transformer un bien détenu en propriété unipersonnelle ou en indivision en SCI. Une famille se livrant à cette opération pourrait ainsi purger la plus-value dans le cadre du régime d'exonération actuel, c'est-à-dire une exonération totale si le bien a été acquis il y a plus de quinze ans. Nous ne voudrions pas que de tels actes se multiplient dans les semaines à venir. Vous le voyez, nous prenons le maximum de précautions pour protéger la recette fiscale.

Ces dispositions fournissent un gage solide. Encore une fois, il n'est pas question que la majorité propose des amendements entraînant des pertes de recettes sans s'obliger à les gager de façon sérieuse et certaine par la création de recettes équivalentes.

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