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Intervention de Yann le Prado

Réunion du 9 juin 2011 à 9h30
Mission d’évaluation et de contrôle de la commission des finances

Yann le Prado, responsable des acquisitions sur Direct 8 et directeur général adjoint de Direct Star :

Les chaînes de Bolloré Médias, en particulier Direct 8 et Direct Star, contribuent fortement, via la « taxe COSIP » (compte de soutien à l'industrie de programmes), aux ressources du CNC. Depuis qu'elles existent, 6,2 millions d'euros ont été prélevés de la sorte, pour moitié au cours de la seule année 2011. Si l'on y ajoute les contributions aux sociétés d'auteurs comme la SACEM et à d'autres sociétés de gestion collective comme la Société civile des producteurs phonographiques (SCPP) et la Société civile des producteurs de phonogrammes en France (SPPF), pas moins de 16 millions d'euros ont été alloués par nos chaînes à la création dans son ensemble, somme qui ne comprend bien évidemment pas tous les achats que nous effectuons, lesquels contribuent également à la création, en finançant les distributeurs et les producteurs.

Outre qu'elle nous retarde dans notre recherche d'un équilibre financier, cette taxe nous paraît injuste pour une société en développement comme la nôtre car elle est assise sur un pourcentage du chiffre d'affaires, et il est plus pénalisant d'être privé de 55 000 euros sur un chiffre d'affaires total d'un million d'euros que de 5,5 millions sur 100…

L'objectif de cette taxe est toutefois légitime puisqu'il s'agit d'aider la création. Ce sont surtout les oeuvres audiovisuelles originales à vocation patrimoniale qui bénéficient du compte : fictions, animations, documentaires, captations de spectacles vivants, magazines présentant un intérêt culturel, vidéo-musiques.

Par un choix de positionnement éditorial, nous ne faisons pas d'animation. Qui plus est, nous ne sommes pas encore à même de financer nous-mêmes des fictions, genre dont la fabrication est très onéreuse – je ne parle pas de la fiction low cost, qui ne donne guère que des audiences au rabais. Le système nous bénéficie donc moins qu'aux chaînes historiques.

En revanche, nous pouvons escompter des aides pour la captation de spectacles vivants, notre convention nous faisant obligation de capter chaque année une vingtaine de spectacles inédits. Pourtant, nous nous sommes aperçus que les producteurs avec lesquels nous travaillons avaient la plus grande peine à se faire aider par le CNC. En effet, les critères d'attribution de l'aide sélective sont assez opaques et subjectifs, comme si le projet, le producteur et la chaîne étaient appréciés a priori. Pour parler clairement, Direct 8 n'est pas Arte, la première faisant souvent l'objet d'un a priori négatif et la seconde d'un a priori positif, au nom d'une vocation culturelle supposément plus affirmée… Nous avons ainsi les plus grandes difficultés à trouver des producteurs aidés pour réaliser des captations de qualité.

La situation est identique pour le documentaire de création. Direct 8 s'est engagé dans une politique de production de documentaires tout à fait respectables, sur des sujets difficiles, comme celui sur la situation des transsexuels au Bangladesh – diffusé d'ailleurs également sur Arte. En l'occurrence, le producteur a obtenu l'aide du CNC. Mais nous avons aussi développé sous une « marque ombrelle », Quartier général, une série de documentaires de prime time, forme de cinéma du réel avec une qualité d'écriture, une vraie vision de l'auteur, un montage original et soigné, un commentaire très personnel, et pour lesquels nous prenons énormément de risques. Or, parce que certains perçoivent, de façon subjective, ces émissions comme relevant davantage du magazine que du documentaire, nous avons de grandes difficultés à obtenir des aides. C'est dommage ! Direct Star commande aussi des documentaires musicaux de très grande qualité à des producteurs extérieurs, qui parviennent souvent à se faire aider par le CNC, ce qui n'est pas le cas de nos productions internes, qui portent pourtant sur les mêmes sujets et sont de même qualité.

Le dispositif actuel devrait en outre être remis à plat car il me paraît inadapté à l'arrivée des télés connectées : certains acteurs, parfois même basés à l'étranger, vont pouvoir dégager des profits avec des contenus aidés par le CNC sans avoir contribué eux-mêmes au financement de cet écosystème.

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