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Intervention de Pierre Lellouche

Réunion du 13 septembre 2011 à 15h00
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Pierre Lellouche, secrétaire d'état chargé du commerce extérieur :

Dans la position qui est la mienne, je n'ai pas à porter de jugement de valeur sur la façon dont la convention de l'OCDE est appliquée. En revanche, le Parlement a tous les moyens d'enquêter sur les marchés sensibles. Beaucoup d'informations sont disponibles et ce serait faire oeuvre utile que d'y mettre un peu de lumière. En tout cas, au nom du Gouvernement, je peux dire que nous appliquons scrupuleusement les textes et je souhaite que tout le monde fasse de même.

Monsieur Balligand, je vais regarder avec le Trésor pour vous répondre sur la rupture à partir de 2003. Plusieurs événements ont pu jouer, comme l'entrée de la Chine à l'OMC au début des années 2000, les accords de libre-échange conclus par l'Union européenne, et les « lois Hartz » qui ont mis du temps à se faire sentir. Nous avons subi la concurrence allemande dans beaucoup de domaines, y compris l'agroalimentaire. L'Allemagne a dépassé la France en matière agricole. Nous représentions 9 % du marché mondial il y a dix ans, nous sommes à 6 % et l'Allemagne à 7 %. Pour comprendre pourquoi, je me suis rendu dans plusieurs salons agricoles à travers le monde et j'en ai conclu que c'était vraiment un problème d'organisation des filières.

Notre agriculture a été construite autour de la politique agricole commune, et pas autour de l'exportation vers les marchés émergents. La concurrence brésilienne est très récente. Nous avons, quant à nous, des produits exceptionnels et reconnus comme tels, mais, compte tenu de la taille des entreprises, ils ne passent généralement pas la limite du département. À nous d'organiser les filières et de développer l'échelon régional. Je passe un temps considérable à essayer de faire travailler ensemble les présidents de chambre régionale et les présidents de région, auxquels je n'ai pas vocation à me substituer puisque la loi leur a donné cette compétence. Il faut mettre en place un continuum et je demande aux présidents de région de ne pas disperser leurs efforts. Quand ils ont, pour ainsi dire, leur propre politique étrangère et des postes d'expansion économique à l'étranger, on fait payer le contribuable plusieurs fois. Si la région est meilleure qu'Ubifrance ou l'État, alors qu'elle agisse ! mais au nom de tout le monde. Région, chambre régionale, Oséo – qui est en effet un vrai succès – COFACE, Ubifrance, DIRECCTE,… Il faut essayer, dans un effort de rationalisation, d'atteindre la masse critique en région et, si possible, créer un lieu unique où les PME peuvent venir, comme à Lille où la Maison de l'export marche très bien. Philippe Vigier a raison : une PME de vingt ou même cinquante personnes, qui a un produit attractif, n'a ni le temps ni les moyens d'aller chercher les informations dans ce maquis.

Il est tout aussi impératif d'améliorer le réseau export à l'international. C'est pourquoi nous avons entrepris de réformer profondément notre réseau de postes d'expansion économique, monsieur Brard. Les conseillers commerciaux ont accepté que leur notation et leur mobilité soient évaluées non seulement par leur hiérarchie, mais aussi par les entreprises qu'ils assistent. Il s'agit d'une véritable révolution. Ubifrance va aussi travailler au contrat effectivement signé. Le dispositif commercial commence donc à se mettre en place. J'attends des régions des contrats d'objectifs portant sur le nombre d'entreprises à identifier, à accompagner ; et de contrats signés. J'espère que la campagne électorale ne nous fera pas prendre du retard car l'enjeu dépasse le clivage droite-gauche.

À São Paulo, nous sommes présents, monsieur Brard, et notre ambassadeur, M. Saint-Geours, est très actif. Au Brésil, nous avons vu les PME françaises à l'oeuvre. Ainsi, tout le réseau de téléphériques qui a désenclavé les favelas de Rio a été réalisé par une entreprise française, Poma, spécialisée au départ dans les téléphériques pour les stations de ski. Elle a accompli un travail fantastique et changé la vie de centaines de milliers de Brésiliens qui étaient auparavant complètement coupés de la ville.

J'ai demandé au Conseil économique et social de m'aider à rénover l'institution séculaire des conseillers du commerce extérieur. On doit pouvoir utiliser la force de frappe et la bonne volonté de beaucoup de gens qui consacrent de leur temps, après leur travail, pour accompagner les entreprises qui arrivent et, en région, pour les faire travailler plus efficacement en réseau. J'ai bon espoir.

Je signale à M. Emmanuelli que nous nous démenons comme des diables pour défendre le foie gras de sa région. Nous avons des difficultés avec une foire en Allemagne, dont les organisateurs ont banni les producteurs de foie gras raison au nom de la défense des animaux. Or c'est la principale foire agricole au monde et elle veut boycotter une filière qui représente 35 000 emplois. Le ministre de l'Agriculture et moi-même sommes à la manoeuvre.

La question de M. Rodet sur le matériel militaire et les règles de concurrence européennes mériterait d'être posée au ministre de la Défense et à la DGA.

La délocalisation de Schneider à Hongkong m'a surpris même si M. Tricoire parle couramment le mandarin. Je suis tout à fait pour le dialogue franco-chinois, mais faut-il le pousser jusqu'à aller délocaliser à Hongkong et à Pékin toutes les entreprises qui travaillent avec la Chine ? Alors, pourquoi pas les producteurs de bordeaux haut de gamme ? Je doute que le président de Boeing s'installe en Chine. Un groupe français reste français. Il reste porteur d'une identité, d'une technologie et, le plus possible, d'emplois en France. On peut investir à l'étranger, trouver des sous-traitants, mais il faut déjouer les méandres des codes d'investissement qui ne sont pas toujours aussi favorables aux étrangers que les nôtres.

Chez nous, les transferts de technologies sont libres, une société chinoise peut librement acquérir un quart des installations du port du Havre. La réciproque n'est pas vraie. Sans être le moins du monde protectionniste, je vous mets en garde contre la naïveté. La compétition est rude et nous devons nous battre à armes égales, dans le respect de chacun. Toutefois, chacun est libre de faire comme il l'entend pourvu qu'il ne bénéficie pas de subventions publiques. Dans le cas inverse, l'État est en droit de demander que les emplois soient en France.

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