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Intervention de Pierre Lellouche

Réunion du 13 septembre 2011 à 15h00
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Pierre Lellouche, secrétaire d'état chargé du commerce extérieur :

S'agissant justement du portage des PME par les grands groupes, cher à Olivier Dassault, nous avons plus de grands groupes qu'en Allemagne, mais leurs investissements à l'étranger ne se traduisent pas nécessairement en termes d'emploi. Cela tient aussi aux critères de compétitivité sur place, notamment en Asie.

Voilà pourquoi je veux ressusciter la vieille notion de patriotisme économique, malgré les limites juridiques rappelées par M. Lévy. J'ai ainsi demandé à chacun des patrons du CAC 40 de privilégier, à prix et à qualité équivalents, ses sous-traitants à l'export, comme le font les Coréens, les Chinois, les Brésiliens, les Américains ou les Allemands. Nous avons préparé une charte export, et j'ai obtenu à ce jour l'accord de treize groupes ; avec votre aide, nous convaincrons les autres de les rejoindre à l'automne.

En outre, désormais, l'octroi d'une assurance-crédit à un grand groupe dépendra du nombre d'emplois concernés dans les PME sous-traitantes. Cela répond en partie à votre question, monsieur Cahuzac. Je suis favorable à ce que le Parlement contrôle davantage l'aide publique afin de la subordonner à la création d'emplois, comme en Chine ou au Vietnam.

Nous avons aussi beaucoup travaillé sur les VIE, qui fonctionnent très bien : 6 500 jeunes sont en poste, dont 85 % trouveront un emploi au terme de leur contrat. Je souhaite en effet ouvrir ces postes aux filières professionnelles : un groupe de travail interministériel s'y emploie, et nous le ferons cet automne à l'occasion de la remise d'un grand prix national du VIE.

En outre, tous les dispositifs de financement et d'accompagnement existants sont maintenus, notamment CAP Export, CAP Plus Export et le FASEP. À propos de ce dernier, la question du déliement de l'aide se pose. J'ai demandé à l'Inspection des finances un rapport comparatif sur ce sujet. Lorsqu'un contrat d'étude bénéficie de l'argent public, il doit permettre de faire travailler des entreprises françaises, surtout lorsque des crédits français servent de garantie. Les règles internationales n'autorisent pas toujours ce type de dispositif, mais certains pays prennent, plus ou moins ouvertement, des libertés avec elles. Pourquoi serions-nous les seuls vertueux ? Il ne s'agit pas de protectionnisme, mais de réalisme. Après avoir perdu deux millions d'emplois industriels au cours des deux dernières décennies, nous ne pouvons éluder cette question.

J'ai besoin des parlementaires pour faire évoluer les mentalités sur ce point. Il m'est arrivé d'inaugurer des installations financées à grands frais par le contribuable mais où la part française d'emploi était quasi nulle. Je ne le ferai plus.

Cela me conduit à aborder la réciprocité dans l'accès aux marchés publics. J'avais soulevé le problème lorsque j'étais chargé des affaires européennes. Sur ce point, les textes internationaux sont clairs : selon l'OMC, l'accès aux marchés publics doit être réciproque. Or il est arrivé que l'argent du contribuable européen finance des entreprises de grands pays émergents dont les prix relevaient du dumping, alors que nos entreprises étaient exclues de ces marchés en Europe et dans ces pays.

La bataille de la réciprocité est une bataille totale, qui engage notre crédibilité. Car, si nous ne faisons pas respecter cette règle, des réflexes protectionnistes se feront jour en France et en Europe qui nuiront au commerce mondial. Nous devons nous battre pour la liberté du commerce et pour l'égalité des normes. Ce qui est très difficile, car le cycle de Doha est en panne en raison des divergences sino-américaines. Nous travaillons à une sortie de crise en vue du sommet de Cannes, notamment pour les pays les plus pauvres.

Sur cette question, j'attends avec impatience le texte européen initialement prévu pour l'été et dont nous espérons prendre connaissance à l'automne, une fois que les commissaires européens auront bien voulu trancher entre les tendances divergentes au sein de la Commission. Je l'ai toujours dit, les mêmes règles doivent s'appliquer à tous, et si l'on nous place devant le fait accompli, l'Europe doit réagir au lieu de se contenter de créer des commissions.

Autre point lié à cette problématique : la différenciation entre pays développés et pays en voie de développement. Malgré nos déficits à l'égard de certains pays émergents, nous continuons à alimenter la « machine à dons » au nom du développement, et avec le consensus de la droite et de la gauche. Franchement, on ne peut que s'interroger. J'espère aussi que l'Europe sera plus offensive dans l'utilisation des moyens de défense commerciale.

Le problème de fond – la compétitivité – doit faire consensus. Il est impensable, alors même que les organisations syndicales et les forces politiques de notre pays sont tombées d'accord pour constater un écart d'au moins 10 % entre nous et les Allemands, que la réalité fasse débat. Nous devons nous améliorer, qu'il s'agisse de coût du travail, de dialogue social, ou de fiscalité, au bénéfice de notre outil de production. Nous nous y appliquons mais les « lois Hartz » ont mis sept ans à faire sentir leurs effets sur la compétitivité allemande. Les choix stratégiques que nous avons faits ces dernières années vont dans la bonne direction, mais il nous faudra du temps pour remédier à nos problèmes qui sont d'ordre structurel. Il est facile de délocaliser une entreprise mais il faut dix ans pour la reconstruire.

Les Italiens, qui sont de très bons vendeurs, sont en train de créer, pour soutenir leurs PME, un site Internet « Italie » pour vendre tous les produits italiens. Nous allons nous en inspirer. Je pense aussi à une médaille de l'export pour valoriser le travail de ceux qui se battent sur les marchés étrangers. Je travaille avec Alain Juppé pour renforcer le travail de vente des diplomates et surmonter la contradiction qu'il y aurait en France à être un bon diplomate et un bon vendeur. Nous devons définir une stratégie pour la filière agroalimentaire, où les marges de progression sont considérables si nous faisons des efforts d'organisation – et il n'y a pas que le vin… La coupe du monde de football à Qatar en 2022 représente aussi un marché de 200 milliards de dollars. Enfin, nous démarchons très activement le monde arabe.

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