Monsieur le ministre, je me dois de rappeler les engagements que vous avez pris en janvier 2011 après la remise du premier rapport de l'IGAS, et qui, en l'état, ne semblent pas tenus dans ce projet de loi, étant entendu que nous ignorons ce que seront les textes d'application.
Je vous cite : « Sur la police du médicament, l'une des missions essentielles de l'AFSSAPS et pour laquelle le rapport de l'IGAS est sans équivoque, le fonctionnement actuel n'est plus possible. Il y a donc une évidence : nous ne pouvons pas conserver l'AFSSAPS en l'état ». Autant dire que le changement de nom de l'agence et les quelques missions supplémentaires proposées dans votre texte ne sauraient suffire.
Je vous cite encore : « Il nous faudra davantage de mobilité pour des postes de responsabilité au sein de l'Agence. » Le texte ne contient rien à ce sujet. Cela relève sans doute du domaine réglementaire, mais nous serons attentifs aux engagements que vous prendrez à ce sujet lors du débat en séance publique.
Je vous cite toujours : « Concernant les commissions de l'AFSSAPS : leur composition : je pense qu'il faut réduire le nombre de membres pour éviter une dilution des responsabilités : trop de membres, c'est moins de responsabilités. » Or le texte ne retient pas la proposition de la mission d'information du Sénat à ce sujet. Vous venez de suggérer qu'une vingtaine de membres suffirait ; nous serons attentifs à la formalisation de cette hypothèse.
Vous disiez aussi : « Il faut aussi l'implication de personnes qualifiées dans les commissions, telles que des patients, des représentants des usagers, ou encore des membres de revues indépendantes si elles le souhaitent ». Or le texte renforce incontestablement la présence des laboratoires pharmaceutiques, fournisseurs de produits de santé, au sein du conseil d'administration de la nouvelle agence.
Vous aviez encore expliqué qu'il fallait « revoir leur fonctionnement avec une transparence des avis, avec des débats enregistrés et la publication des avis minoritaires, tout cela devant être rendu public dans un délai de 15 jours au maximum. ». Mais l'article 1er du projet se limite à ouvrir cette possibilité sans la rendre impérative ; peut-être faudrait-il être plus précis.
Vous disiez des lanceurs d'alerte qu'il fallait « préciser leur statut, leur rôle et le suivi des alertes lancées. » Le texte ne dit mot de tout cela.
Vous ajoutiez : « Faut-il se contenter lorsqu'une autorisation de mise sur le marché est délivrée pour un médicament, que celui-ci soit simplement meilleur qu'un placebo ? Cela me paraît trop simple. Il faut au minimum qu'il soit équivalent aux produits de référence déjà présents sur le marché. Il ne faut pas que le médicament soit juste un peu mieux que rien, il faut un réel bénéfice pour le patient ». Mais, ce principe n'est pas repris dans votre texte.
Vous déclariez : « Pour garantir une évaluation indépendante et de qualité, ne faut-il pas moins se reposer sur l'expertise externe et renforcer au contraire notre expertise interne ? Cela peut demander des moyens supplémentaires, j'en ai bien conscience, cela voudra donc dire mobiliser les financements nécessaires. » Or, le texte est muet sur l'expertise publique et aucun engagement financier n'est pris. Qu'advient-il donc de la recommandation de la mission sénatoriale sur les corps d'experts de santé publique indépendants de l'industrie pharmaceutique ?
Sur le remboursement des médicaments, vous vous disiez favorable à de nouvelles règles, « en particulier pour ceux dont le service médical rendu est insuffisant. À l'avenir, il ne devrait y avoir aucune prise en charge par la collectivité, donc pas de remboursement, sauf s'il y a un avis contraire du ministre, mais cet avis devra alors être motivé. Cela veut dire que la Commission de la transparence prend sa décision, qui serait donc de nature à être exécutée, sauf si dans un délai qui reste à déterminer, le ministre s'y oppose sur la base d'un avis motivé. » Or, dans le projet, l'avis de la Commission de la transparence n'est pas rendu exécutoire et la possibilité de dérogation par le ministre est maintenue, contrairement à ce que recommandait l'IGAS.
Enfin, vous interrogiez-vous, « ne devons-nous pas progresser encore dans l'encadrement de la publicité et de la visite médicale ? » La seule disposition du texte à ce sujet concerne la visite médicale hospitalière, prévue pour être désormais collective, alors que l'IGAS recommandait la suppression pure et simple de la profession de visiteur médical et que la mission sénatoriale plaidait pour son extinction et son remplacement par des professionnels dépendants de la Haute Autorité de santé.